IL y a quelques mois, une première affaire de défectuosité des prothèses de hanche métalliques ( DePuy ASR) avait très rapidement défrayé la chronique

Aujourd'hui, l'ANSM dévoile un nouveau scandale mettant en péril la santé publique en général, et la santé particulière des porteurs en particulier, en ce qui concerne des implants de hanche de la marque CERAVER, qui seraient revêtus d'un revêtement antibactérien en dehors de toute homologation sanitaire.

Elle a mis en évidence des irrégularités qualifiées d'importantes en ce qui concerne la procédure de mise mise sur le marché et l'utilisation de certaines prothèses de hanche de la société CERAVER (Laboratoires Osteal Medical) pour les références suivantes :

certains lots de cotyle CERAFIT R sans ciment certains lots de cotyle CERAFIT double mobilité à cimenter, certains lots de tiges CERAFIT RMIS R et CERAFIT RMIS Latéralisées R certains lots de Tiges CERAFIT RMIS ACTISURF

L'ANSM informe que des "tiges expérimentales" ont été implantées sur des patients en dehors de tout essai clinique autorisé, à l'hôpital Ambroise Paré (AP-HP - Paris).

L'ANSM indique qu'elle n'a aucun élément faisant suspecter un risque sanitaire. Cependant, dans la mesure où ces infractions ont été matérialisées, l'ANSM a enclenché une procédure de police sanitaire prévoyant notamment la suspension de la mise sur le marché et de l'utilisation des dispositifs médicaux concernés.

650 patients sont concernés en France à ce jour.

L'autorisation de mise sur le marché est en cours de suspension.

Le fabriquant a procédé à des modifications de conception non-approuvées par un organisme habilité, et mis sur le marché et distribués sans certificat de marquage CE et sous des étiquetages divers rendant impossible la traçabilité.

Les griefs sont exposés ci-après :

- Les étiquetages des cotyles CERAFIT R sans ciment ne permettent pas de distinguer ceux de conception HIGRIP non couverts par un certificat de marquage CE de ceux couverts par un certificat de marquage CE. Il faut donc considérer l'ensemble des lots comme étant potentiellement frauduleux.

- Le cotyle CERAFIT double mobilité à cimenter a été mis sur le marché après le 1er septembre 2009. Il a été implanté jusqu'en septembre 2012 sans être couvert par un certificat de marquage CE valide compte tenu du reclassement en 2009 de ce dispositif en classe III.

- Les tiges CERAFIT RMIS R et CERAFIT RMIS Latéralisées R ont été mises sur le marché avant le 17 mars 2013 sans disposer d'un certificat de marquage CE valide. Le marquage CE a été obtenu le 17 mars 2013 même s'il demeure impossible à ce stade de démontrer la conformité des fabrications antérieures à ce certificat ; Les tiges concernées par le constat auraient toutes été posées avant janvier 2012 sans qu'il soit possible d'en établir la durée d'implantation.

- Les Tiges CERAFIT RMIS ACTISURF (tiges revêtues de polystyrène sulfonate de sodium) ont été mises sur le marché sans disposer d'un certificat de marquage CE valide et sont porteuses de l'étiquetage d'une autre référence de produit CERAVER ; elles étaient destinées à un essai clinique. La demande d'autorisation de cet essai a été présentée à l'ANSM postérieurement à l'implantation et l'autorisation non octroyée par deux fois, faute notamment de données précliniques suffisantes. Quatre tiges sont concernées par ce constat. Elles ont été livrées et implantées en juin 2011.

Un constat de violations inadmissibles des règles de sécurité contre l'hôpital Ambroise Paré!

L'inspection faite à l'hôpital Ambroise Paré a mis en évidence que la mise à disposition, la traçabilité et l'utilisation des tiges CERAFIT RMIS R n'ont pas été assurées dans le respect des procédures de l'hôpital et des droits des patients et ne garantissent donc pas leur sécurité.

En particulier, quatre tiges CERAFIT RMIS ACTISURF ont été implantées en juin 2011 alors que ces produits ne disposaient pas d'un marquage CE réglementaire et n'auraient dû être posées que dans le cadre d'un essai clinique autorisé.

Actions de l'ANSM

Faute d'incident de matériovigilance signalé à l'ANSM, l'Autorité ne dispose d'aucun élément faisant suspecter un risque sanitaire propre à ces dispositifs. Néanmoins, l'ANSM a demandé à la société CERAVER de mettre en place un certain nombre de mesures correctives et de procéder aux études de biocompatibilité pour démontrer l'innocuité de ses implants. A défaut d'études, le fabricant devra justifier l'absence de leur réalisation et prouver que les implants mis sur le marché ne sont pas susceptibles de porter atteinte à la santé des patients.

L'ANSM a enclenché une procédure de police sanitaire qui prévoit :

la suspension de la mise sur le marché, de la mise en service, de l'exportation, de la distribution et de l'utilisation des dispositifs médicaux concernés, jusqu'à mise en conformité ; le retrait des dispositifs médicaux concernés de tout lieu où ils se trouvent.

En ce qui concerne spécifiquement les quatre patients porteurs des implants CERAFIT RMIS ACTISURF posés hors essai clinique autorisé et sans conformité réglementaire, il a été convenu que le chef du service de chirurgie orthopédique de l'hôpital Ambroise Paré prenne contact et convienne d'un rendez-vous avec eux.

Des informations ont été transmises aux Procureurs des tribunaux de grande instance de Senlis, Pontoise et Nanterre. L'ANSM a également informé l'Agence Régionale de Santé d'Ile de France.

Des Recommandations conjointes de l'ANSM et de la Société française de chirurgie orthopédique et traumatologique (SOFCOT) ont été publiées :

Par mesure de précaution, du fait de l'absence de données de conformité pour ces dispositifs médicaux, l'ANSM, en interface avec la Société Française de Chirurgie Orthopédique et Traumatique (SOFCOT), recommande aux chirurgiens orthopédiques ayant placé les dispositifs précités de revoir leurs patients, afin d'évaluer leur état clinique et radiologique et de leur proposer un suivi individualisé.

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En termes clairs, il n'est pas question d'alarmer les patients, mais de leur imposer un suivi médical plus important, pendant le temps de vie normal des implants.

Soit entre 10 et 20 ans de contrôle sanitaire au minimum!!!

Toutefois, les patients peuvent d'ors et déjà présenter des réclamations à raison de la prise de risque, de l'obligation de suivi sanitaire et du préjudice d'inquiétude.

En espérant qu'il ne s'agit que d'une irrégularité formelle, et qu'elle ne cache pas une nouvelle fraude ou des conséquences sanitaires plus redoutables.

Ariel DAHAN

Avocat