NON : dans un arrêt en date du 16 février 2024, le Conseil d’Etat considère que la circonstance que la décision comporterait de tels éléments couverts par le secret médical n’est pas, par elle-même, susceptible de l’entacher d’illégalité.


En l’espèce,  Mme B..., agent de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) affectée à la direction régionale Auvergne-Rhône-Alpes, a déclaré les 15 novembre et 3 décembre 2018 avoir été victime de deux accidents de service, du fait de chocs psychologiques survenus les 24 octobre et 3 décembre 2018.

Par un arrêté du 20 juillet 2020, le chef du département des ressources humaines de l'INSEE a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des deux accidents ainsi déclarés.

Par un jugement du 20 octobre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté.

Mme B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle a formé contre ce jugement.

Il résulte des articles L. 211-2, L. 211-5, L. 211-6 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA) ainsi que de l’article 26 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires que le refus de reconnaître l’imputabilité au service d’un accident est au nombre des décisions qui doivent être motivées.

Si le respect des règles relatives au secret médical ne peut avoir pour effet d'exonérer l’administration de l'obligation de motiver sa décision, dans des conditions de nature à permettre au juge de l’excès de pouvoir d’exercer son contrôle, elle ne peut divulguer des éléments couverts par le secret médical.

Toutefois, la circonstance que la décision comporterait de tels éléments n’est pas, par elle-même, susceptible de l’entacher d’illégalité.

SOURCE : Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 16/02/2024, 467533

JURISPRUDENCE :

Le secret médical couvre tous les éléments relatifs à l’état de santé du patient, même s’ils ne relèvent pas de l’état de santé à proprement parler.

Ainsi :

« Viole le secret médical protégé par l'article R. 4127-4 du code de la santé publique (CSP) le médecin qui délivre à un tiers un certificat dans lequel il fait état d'éléments relatifs à l'état de santé d'un patient, même si ce document ne comporte aucune indication relevant du diagnostic médical. »

Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 15/12/2010, 330314

A propos de l'identité du patient et de la publication de sa photographie :

« L'autorisation donnée par un médecin, même avec le consentement de l'intéressée, de diffuser dans un organe de presse, dans le cadre d'une enquête sur l'hypnose, la photographie d'une patiente prise dans le cabinet du praticien constitue en l'espèce une violation du secret médical. »

Conseil d'Etat, 4 / 1 SSR, du 28 mai 1999, 189057, publié au recueil Lebon

Tant que le patient n’a pas levé le secret médical, celui-ci est opposable à toute autorité administrative, même lorsque celle-ci est elle-même astreinte au secret professionnel :

« Il résulte des dispositions de l'article 378 du code pénal selon lesquelles les secrets que les médecins ne peuvent révéler sont ceux qu'en raison de leur état de leur profession ou des fonctions qu'ils exercent, on leur confie, que c'est du malade seul que dépend le sort des secrets qu'il a confiés a un médecin ou que celui-ci a pu déduire de son examen et, par suite, le sort des fiches médicales qui ont pu les mentionner. Lorsque le malade s'adresse à un organisme qui pratique la médecine collective c'est nécessairement à l'ensemble du personnel médical de cet organisme que, sauf prescription particulière de la part de ce malade, le secret est confié. Des lors, un tel organisme ne peut, sans le consentement du malade intéressé, se dessaisir au profit d'un médecin qui aurait cesse d'exercer ses fonctions en son sein, des fiches médicales établies par les médecins qui lui sont attaches. Des lors, en subordonnant a l'accord du malade intéressé la transmission a un ancien médecin d'un centre médical mutualiste des fiches médicales a l’établissement desquelles ce médecin avait contribué, le requérant , loin de méconnaitre le secret médical dont son confrère était dépositaire, a pris la seule décision compatible avec le secret médical dont il était lui-même dépositaire. Illégalité de la sanction disciplinaire qui lui a été infligée pour cette raison. »

Conseil d'Etat, Section, du 11 février 1972, 76799, publié au recueil Lebon