Les sanctions lourdes fixées par le décret de procédure civile de décembre 2009 dans les matières avec représentation obligatoire ne sont pas contraires aux principes posés par la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, notamment à son article 6 §1.
En vertu de l’article 6§1 précité, le droit d’accès au juge doit garantir « un contrôle efficace de toute ingérence étatique dans les droits des individus » (CEDH, Golder c/ RU, 21 février 1975 - CEDH, Klass c/ RFA, 6 septembre 1978).
Mais ce droit n’est pas absolu et « peut donner lieu à des limitations implicitement admises car il appelle de par sa nature même une réglementation par l’Etat ». Cependant, « les limitations appliquées ne sauraient restreindre l’accès ouvert à l’individu d’une manière ou à un point tel que le droit s’en trouve atteint dans sa substance même » (CEDH, Khalfaoui c/ France, 14 décembre 1999).
Aux termes d’un arrêt rendu le 24 septembre 2015 (pourvoi n°13-28017), la seconde chambre civile de la Cour de cassation a estimé que la caducité de l’appel, encourue du fait d’une notification des conclusions de l’appelant à l’intimé non conforme aux textes en vigueur, ne constitue pas une atteinte aux règles posées par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Pour la Cour de cassation, la sanction de la caducité de l’appel n’est pas disproportionnée au but poursuivi, lequel est d’assurer la célérité et l’efficacité de la procédure d’appel.
Elle écarte donc le moyen de cassation développé tendant à faire juger que le droit d’accès au juge ne pouvait être ainsi limité, la mesure mise en oeuvre ne poursuivant pas un but légitime et étant disproportionnée au but visé.
Il faut bien dire que dans l’espère soumise à la Cour de cassation, l’appelant avait tout de même signifié ses conclusions à la partie intimée, laquelle en avait donc eu connaissance dans les délais applicables, mais cet appelant n’avait pas respecté les formes réglementaires pour procéder à une signification valable de ses écritures.
La Cour d’Appel avait alors retenu que du défaut de respect des formes de notification s’ensuivait que les appelants n’avaient tout simplement conclu dans le délai de trois mois imparti à peine de caducité. La discussion sur l’absence de grief occasionné à la partie intimée avait été alors jugée purement et simplement sans objet, dans la mesure où la caducité n’était pas encourue au titre d’un vice de forme, mais du fait de l’absence de remise dans le délai au greffe de la Cour des conclusions d’appel.
Cette position sévère n’est pas surprenante pour l’auteur de ces quelques lignes et s’inscrit même dans une continuité certaine.
En effet, la Cour de cassation avait déjà jugé, dès juin 2014, pour valider la sanction de l’article 902 du code de procédure civile (pourvoi n°13-22011), qu’il incombait à l’appelant d’accomplir les actes nécessaires à la régularité de la procédure d’appel, sans que les délais prescrits ne privent les parties du droit d’accès au juge et à un procès équitable.
Plus encore, la Cour de cassation, toujours en juin 2014 (pourvoi n°13-22013), avait jugé en des termes identiques concernant la sanction prévue à l’article 908 du code de procédure civile en cas de défaut de signification des conclusions par l’appelant dans le délai de trois mois de sa déclaration d’appel.
Donc gare aux sanctions…
La Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne pourra pas constituer une planche de salut.
Maître Alexis Devauchelle
Avocat à la Cour
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