OUI : dans un arrêt en date du 10 février 2017, le Conseil d’Etat considère que l'intervention prochaine d'un jugement au fond peut justifier le rejet d’une requête en référé-suspension.

Aux termes du premier alinéa de l'article L.521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (...) ».

En l’espèce, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris que, par un jugement du 4 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Pimiento Music tendant à la décharge des retenues à la source prélevées sur les dividendes qu'elle a versés à la société Nerthus Invest au cours des exercices clos en 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Après que ces impositions et pénalités ont fait l'objet, en juin 2016, d'un avis de mise en recouvrement et d'une mise en demeure de payer, la société Pimiento Music a assorti son appel contre ce jugement d'une demande, présentée sur le fondement de l'article L.521-1 du code de justice administrative, tendant à la suspension de cette mise en recouvrement.

Par une ordonnance du 27 septembre 2016, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté cette demande au motif qu'elle ne remplissait pas la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une telle mesure.

Le contribuable qui a saisi le juge de l'impôt de conclusions tendant à la décharge d'une imposition à laquelle il a été assujetti est recevable à demander au juge des référés, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L.521-1 du code de justice administrative, la suspension de la mise en recouvrement de l'imposition, dès lors que celle-ci est exigible.

Le prononcé de cette suspension est subordonné à la double condition, d'une part, qu'il soit fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la régularité de la procédure d'imposition ou sur le bien-fondé de l'imposition et, d'autre part, que l'urgence justifie la mesure de suspension sollicitée.

Pour vérifier si la condition d'urgence est satisfaite, le juge des référés doit apprécier la gravité des conséquences que pourraient entraîner, à brève échéance, l'obligation de payer sans délai l'imposition ou les mesures mises en œuvre ou susceptibles de l'être pour son recouvrement, eu égard aux capacités du contribuable à acquitter les sommes qui lui sont demandées.

Pour juger que la demande présentée par la société Pimiento Music ne remplissait pas la condition d'urgence à laquelle l'article L.521-1 du code de justice administrative subordonne la mesure de suspension, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a relevé, sans dénaturer les faits, que la requête d'appel de la société était inscrite au rôle d'une audience du 20 octobre 2016, soit moins d'un mois après l'ordonnance qu'il a rendue, et était dès lors susceptible d'être jugée à une date rapprochée.

 En se fondant sur cette circonstance, et en estimant nécessairement qu'au vu des éléments apportés à l'appui de la demande de suspension, dont il ressortait que le montant des disponibilités de la société requérante était supérieur à celui des impositions et pénalités mises en recouvrement, aucun préjudice irréversible n'était susceptible de résulter de leur recouvrement avant le jugement de la requête au fond, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit.

Il résulte de ce qui précède que la société Pimiento Music n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

SOURCE : Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 10/02/2017, 404291