Préoccupation majeure des politiques de l’habitat et donc des collectivités territoriales, la lutte contre l’habitat indigne ou insalubre, et des édifices menançant ruine a connu ces dernières années des évolutions notables.
Plusieurs lois ont encadré cette lutte. La loi ALUR du 24 mars 2014 a introduit les ORCOD (opérations de requalification des copropriétés dégradées) pour requalifier les copropriétés dégradées. L’ordonnance du 16 septembre 2020 a harmonisé et simplifié la police des immeubles pour en faciliter l’application. Enfin, la loi « Habitat dégradé » du 9 avril 2024 vise à accélérer et simplifier la rénovation des logements en renforçant les mesures de protection.
Rationalisation des compétences
L’ordonnance de 2020 clarifie les compétences de police administrative entre préfet et maire :
- Le préfet est responsable des questions d’insalubrité affectant la santé publique.
- Le maire ou le président de l’EPCI intervient pour les problèmes de sécurité des immeubles, notamment en cas de défaut de solidité.
Une procédure contradictoire est mise en place avec les propriétaires, incluant un recours à l’expertise (art. L . 511-9 CCH).
L’arrêté de mise en sécurité ou de « traitement de l’insalubrité » peut imposer diverses mesures :
- Réparation du bâtiment (art. L. 511-5 CCH).
- Cessation de la mise à disposition à des fins d’habitation (art. L.511-11 CCH) .
- Interdiction temporaire ou définitive d’habiter ou d’accéder au logement (article L511-18 CCH)
- Démolition (art. L. 511-6 CCH).
Les interdictions et la démolition sont subsidiaires et ne peuvent être prononcées que si les autres mesures sont insuffisantes.
Dans ce cadre, les autorités de police ont un pouvoir de visite entre 6 h et 21 h pour évaluer les risques d’un logement. En cas d’opposition ou d’absence prolongée de l’occupant, le juge des libertés et de la détention peut être saisi.
Dispositif d’exécution pour les périls
Si le propriétaire ne réalise pas les travaux exigés, une astreinte administrative est appliquée. En cas de manquement persistant, la commune peut exécuter les travaux d’office à ses frais et en exiger le remboursement (art. L. 511-5 CCH).
Procédure d’urgence en cas de péril imminent
En cas de danger imminent, des mesures peuvent être imposées sans procédure contradictoire préalable (art. L. 511-19 CCH). Le maire peut ordonner une évacuation immédiate, établir un périmètre de sécurité et, dans certains cas, demander au juge judiciaire une autorisation de démolition par procédure accélérée. En situation d’extrême urgence, il conserve ses pouvoirs de police générale (CE, 10 oct. 2005, Cne de Badinières, n° 259295) en cas de situation d’extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent
Renforcement des sanctions et nouveaux dispositifs
Depuis la loi du 9 avril 2024, en cas de non-exécution des obligations, des peines pénales sont également prévues (article L511-22 du CCH). Par ailleurs, pour inciter davantage le propriétaire à exécuter l'arrêté, une astreinte, plus dissuasive, peut être appliquée. Ces sanctions sont cumulables, car elles relèvent de deux procédures distinctes : l'une administrative, l'autre pénale.
Un autre outil de lutte contre l'habitat indigne est le permis de louer (article L635-1 du CCH). Désormais obligatoire dans les zones touchées par l’habitat indigne, il permet un contrôle préalable à la mise en location des logements. Son objectif est d’empêcher la mise sur le marché de biens non conformes aux normes de sécurité ou d’hygiène.
Enfin, au sens de l'article L.511-2 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, un autre outil peut être utilisé en la matière : la procédure d’expropriation.
Celle-ci est conditionnée à deux arrêtés de péril non appliqués dans un délai de 10 ans pour les immeubles jugés irrémédiablement indignes. La procédure, comprenant une phase administrative et une phase judiciaire, sera raccourcie.
Désormais, un seul arrêté préfectoral vaudra à la fois déclaration d’utilité publique, sans enquête publique, acte de cessibilité, et sans enquête parcellaire. Par cette même décision, le préfet fixera lui-même l’indemnité provisionnelle et la date d’entrée en possession, qui constituera l’ultime étape, au minimum un mois après la prise de son arrêté.
Article écrit par Hicham El Abdellati sous la direction de Chloé Schmidt-Sarels
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