Le Conseil d'Etat censure un arrêté préfectoral qui, rejetant la demande de titre de séjour de la requérante, a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a, ainsi, été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien susvisé, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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Maître Amadou TALL

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Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2007 au greffe de la cour, présentée pour Mme X, demeurant chez M. et Mme X, ..., par Me PEL ; Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505674 du 26 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 juin 2005 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de titre de séjour, à ce qu'il soit enjoint au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du troisième mois, et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 3 juin 2005 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du troisième mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'arrêté portant délégation de signature a été publié le 3 juin 2005 et ne pouvait prendre effet que le lendemain, soit le 4 juin 2005 ; que la décision du 3 juin 2005 a donc été prise par une autorité incompétente ;

Que le fait qu'un précédent arrêté a été publié en 2003 ne peut pallier cette illégalité compte tenu du nouvel arrêté de nomination intervenu en 2005 ; que la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 7 quater de l'accord franco-algérien et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Qu'elle a des attaches très fortes avec la France, d'ordre culturel, social et familial ; qu'elle y a vécu entre l'âge de deux ans et celui du dix-huit ans ; qu'elle y a été scolarisée ; qu'elle est revenue en France en 2003 ; qu'elle ne peut être regardée comme une primo-immigrante ; que l'intégralité de sa famille demeure en France, à savoir son père, sa mère et ses trois soeurs, l'une handicapée à 90 % et l'autre à 80 % ;

Que tous sont de nationalité française ; qu'elle a de nombreux oncles et tantes, cousins et cousines qui demeurent en France ; que son ex-mari dont elle n'a plus aucune nouvelle était le seul lien qu'elle avait avec la Tunisie ; que la décision a été prise en méconnaissance de stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Qu'elle porte une atteinte excessive au droit de ses parents et de ses soeurs au respect de leur vie familiale ; qu'elle apporte un soutien psychologique à ses soeurs handicapées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juillet 2008 :

(...)

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, dans sa rédaction issue de l'avenant du 8 septembre 2000 : « (...) Les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale » ;

Qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7 º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) » et,

Qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

« 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ;

2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que Mme X, de nationalité tunisienne, née en 1977, fait valoir qu'elle a vécu en France de 1979 à 1995, qu'elle y a été scolarisée et que ses parents et ses deux soeurs handicapées, tous de nationalité française, ainsi que des oncles, tantes, cousins et cousines, résident en France ;

Que si elle a quitté la France en juillet 1995 du fait de son mariage et n'y est revenue qu'en juin 2003, à la suite de son divorce, il n'est pas contesté par le préfet qu'elle ne dispose plus d'attaches dans son pays d'origine ;

Que, dans ces conditions, Mme X est fondée à soutenir que l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine rejetant sa demande de titre de séjour a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a, ainsi, été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien susvisé, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 juin 2005 du préfet des Hauts-de-Seine ;

Sur les autres conclusions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ;

Considérant qu'eu égard aux motifs du présent arrêt et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de Mme X se serait modifiée, en droit ou en fait, depuis l'intervention de la décision attaquée, l'exécution de cet arrêt implique nécessairement la délivrance d'un titre de séjour « vie privée et familiale » à l'intéressée ;

Qu'il y a lieu, en conséquence, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de procéder à ladite délivrance dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme X de la somme de 1 500 euros qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0505674 du 26 avril 2007 du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 3 juin 2005 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté la demande de titre de séjour présentée par Mme X sont annulés.

(...)

CAA., VE. 2008-VII

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