La règle édictée à l'article R.421-1 du Code de justice administrative selon laquelle « la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. », entraîne t-elle automatiquement l'irrecevabilité d'une requête prématurée? En principe, il résulte de ce texte que la requête dirigée contre une décision qui n'existe pas encore dans l'ordonnancement juridique est prématurée et dès lors irrecevable. Le caractère prématuré de la requête est d'ailleurs un moyen d'ordre public que le juge est obligé de soulever d'office. Voir en ce sens Conseil d'Etat, du 21 janvier 1970, 76924, publié au recueil Lebon à propos de « (...) Conclusions dirigées contre des lettres par lesquelles le ministre des Armées se proposait de faire procéder à la liquidation de la pension de l'intéressé, alors que le requérant n'aurait été recevable à faire valoir les droits qu'il estime tenir du Code des pensions qu'à l'occasion de la liquidation de sa pension. Caractère prématuré de ces conclusions soulevé d'office. (...) ».Cependant, dans certains cas, le juge administratif admet qu'il puisse être saisi avant que n'intervienne une décision tacite de l'administration. En principe, et sauf dispositions contraires, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'administration fait naître une décision implicite de rejet de cette demande. La circonstance qu'une requête est dirigée contre une prétendue décision implicite de rejet avant l'expiration du délai de deux mois ne fait pas obstacle à la recevabilité de cette requête dès lors que ce délai est expiré à la date à laquelle le juge statue, sans que soit intervenue une décision expresse donnant satisfaction au requérant (Conseil d'Etat, 20 novembre 1964, Angélini, Rec. p. 570). La Haute juridiction administrative admet même qu'aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable à la date d'enregistrement de la requête ne peut être opposée au requérant si, postérieurement à cette date, il a saisi l'administration d'une demande, le silence gardé par celle-ci pendant plus de deux mois faisant naître une décision implicite de rejet contre laquelle les conclusions de sa requête doivent être regardées comme dirigées ( Voir en ce sens Conseil d'Etat, du 8 juillet 1970, 72891, publié au recueil Lebon) « (...) Aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut lui être opposée, si, postérieurement à l'enregistrement de sa demande, il a saisi l'administration d'une réclamation, le silence gardé par celle-ci pendant plus de quatre mois (aujourd'hui deux mois) faisant naître une décision implicite de rejet contre laquelle les conclusions de la demande doivent être regardées comme dirigées. (...) »

Voir aussi et plus récemment : Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 11/04/2008, 281374, Publié au recueil Lebon « (...) Lorsque le requérant a formé, postérieurement à l'introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l'administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue, cette décision lie le contentieux. La demande indemnitaire est recevable, que le requérant ait ou non présenté des conclusions additionnelles explicites contre cette décision, et alors même que le mémoire en défense de l'administration aurait opposé à titre principal l'irrecevabilité faute de décision préalable, cette dernière circonstance faisant seulement obstacle à ce que la décision liant le contentieux naisse de ce mémoire lui-même.(...) »

POUR APPROFONDIR : La demande préalable en indemnisation doit-elle être formée obligatoirement avant l'introduction du recours de plein contentieux ?