COVID-19 & EXIGIBILITE DES LOYERS COMMERCIAUX

Un premier jugement rendu au fond par le Tribunal judiciaire de Paris le 10 juillet dernier apporte un début de réponse quant à l’accueil réservé par le juge à la question de l’exigibilité des loyers commerciaux en cas de fermeture sanitaire.

En effet, dans le contexte de crise sanitaire liée à la pandémie COVID-19, le Gouvernement français a mis en place différents dispositifs spécifiques liés à la gestion des loyers commerciaux, en plus des règles du droit des obligations et des contrats existants pour faire face à cette situation exceptionnelle. 

Toutefois, aucune de ces mesures n'autorise le non-paiement des loyers et charges locatives qui restent dus et pourront ainsi faire l’objet d’une action en paiement par le bailleur.

C’est ce que confirme – si besoin était – la décision du Tribunal judiciaire de Paris du 10 juillet 2020 (Jugement de la 18ème chambre civile du tribunal judiciaire de Paris, RG n.°20/04516 du 10 juillet 2020).

A la suite de cette première décision, particulièrement favorable aux bailleurs commerciaux, le Tribunal judicaire a publié un communiqué, dont voici la reproduction du contenu :

“Le tribunal judiciaire de Paris était saisi de la question de savoir si un restaurateur, qui n’a pas pu ouvrir au public son commerce du fait des mesures prises pour éviter la propagation du virus Sars-Cov-2, était redevable envers son bailleur des loyers et charges échus entre le 14 mars et le 2 juin 2020, période de fermeture des cafés – restaurants.

Le bailleur demandait le paiement intégral du loyer du 2 ème trimestre 2020, par voie de compensation avec une somme qu’il devait au locataire. Pour s’opposer à la compensation, et donc ne pas être condamné au paiement de ce loyer, le locataire, sans se prévaloir d’un cas de force majeure ou d’un manquement du bailleur à ses obligations, soutenait que l’article 4 de l’ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 avait suspendu l’exigibilité du paiement des loyers de cette période dite juridiquement protégée.

Le tribunal écarte cette argumentation, relevant que cet article 4 interdit l’exercice de voies d’exécution forcée, mais ne suspend pas l’exigibilité du loyer qui peut être spontanément payé ou réglé par compensation, si le bailleur est, de son côté, redevable de certaines sommes à son locataire.

Le tribunal retient en outre que, les contrats devant être exécutés de bonne foi selon l’article 1134 devenu 1104 du code civil, les parties sont tenues, en cas de circonstances exceptionnelles, de vérifier si ces circonstances ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d’exécution de leurs obligations respectives. Constatant qu’en l’espèce le bailleur avait fait des propositions d’aménagement du paiement du loyer échu pendant la période dite juridiquement protégée et que le locataire n’avait pour sa part fait aucune proposition en retour, le tribunal a retenu que le bailleur avait exécuté de bonne foi ses obligations et a fait droit à sa demande de paiement intégral du loyer du 2ème trimestre 2020, par la voie de la compensation.”

  • Jugement de la 18ème chambre civile du tribunal judiciaire de Paris, RG n.°20/04516 du 10 juillet 2020 ;
  • Communiqué du 15 juillet 2020.