L’abandon de poste ne justifie pas systématiquement un licenciement pour faute grave : voici le principe que rappelle la Cour de Cassation dans sa décision du 26 septembre 2018, n° 17- 17563 FD.

 

Dans cette décision, la Cour de Cassation confirme la décision de la Cour d’Appel de Versailles qui avait jugé que l’abandon de poste de plus d’un mois et demi d’un salarié ne justifiait pas un licenciement pour faute grave et devait en conséquence être requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

 

Nous rappellerons l’intérêt de la distinction (I) puis nous analyserons les motifs qui ont amenés la Cour d’appel puis la Cour de Cassation à requalifier le licenciement en licenciement pour cause réelle et sérieuse (II). 

 

I. L’intérêt de la requalification du licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse

 

On rappellera que le licenciement pour faute grave prive le salarié :

 

Cependant, le licenciement pour faute grave ne prive pas le salarié : 

  • du paiement des congés payés restant dus par l’employeur ;
  • du versement de son allocation de retour à l’emploi par Pôle Emploi ;

 

Le salarié licencié pour cause réelle et sérieuse bénéficie quant à lui :

  • du paiement de sa période de préavis ;
  • du paiement de son indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ; 
  • du paiement de ses congés payés restant dus par l’employeur ;
  • du versement de son allocation de retour à l’emploi par Pôle Emploi ;

 

Dans le cas jugé par la Cour d’Appel de Versailles et confirmé en cassation, l’employeur avait donc été condamné à verser à son salarié qui avait une ancienneté de plus de vingt ans :

  • une indemnité compensatrice de préavis de 2 322, 82 € et 232,00 € de congés payés ; 
  • une indemnité légale de licenciement de 11 440,00 € ;

 

II. Les motifs retenus par la Cour de Cassation pour confirmer la requalification du licenciement 

 

L’employeur peu heureux de la décision de la Cour d’Appel de Versailles qui requalifiait son licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse s’est pourvu en cassation.

La Cour de Cassation confirme l’arrêt de la Cour d’appel.

Dans le cas d’espèce, les conditions de l’abandon de poste du salarié étaient particulièrement établies :

  • le salarié avait été déclaré apte à son poste de travail après une visite médicale ; 
  • le salarié était néanmoins absent depuis plus de 6 semaines ;
  • il n’avait pas justifié de son absence malgré les deux mises en demeure de son employeur ;
  • il aurait également indiqué à son employeur oralement qu’il n’entendait pas reprendre son poste de travail ;

 

Malgré cela, la Cour de Cassation juge que c’est à bon droit que la Cour d’Appel a requalifié le licenciement en licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse au regard :

  • de l’ancienneté du salarié, en l’occurrence de plus de 20 ans ; 
  • de ses difficultés personnelles et de santé ; 
  • de l’absence de perturbation du service du fait de son absence ;

 

On rappellera que la faute grave est la faute qui rend impossible le maintien du salarié au sein de l’entreprise, tel n'était pas le cas en l’espèce d’après la Cour de Cassation.

 

SOURCE : Cour de Cassation, 26 septembre 2018, n°17-17563