Par un arrêt rendu le 9 juin 2011, affaire 10-13570, publiée au Bulletin Civil 1, la Cour de Cassation a posé une nouvelle limite au droit moral de l'héritier d'un auteur.

Dans les faits, les enfants de la maîtresse d'un écrivain célèbre souhaitaient publier la correspondance échangée pendant 20 ans entre l'écrivain et leur mère et l'écrivain et leur grand-mère.

Ils se sont heurtés au refus formel de l'épouse de l'écrivain, laquelle avait été instituée légataire universelle de son mari prédécédé, et chargée en même temps que leur mère, de veiller à l'ensemble de son oeuvre.

Ils ont donc poursuivi l'épouse de l'écrivain, pour être autorisés à faire publier cette correspondance, considérant que le refus opposé par l'exécuteur testamentaire constituait un abus notoire dans l'exercice du droit moral dont elle était investie.

La Cour d'Appel de Paris, dans un arrêt rendu le 4 décembre 2009, a donné droit aux enfants de la maîtresse, jugeant que l'usage fait par l'épouse de l'écrivain de son droit de divulgation en refusant la publication des lettres échangées entre son mari et sa maîtresse était abusif, motif pris de ce que la personne investie du droit de divulgation post mortem ne dispose pas d'un droit absolu et doit exercer celui-ci au service des oeuvres et de leur promotion, conformément à la volonté de l'auteur. De sorte que si elle s'opposait à une telle divulgation, elle devait justifier de son refus en démontrant que l'auteur n'entendait pas divulguer l'oeuvre en cause et que sa divulgation n'apporterait aucun éclairage utile à la compréhension et à la valorisation des oeuvres déjà publiées ;

Sur pourvoi formé par l'épouse de l'écrivain, la Cour de Cassation a sanctionné la Cour d'Appel, estimant que celle-ci avait inversé la charge de la preuve en imposant au titulaire du droit moral d'apporter la preuve la justification de son refus de divulgation de l'oeuvre.

C'était donc aux tiers non-détenteurs du droit moral qui revendiquent cette publication-divulgation d'apporter au Juge la justification de la conformité à la volonté de l'auteur, ainsi qu'à l'éclairage utile à la compréhension et à la valorisation de l'oeuvre.

La Cour de Cassation ayant renvoyé les parties devant la Cour d'Appel de Lyon, la réponse finale sera donc donnée d'ici une dizaine de mois, après que la Cour d'Appel de Lyon ait été amenée à statuer.

A suivre donc...

Ariel DAHAN

Avocat