Le présent article intéressera tout particulièrement les copropriétaires ayant contesté des procès-verbaux d’assemblées générales convoquées entre le 2 juin 2021 et le 24 janvier 2022.
Le temps judiciaire est un temps long. Les délais judiciaires sont de plus en plus insoutenables et ce n’est donc qu’aujourd’hui (avril 2023) que les praticiens commencent à recevoir des décisions appliquant le droit adopté lors de la crise sanitaire.
Pour rappel : à un moment où il n’était plus même toléré de sortir de chez soi, le Gouvernement a adopté des textes permettant aux syndics d’organiser les assemblées générales autrement qu’en présentiel.
Ainsi, l’article 22-2 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 disposait que :
« Par dérogation aux dispositions de l'article 17 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée, lorsque le recours à la visioconférence ou à tout autre moyen de communication électronique n'est pas possible, le syndic peut prévoir que les décisions du syndicat des copropriétaires sont prises au seul moyen du vote par correspondance ».
Pour le dire autrement : on ne pouvait recourir au vote par correspondance (absence de débats) que lorsqu’il était absolument impossible de procéder autrement (visioconférence par exemple).
Ce texte était cohérent avec l’esprit de la loi du 10 juillet 1965 sur le régime de la copropriété des immeubles bâtis puisqu’il veillait à ce que les débats demeurent le principe (l’absence de débats demeurant l’exception).
La doctrine avait immédiatement mis en garde contre le risque de dérive (organisation systématique d’assemblées générales par correspondance) :
« Le recours au vote par correspondance n’est donc pas automatique et ne se fait que lorsque la visioconférence ne peut être utilisée. Or nombreux sont les professionnels qui ont oublié cet aspect subsidiaire du vote par correspondance pour l’imposer d’office, sans s’interroger sur la faisabilité ou non d’une participation à distance, davantage propice aux débats. Sur ce point, on pourrait s’interroger sur la validité d’une assemblée générale se tenant exclusivement par correspondance dès lors que le syndic n’apporte pas la preuve que tout autre moyen d’organisation à distance est impossible ».
« Le Syndic, le Conseil Syndical et le vote par correspondance » de David RODRIGUES, Actualité Juridique du Droit Immobilier, mai 2021
Maître Antoine CHRISTIN vient d’obtenir du Tribunal Judiciaire de PARIS une décision en ce sens.
Dans ce dossier, un Syndic avait organisé une assemblée générale exceptionnelle par correspondance sans même démontrer ni même alléguer :
- avoir sollicité ou obtenu un devis lié au coût excessif d’une assemblée générale tenue par visioconférence ;
- avoir consulté le conseil syndical à ce sujet ;
- être en présence d’une copropriété trop imposante avec une impossibilité technique de réunir tous les copropriétaires ;
- être en présence d’une copropriété avec une majorité de copropriétaires technophobes ou atteints d’illectronisme (l’illétrisme numérique) au point de ne pouvoir assister à une simple visioconférence.
Le 28 mars 2023, le Tribunal Judiciaire de PARIS a donc annulé en toutes ses dispositions l’assemblée générale querellée.
Pour se déterminer comme il l’a fait, il a notamment retenu (ce qui mérite citation) :
« Or, il est exact que le syndic n’a pas justifié en quoi le recours à la visioconférence ou à tout autre moyen de communication électronique n’était pas possible.
Il n’est pas justifié des difficultés techniques ou financières ayant à l’époque empêché le recours à la visioconférence (aucun devis excessif de prestataire en visioconférence produit, aucun avis réservé du conseil syndical versé aux débats, aucun justificatif de l’instabilité du réseau internet évoquée, etc.)
[…] Il en ressort que le syndic a imposé le vote par correspondance comme seule modalité de participation à l’assemblée générale litigieuse en violation de l’article 22-2 précité.
La violation de l’article 22-2 précité emporte donc annulation de l’assemblée générale litigieuse dans son intégralité ».
Tout copropriétaire ayant contesté un procès-verbal d’assemblée générale convoquée entre le 2 juin 2021 et le 24 janvier 2022 est donc invité à soulever ce moyen de droit.
Le problème est simple : avec une convocation au plus tard le 24 janvier 2022 (et donc une assemblée générale qui s’est tenue au plus tard dans le courant du mois de février 2022), il faut avoir d’ores et déjà contesté l’assemblée générale pour pouvoir utilement soulever ce moyen de droit.
Maître Antoine CHRISTIN se tient à votre disposition pour contrôler la possibilité de le faire.
Pas de contribution, soyez le premier