EN BREF : lorsqu’elle ne comporte pas l’indication du montant de la créance ou qu’elle émane d’un organisme employeur qui n’est pas doté d’un comptable public (SA La Poste par exemple). Des conclusions tendant à l’annulation de cette décision et du rejet du recours gracieux formé contre celle-ci doivent être regardées comme présentées en excès de pouvoir.


Dans un avis en date du 25 mai 2023, le Conseil d’Etat a précisé que si le recours dirigé contre un titre de perception relève par nature du plein contentieux, la lettre informant un agent public de ce que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur son traitement ne peut à cet égard être assimilée à une telle décision lorsqu’elle ne comporte pas l’indication du montant de la créance ou qu’elle émane d’un organisme employeur qui n’est pas doté d’un comptable public.

Des conclusions tendant à l’annulation de cette décision et du rejet du recours gracieux formé contre celle-ci doivent être regardées comme présentées en excès de pouvoir.

La circonstance que ce recours en annulation soit assorti de conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à l’administration de rembourser la somme prélevée, qui relèvent du plein contentieux, n’a pas pour effet de donner à l’ensemble des conclusions le caractère d’une demande de plein contentieux.

Dans l’hypothèse où le juge a méconnu tout ou partie de son office en raison d’une erreur quant à la nature du recours concernant la lettre informant un agent public de ce que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur son traitement, le moyen tiré de la méconnaissance de son office est d’ordre public.

SOURCE : Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 25/05/2023, 471035, Publié au recueil Lebon

JURISPRUDENCE :

Lorsque le recours est dirigé contre un état exécutoire au sens du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962, CE, Section, 27 avril 1988, Mbakam, n° 74319, p. 172 :

« Un état exécutoire, émis à l'encontre d'un étudiant par le C.R.O.U.S. de Versailles pour une somme correspondant à des loyers prétendument impayés, ne peut pas faire l'objet d'une contestation par la voie de recours pour excès de pouvoir. Un recours dirigé contre un tel état relève, par nature, du plein contentieux. »

Lorsqu’il est dirigé contre un titre de perception au sens du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, CE, 25 juin 2018, M. Gallet, n° 419227, p. 270 concernant un militaire :

« Il résulte des articles R. 4125-1 du code de la défense et des articles 117 et 128 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique que la lettre par laquelle l'administration informe un militaire de son intention de procéder à une retenue sur sa solde n'est pas au nombre des exceptions énumérées au III de l'article R. 4125-1 du code de la défense et doit donc faire l'objet d'un recours administratif préalable devant la commission des recours des militaires. Dans l'hypothèse où l'administration procéderait directement à une retenue sur la solde d'un militaire sans information préalable, la décision révélée par cette opération de dépense régie par l'article 128 du décret du 7 novembre 2012 devrait également être précédée d'un recours devant cette commission. En revanche, en cas de notification au militaire d'un titre de perception, l'opposition à ce titre, émis en application des dispositions de l'article 117 du décret du 7 novembre 2012, doit être précédée, conformément aux dispositions du 2° du III de l'article R. 4125-1 du code de la défense, d'une réclamation au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer, et non d'un recours devant la commission des recours des militaires. »

S’agissant en cassation du caractère d’ordre public de l’erreur tenant, pour les juges du fond, à s’être cru saisi d’un recours de plein contentieux alors qu’ils étaient saisis d’un recours pour excès de pouvoir, CE, 27 avril 2007, Lipinski, n° 274992, T. pp. 706-1034-1046 :

« Le tribunal estimant à tort qu'il est saisi d'un recours de plein contentieux alors que le requérant a formé devant lui un recours pour excès de pouvoir méconnaît le champ de son office. L'erreur ainsi commise par le tribunal sur l'étendue de ses pouvoirs doit être relevée d'office par le jugement de cassation. »