OUI : dans un arrêt en date du 21 juin 2021, le Conseil d’Etat considère que lorsque la demande indemnitaire, qui aurait dû être formée préalablement au dépôt du recours de plein contentieux, a été établie postérieurement à celui-ci, le montant de la demande indemnitaire de régularisation (voir conditions dans CE, Section, 27 mars 2019, Consorts,, n° 426472, p. 95 ) est limité au montant de la demande contentieuse.


Lorsque le juge de première instance est saisi de conclusions indemnitaires à hauteur d'un certain montant pour divers chefs de préjudice, sans qu'il soit établi qu'une demande indemnitaire aurait été préalablement soumise à l'administration, et qu'une réclamation est par la suite adressée à celle-ci, au cours de la première instance, en vue de la régularisation de la demande contentieuse, dans laquelle ne sont invoqués que certains de ces chefs de préjudice, le silence gardé par l'administration sur cette demande a pour effet de faire naître une décision implicite qui lie le contentieux indemnitaire à l'égard du demandeur pour l'ensemble des dommages causés par le fait générateur invoqué dans cette réclamation, dans la limite du montant total figurant dans les conclusions de la demande contentieuse.

En l’espèce, erreur entachant dans un arrêt le calcul de l'assiette d'un préjudice, causée par la prise en compte, en tant que base annuelle, d'un montant calculé sur une base seulement mensuelle.

Erreur ayant affecté le calcul du montant total des préjudices admis par la cour et, corrélativement, l'élément de son dispositif déterminant le montant total de la condamnation.

Cette erreur matérielle, dépourvue de toute incidence sur le raisonnement adopté pour déterminer le montant du préjudice, peut être rectifiée dans tous ses effets, dans les motifs et le dispositif, par le président de la cour statuant sur le fondement de l'article R. 741-11 du code de justice administrative (CJA).

SOURCE : Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 21/06/2021, 437744


JURISPRUDENCE :

CE, Section, 27 mars 2019, Consorts,, n° 426472, p. 95 :

« Il résulte de l'article R.421-1 du code de justice administrative (CJA), dans sa rédaction résultant du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 (dit JADE), qu'en l'absence d'une décision de l'administration rejetant une demande formée devant elle par le requérant ou pour son compte, une requête tendant au versement d'une somme d'argent est irrecevable et peut être rejetée pour ce motif même si, dans son mémoire en défense, l'administration n'a pas soutenu que cette requête était irrecevable, mais seulement que les conclusions du requérant n'étaient pas fondées. En revanche, les termes du second alinéa de l'article R.421-1 du CJA n'impliquent pas que la condition de recevabilité de la requête tenant à l'existence d'une décision de l'administration s'apprécie à la date de son introduction. Cette condition doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l'administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle. Par suite, l'intervention d'une telle décision en cours d'instance régularise la requête, sans qu'il soit nécessaire que le requérant confirme ses conclusions et alors même que l'administration aurait auparavant opposé une fin de non-recevoir fondée sur l'absence de décision. »

En précisant, CE, 6 juin 2012, M. et Mme,, n° 329123, T. pp. 892-895-1022-1027 :

« Eu égard aux effets qu'ils sont susceptibles d'avoir pour leurs destinataires et pour les tiers intéressés, les certificats d'urbanisme délivrés sur le fondement des dispositions de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction issue de la loi dite SRU n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, doivent être regardés, que la demande à laquelle ils répondent ait ou non précisé une opération particulière, comme des décisions administratives susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

Le fait, dans une réclamation préalable adressée à l'administration, de demander l'indemnisation du préjudice résultant d'une faute tenant à un retard, suffit à lier le contentieux, quand bien même n'est pas mentionnée dans la réclamation préalable l'existence d'un préjudice moral et de jouissance, évalué ensuite devant le tribunal administratif. »

CE, avis, 19 février 2021, Mme,, n° 439366, à mentionner aux Tables :

« La décision par laquelle l'administration rejette une réclamation tendant à la réparation des conséquences dommageables d'un fait qui lui est imputé lie le contentieux indemnitaire à l'égard du demandeur pour l'ensemble des dommages causés par ce fait générateur. Il en va ainsi quels que soient les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages invoqués par la victime et que sa réclamation ait ou non spécifié les chefs de préjudice en question.,,,2) a) La victime est recevable à demander au juge administratif, dans les deux mois suivant la notification de la décision ayant rejeté sa réclamation, la condamnation de l'administration à l'indemniser de tout dommage ayant résulté de ce fait générateur, y compris en invoquant des chefs de préjudice qui n'étaient pas mentionnés dans sa réclamation. Si, une fois expiré ce délai de deux mois, la victime saisit le juge d'une demande indemnitaire portant sur la réparation de dommages causés par le même fait générateur, cette demande est tardive et, par suite, irrecevable. Il en va ainsi alors même que ce recours indemnitaire indiquerait pour la première fois les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages, ou invoquerait d'autres chefs de préjudice, ou aurait été précédé d'une nouvelle décision administrative de rejet à la suite d'une nouvelle réclamation portant sur les conséquences de ce même fait générateur. Il n'est fait exception à ces règles que dans le cas où la victime demande réparation de dommages qui, tout en étant causés par le même fait générateur, sont nés, ou se sont aggravés, ou ont été révélés dans toute leur ampleur postérieurement à la décision administrative ayant rejeté sa réclamation. Dans ce cas, qu'il s'agisse de dommages relevant de chefs de préjudice figurant déjà dans cette réclamation ou de dommages relevant de chefs de préjudice nouveaux, la victime peut saisir l'administration d'une nouvelle réclamation portant sur ces nouveaux éléments et, en cas de refus, introduire un recours indemnitaire dans les deux mois suivant la notification de ce refus. Dans ce même cas, la victime peut également, si le juge administratif est déjà saisi par elle du litige indemnitaire né du refus opposé à sa réclamation, ne pas saisir l'administration d'une nouvelle réclamation et invoquer directement l'existence de ces nouveaux éléments devant le juge administratif saisi du litige en premier ressort afin que, sous réserve le cas échéant des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle, il y statue par la même décision. La victime peut faire de même devant le juge d'appel, dans la limite toutefois du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant de l'indemnité demandée au titre des dommages qui sont nés, ou se sont aggravés, ou ont été révélés dans toute leur ampleur postérieurement au jugement de première instance. »