OUI : l’intervention volontaire permet à une personne  physique ou morale (association de défense, syndicat …) , de se joindre spontanément à une instance judiciaire dans laquelle elle n’est ni partie ni mise en cause, en vue de soutenir les conclusions du demandeur (intervention en demande) ou celles du défendeur (intervention en défense).

Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 17/03/2010, 311443

Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 07/05/2008, 287909, Inédit au recueil Lebon

Ainsi, l’intervenant peut enrichir les débats en invoquant des arguments spécifiques, ou en donnant des informations supplémentaires,  ou en précisant certains éléments du dossier.

Cependant, l’intervenant ne peut ni changer ni élargir ni modifier l’objet du litige.

L’irrecevabilité de l’action principale emporte l’irrecevabilité de l’intervention et le désistement du requérant prive l’intervention de son objet.

1 - L'intervention doit être formée par un mémoire distinct intitulé « Mémoire en intervention volontaire ». (Modèle fourni sur demande)

Article R.632-1 du code de justice administrative : « L'intervention est formée par mémoire distinct.

Lorsque l'intervention est formée par une personne mentionnée au premier alinéa de l'article R. 414-1, elle est présentée dans les conditions prévues par cet article et par l'article R. 414-3.

Le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, le président de la chambre chargée de l'instruction ordonne, s'il y a lieu, que ce mémoire en intervention soit communiqué aux parties et fixe le délai imparti à celles-ci pour y répondre.

Néanmoins, le jugement de l'affaire principale qui est instruite ne peut être retardé par une intervention. »

NOTA : 

Aux termes de l'article 10 du décret n° 2016-1481 du 2 novembre 2016, ces dispositions entrent en vigueur le 1er janvier 2017 et, pour les tribuneaux administratifs de Nouvelle-Calédonie et de Wallis-et-Futuna, à la date fixée par l'arrêté du garde des sceaux prévu par l'article 6 du décret n° 2012-1437 du 21 décembre 2012.

2 - Le mémoire en intervention volontaire doit-être motivé.

Conseil d'Etat, Section, du 12 juin 1981, 13173 13175, publié au recueil Lebon 

« (…) Une intervention non motivée n'est pas recevable. (…) »

3 – L’avocat est obligatoire si l’intervention volontaire se rattache à un contentieux lui-même soumis au ministère d’avocat.

Conseil d'Etat, Section, du 13 octobre 1967, 61207, publié au recueil Lebon

« (…) CONSIDERANT qu'aux termes de l'article 41 de l'ordonnance du 31 juillet 1945 à la requête des parties doit être signée par un "avocat au Conseil d'Etat" ; qu'en vertu de l'article 42 de la même ordonnance "la requête peut être signée par la partie intéressée ou son mandataire lorsque des lois spéciales ont dispensé du ministère d'avocat et, notamment, pour les affaires visées à l'article 45" ;
Considérant que l'intervention de la dame Y... Geneviève et autres habitants de la section de commune de Chaunac est présentée au soutien de conclusions tendant au rejet d'un appel formé contre un jugement du Tribunal administratif de Limoges qui a annulé deux arrêtés du préfet de la Corrèze en date des 17 avril, 7 mai 1962 autorisant l'Entreprise Bourg à occuper temporairement des terrains dans la section de Chaunac de la commune de Naves ;
Considérant que ni l'article 45 de l'ordonnance du 31 juillet 1945, modifié par l'article 13 du décret du 30 septembre 1953, ni aucun texte spécial ne dispense une telle requête du ministère d'un avocat au Conseil d'Etat ; que, dès lors, l'intervention susvisée, présentée sans le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat, n'est pas recevable ; (…) »

4 – L’intervention volontaire peut être introduite sans condition de délai, tant que l’instruction n’est pas clôturé à condition toutefois de ne pas retarder le jugement de l’affaire.

Conseil d'Etat, 6 / 2 SSR, du 1 mars 1995, 124550, mentionné aux tables du recueil Lebon

«  (…) L'introduction d'une intervention n'est pas subordonnée à d'autre condition de délai que celle découlant de l'obligation pour l'intervenant d'agir avant la clôture de l'instruction. Devant les tribunaux administratifs, cette dernière résulte de la date limite fixée par l'ordonnance de clôture ou, à défaut d'une telle ordonnance, dépend, soit de la présentation par les parties de leurs observations orales, soit de l'appel de l'affaire à l'audience. Les dispositions du troisième alinéa de l'article R.187 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, aux termes desquelles le jugement de l'affaire "ne pourra être retardé par une intervention", ne frappe pas d'irrecevabilité une intervention au motif qu'elle concerne une affaire qui est en état d'être jugée. Elles dispensent seulement, en pareille hypothèse, le tribunal administratif de procéder à la communication aux parties d'une intervention qui serait produite à ce stade de la procédure hors le cas où la solution du litige au principal dépendrait d'un moyen invoqué uniquement par l'intervenant.(…) »

Voir également :

Conseil d'Etat, Section, du 16 décembre 1994, 105798, publié au recueil Lebon

 «  Une association pour le compte de laquelle aucun mémoire n'a été déposé au greffe du tribunal administratif et donc pour laquelle aucune intervention n'a été formée avant la date de clôture de l'instruction n'a pas la qualité de partie à l'instance, alors même que son avocat a fait connaître avant cette date au président du tribunal administratif qu'il s'inscrivait en vue de former une telle intervention. Le président du tribunal administratif n'avait donc pas l'obligation de lui notifier l'ordonnance de clôture de l'instruction ni de la convoquer à l'audience. »

5 – L’intervenant volontaire doit s’associer au moins partiellement aux conclusions du requérant ou du défendeur.

Conseil d'Etat, 2 / 6 SSR, du 5 février 1988, 76595, mentionné aux tables du recueil Lebon

«  Une intervention ne peut être admise que si son auteur s'associe soit aux conclusions de l'appelant, soit à celles du défendeur. M. et Mme S., à qui le recours du ministre de l'intérieur a été communiqué, n'ont pas présenté de mémoire tendant au rejet du recours. Par suite, l'intervention du groupe d'information et de soutien des travailleurs immigrés n'est pas recevable. »

Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 06/04/2007, 297704

« Considérant qu'une intervention ne peut être admise que si son auteur s'associe, au moins partiellement, soit aux conclusions du requérant, soit aux conclusions du défendeur ; que l'intervention de M. , qui ne s'associe ni aux conclusions de M. A ni à celles du ministre de l'outre-mer, n'est, par suite, pas recevable ; »

6 - L’intervenant volontaire ne peut adopter une posture neutre en se limitant à formuler des observations générales.

Conseil d'État, Assemblée, 19/07/2011, 335625, Publié au recueil Lebon

« Considérant que le mémoire produit par l'association Institut pour la Justice doit être regardé comme une intervention ; que, toutefois, une intervention ne peut être admise que si son auteur s'associe soit aux conclusions du demandeur, soit à celles du défendeur ; que l'association se bornant à présenter des observations d'ordre général pour éclairer la solution à donner au litige, son intervention n'est par suite pas recevable ; »

7 - L’intervenant volontaire ne peut développer de prétentions propres sauf à suggérer au juge l’exercice d’un pouvoir qu’il pourrait prendre lui-même « indépendamment des conclusions des parties ».

Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 28/04/2006, 242727, Publié au recueil Lebon 

« Considérant que l'Union des fédérations et syndicats nationaux d'employeurs sans but lucratif du secteur sanitaire, social et médico-social est recevable, en sa qualité d'intervenante, à présenter des conclusions en ce sens alors même que les parties à l'instance n'en ont pas formées, dès lors que telles conclusions tendent à ce que le juge adopte des dispositions qu'il est en son pouvoir de prendre indépendamment des conclusions des parties ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de limiter dans le temps les effets des annulations prononcées par la présente décision ; »

8 - L’intervenant volontaire peut faire valoir des prétentions propres à condition de ne pas présenter des questions différentes de celles soumises au juge par les parties.

Conseil d'Etat, 1ère et 2ème sous-sections réunies, du 14 mars 2003, 228214, publié au recueil Lebon

« L'intervenant peut faire valoir des prétentions propres à condition de ne pas présenter des questions différentes de celles soumises au juge par les parties.

Un conseil régional de l'ordre des pharmaciens peut, dans le cadre de son intervention dans un litige portant sur une autorisation de création d'une officine de pharmacie, faire valoir des prétentions propres à condition de ne pas présenter des questions différentes de celles soumises au juge par les parties. »

9 - L’intervenant volontaire doit justifier d’un intérêt à intervenir « suffisant eu égard à la nature et à l’objet du litige ».

Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 29/09/2010, 319481

« Considérant que la décision à rendre dans le présent pourvoi, dirigé contre un arrêt ayant statué sur un litige de plein contentieux ayant opposé, devant les juges du fond, la SOCIETE BABEL à la commune d'Orange, n'est pas susceptible de préjudicier au conseil régional de l'ordre des architectes d'Ile-de-France, qui ne peut se prévaloir d'aucun droit propre à cet égard ; que, par suite, son intervention au soutien du pourvoi de la SOCIETE BABEL n'est pas recevable ; »

Conseil d'État, Section du Contentieux, 25/07/2013, 350661, Publié au recueil Lebon


« Est recevable à former une intervention, devant le juge du fond comme devant le juge de cassation, toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige. Une telle intervention, qui présente un caractère accessoire, n'a toutefois pas pour effet de donner à son auteur la qualité de partie à l'instance et ne saurait, de ce fait, lui conférer un droit d'accès aux pièces de la procédure. En outre, en vertu d'une règle générale de procédure dont s'inspire l'article R. 632-1 du code de justice administrative, le jugement de l'affaire principale ne peut être retardé par une intervention. En l'espèce, dans un litige relatif à la reconnaissance du statut de réfugié à un demandeur d'asile, la Cimade et l'association Les amis du bus des femmes justifient, par leur objet statutaire et leur action, d'un intérêt de nature à les rendre recevables à intervenir devant le juge de l'asile. Interventions admises.

10 - L’intervenant volontaire peut soulever tout moyen propre avant l’expiration du délai de recours contentieux et après l’expiration du délai de recours contentieux seulement des moyens relevant de la même cause juridique que ceux soulevés par la partie au profit de laquelle se fait l’intervention.

Conseil d'Etat, Assemblée, du 19 décembre 1986, 67022, publié au recueil Lebon

« Le moyen tiré par le syndicat intervenant de ce que le décret attaqué aurait dû être pris après consultation du Conseil supérieur de la Fonction publique, fondé sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle repose la requête principale qui se borne à contester la légalité interne dudit décret, a le caractère d'une prétention distincte qui, présentée par la voie d'une intervention, ne saurait être accueillie. »

11 - L’intervenant volontaire ne conserve pas cette qualité en cause d’appel et ainsi  il devra réitérer son intervention volontaire devant la Cour administrative d’appel.

Conseil d'Etat, Section, du 16 décembre 1994, 105798, publié au recueil Lebon

12 - L’intervenant volontaire peut produire des observations, mais ne disposant pas de la qualité de partie à la différence de l’intervenant forcé, il ne dispose pas d’un droit d’accès aux pièces de la procédure et ne peut être condamné au frais irrépétible de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Conseil d'État, Section du Contentieux, 25/07/2013, 350661, Publié au recueil Lebon

Conseil d'Etat, 6 / 2 SSR, du 19 janvier 1994, 143421, mentionné aux tables du recueil Lebon

« L'auteur d'une intervention n'étant pas partie à l'instance, les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la partie perdante soit condamnée à payer la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.


SOURCE : l’excellent ouvrage ISBN 978-2-39013-080-2 « Contentieux administratif »  par Monsieur le Professeur Olivier LE BOT – 3ème édition – Larcier – Collection Paradigme – année 2016 -2017 – pages 163 à 165. Prix : 29 euros. (incontournable pour étudiants ou professionnels du droit public).