NON : un lien « direct » entre le service et le malaise de l'agent suffit à caractériser son imputabilité au service. Je constate malheureusement que de nombreux rapports de médecins experts de l’administration transmis aux commissions de réforme motivent les avis de rejets d’imputabilité au service d’une pathologie par une absence de lien direct et exclusif. Je m'insurge contre cette interprétation erronée de la règlementation et je profite de cette actualité de droit public pour relever que dans un arrêt du 12 juillet 2016, la Cour administrative d’appel de Nantes vient de rappeler à juste titre que seul un lien direct est nécessaire pour reconnaitre l'imputabilité au service d’une pathologie. Cependant dans ce dossier, il a été jugé que le recteur aurait pris la même décision sur le seul fondement de l'absence d'un lien direct. L'accident cardiaque ayant entraîné le décès de M. F... trouvait sa cause, pour une part prépondérante, dans son état de santé et devait être regardé, alors même qu'il était survenu pendant le service, comme étant sans lien direct avec celui-ci.

En effet, une maladie peut être considérée comme imputable au service lorsqu'elle a un lien direct avec un accident de service. Il est important de signaler, contrairement à ce qu’affirment de trop nombreuses administrations et de nombreux médecins experts dans leurs rapports, à l’appui d’un refus, qu’un lien exclusif n'est pas exigé.

Conseil d'État, 5ème / 4ème SSR, 23/09/2013, 353093

« Le droit, prévu par les dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, d'un fonctionnaire hospitalier en congé de maladie à conserver l'intégralité de son traitement en cas de maladie provenant d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. »

En l’espèce, Mme F... relève appel du jugement du 30 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 mai 2013 par laquelle le recteur de l'académie de Caen a refusé de reconnaître comme imputable au service le malaise cardiaque en raison duquel est décédé son époux M. D...F..., maître contractuel de l'enseignement privé du second degré, durant un cours au collège Saint-Thomas d'Aquin à Flers (Orne), le 30 mai 2012, et en conséquence a décidé qu'elle ne pouvait pas bénéficier des dispositions prévues au deuxième alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984.


Si la décision contestée mentionne qu'un « lien direct et exclusif » n'est pas démontré entre l'exécution du service et le malaise de l'agent, alors que seul un lien direct était nécessaire pour reconnaitre l'imputabilité au service, il ressort des pièces du dossier que le recteur aurait pris la même décision sur le seul fondement de l'absence d'un lien direct.

L'erreur de droit dont est entachée le motif précité est ainsi sans influence sur la légalité de la décision en cause.

Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport d'expertise établi le 15 mars 2013 par le DrA..., cardiologue agréé, que M. F... avait été hospitalisé en 1995 pour un remplacement valvulaire aortique mécanique pour insuffisance aortique, sans lien avec le service, et qu'il était depuis sous traitement anticoagulant.

Il était noté par son cardiologue un facteur de risque indépendant de ses fonctions, au surplus accru par le tabagisme.

Les certificats médicaux de novembre 2011 et janvier 2012, justifiant de la nécessité d'un poste adapté avec moins de déplacements, ne sont pas de nature à établir l'imputabilité au service du malaise cardiaque eu égard aux circonstances dans lesquelles celui-ci est survenu, M. F... pouvant disposer d'une chambre prêtée par l'établissement où il enseignait, où il avait d'ailleurs pu dormir la veille de son accident, et n'ayant ainsi pas été soumis à des conditions particulièrement pénibles ou à un effort inhabituel.

Ainsi, l'accident cardiaque ayant entraîné le décès de M. F... trouvait sa cause, pour une part prépondérante, dans son état de santé et devait être regardé, alors même qu'il était survenu pendant le service, comme étant sans lien direct avec celui-ci.

Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

SOURCE : CAA de NANTES, 4ème chambre, 12/07/2016, 14NT01687, Inédit au recueil Lebon