L'article 52 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dispose que « L'autorité territoriale procède aux mouvements des fonctionnaires au sein de la collectivité ou de l'établissement ; seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l'avis des commissions administratives paritaires. Dans le cas où il s'agit de remplir une vacance d'emploi compromettant le fonctionnement du service et à laquelle il n'est pas possible de pourvoir par un autre moyen, même provisoirement, la mutation peut être prononcée sous réserve d'examen ultérieur par la commission compétente. »

Ces dispositions législatives, précisées par plusieurs arrêts du Conseil d'Etat, font apparaître que le simple changement d'affectation à l'intérieur des services d'une collectivité dans le cadre d'une réorganisation n'a pas à être soumis aux règles de la procédure disciplinaire ni à être précédé de la communication du dossier où de la consultation de la commission administrative paritaire.

Voir en ce sens l'arrêt Conseil d'Etat, 3 / 5 SSR, du 28 octobre 1991, 86198, inédit au recueil Lebon : « (..) Considérant que Mme X..., agent de bureau, affectée au conservatoire de la ville de Besançon, où elle était chargée à la fois d'accueillir le public et d'effectuer des travaux de dactylographie, a été, par la décision attaquée, affectée au bureau "Mutuelle" du service du personnel de la mairie pour être chargée uniquement de travaux de dactylographie ; Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce transfert, intervenu dans le cadre d'une réorganisation du conservatoire et d'une nouvelle répartition des tâches des agents, ait été prononcé par mesure disciplinaire ou en considération de la personne de l'intéressée ; qu'il n'a entraîné aucun changement dans la situation administrative de Mme X..., qui a continué à exercer des fonctions de la nature et du niveau de celles afférentes à son grade ; que si dans sa précédente affectation elle bénéficiait en fait des congés scolaires, la perte de cet avantage, auquel elle n'avait aucun droit, ne peut être regardé comme un déclassement ; que, dans ces conditions, ce transfert, qui correspondait à un simple changement d'affectation à l'intérieur des services de la commune, n'avait pas à être soumis aux règles de la procédure disciplinaire, ni à être précédée de la communication du dossier ou de la consultation de la commission administrative paritaire ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;(...) »

- Par contre, le changement d'affectation d'un agent public pour motif disciplinaire doit être obligatoirement précédé de la communication du dossier. Voir en ce sens l'arrêt Conseil d'Etat, 3 SS, du 20 février 1989, 69594, inédit au recueil Lebon : (...) « Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la lettre du 22 novembre 1983 du directeur de cabinet du maire de Nîmes que la décision de remettre Mme X... à la disposition du secrétaire général de la mairie en vue d'une autre affectation a été motivée par un "manquement grave" de Mme X... à ses obligations professionnelles ; que cette décision, qui met fin pour un motif disciplinaire à l'affectation de Mme X... à l'atelier de reprographie rattaché au cabinet du maire, a revêtu le caractère non, comme l'ont estimé les premiers juges, d'une simple mesure préparatoire ne faisant pas grief à l'intéressée, mais d'une sanction disciplinaire que celle-ci était recevable à déférer au juge de l'excès de pouvoir ; que Mme X... est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que par l'article 1er de son jugement du 30 janvier 1985 le tribunal administratif a rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre la décision du 22 novembre 1983 ;(...) »

Il en va de même en cas de mutation d'un agent public dans de nouvelle fonctions, la mesure étant prise en considération de la personne et portant modification de sa situation.

Voir en ce sens : Conseil d'Etat, 3 / 5 SSR, du 23 juillet 1993, 93008, inédit au recueil Lebon « (...) Considérant que M. X..., chef de bassin titulaire de la piscine municipale de Morsang-sur-Orge, a été, à la suite d'incidents, affecté en qualité de responsable de la propreté de la commune et chargé à ce titre du nettoiement et de l'entretien des parcs municipaux ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision implicite du maire rejetant une réclamation du 2 septembre 1983 par laquelle M. X... lui avait demandé de le rétablir dans ses fonctions de chef de bassin de la piscine ; Considérant que si l'intéressé avait conservé son titre de chef de bassin et sa rémunération, la décision prononçant sa nouvelle affectation n'en a pas moins constitué une mutation portant modification de sa situation ; que cette décision faisait ainsi grief et était, comme telle, susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir;(...)»

Voir également : Conseil d'Etat, 3 / 5 SSR, du 28 octobre 1992, 94894, inédit au recueil Lebon

" (...) Considérant que M. X..., inspecteur d'hygiène principal, qui assurait les fonctions de chef du service technique de désinfection au laboratoire départemental, a été, par décision du président du conseil général de la Guyane en date du 14 avril 1986, muté à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales où il a été chargé des fonctions d'agent responsable du magasin de cette direction ; Considérant, d'une part, que cette mutation, qui comportait une diminution sensible du niveau des attributions et des responsabilités de l'intéressé, n'avait pas le caractère d'une simple mesure d'ordre d'intérieur mais comportait une modification de sa situation ; que, dès lors, M. X... était recevable à en demander l'annulation ; Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de ses motifs, que cette mutation est intervenue en considération de la personne de M. X... ; qu'elle ne pouvait donc être légalement prononcée sans que l'intéressé ait été mis à même d'obtenir communication de son dossier ; que cette formalité n'a pas été respectée ;(...) "

Voir enfin Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 06/04/2007, 286727 : " (...) Considérant qu'en estimant que la décision du 29 mai 2002 par laquelle le président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE CHAVILLE a retiré à M. A ses fonctions de directeur du foyer de résidence pour personnes âgées, pour lui confier celles, nouvellement créées, de chargé de mission gérontologique, consistant à étudier la mise en place de nouveaux services en faveur des personnes âgées, à apporter un soutien technique au président du centre communal et à l'adjoint au maire de la commune chargé des personnes âgées et à assurer une veille juridique et technique, faisait grief à l'intéressé et entraînait une diminution de ses responsabilités, le tribunal administratif, par un jugement suffisamment motivé, a, sans les dénaturer, porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine qui n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ; qu'en en déduisant que l'intéressé avait fait l'objet d'une modification de sa situation au sens des dispositions susrappelées de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit ; (...) "

Mais quelle différence y a-t-il entre une mutation d'office et une sanction disciplinaire déguisée ?