L’article 222-23 du Code pénal dispose :  « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol. »

L’article 222-22-1 du Code pénal ajoute :

« La contrainte prévue par le premier alinéa de l’article 222-22 peut être physique ou morale.

Lorsque les faits sont commis sur la personne d’un mineur, la contrainte morale mentionnée au premier alinéa du présent article ou la surprise mentionnée au premier alinéa de l’article 222-22 peuvent résulter de la différence d’âge existant entre la victime et l’auteur des faits et de l’autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur la victime, cette autorité de fait pouvant être caractérisée par une différence d’âge significative entre la victime mineure et l’auteur majeur.

Lorsque les faits sont commis sur la personne d’un mineur de quinze ans, la contrainte morale ou la surprise sont caractérisées par l’abus de la vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes. »

I. Élément matériel.

L’élément matériel du viol est constitué d’un acte de pénétration sexuelle et de l’emploi de violence, contrainte, menace ou surprise.

A. L’acte de pénétration sexuelle.

Concernant la pénétration sexuelle, elle peut être commise sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur. Cette définition regroupe les hypothèses suivantes :

  • une pénétration par le sexe, dans le sexe ;
  • une pénétration par le sexe, dans la bouche (fellation) ou l’anus (sodomie) ;
  • l’introduction de corps étrangers dans le sexe ou dans l’anus. 

Avant la loi du 3 août 2018 et l’ajout de la formule ‘sur la personne de l’auteur’, lorsque la victime effectuait l’acte de pénétration sur la personne de l’auteur, seule la qualification d’agression sexuelle était retenue. Désormais, la qualification de viol peut s’appliquer à cette hypothèse.

B. L’emploi de violence, contrainte, menace ou surprise.

Concernant la contrainte, l’article 222-22-1 du Code pénal prévoit tout d’abord que la contrainte peut être physique ou morale. Cette contrainte morale ou la surprise peuvent résulter de la différence d’âge entre la victime mineure et l’auteur majeure ainsi que de l’autorité exercée par l’auteur majeur sur la victime mineure.

La loi du 3 août 2018 a modifié l’article 222-22-1 du Code pénal, effectuant une distinction entre la victime mineure et la victime mineure de 15 ans.

Concernant la victime mineure, la contrainte et la surprise peuvent résulter de la différence d’âge ainsi que de l’autorité exercée par l’auteur. Il s’agit alors de conditions cumulatives.

Toutefois, une différence d’âge significative est constitutive de l’autorité exercée par l’auteur. Les conditions ne sont alors plus cumulatives. L’autorité découle de la différence d’âge significative.

Concernant la victime mineure de 15 ans, c’est-à-dire âgée de moins de 15 ans, la contrainte ou la surprise sont caractérisées par l’abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes.

Selon la jurisprudence, « justifie sa décision la cour d’appel qui, pour déclarer le prévenu coupable d’atteintes sexuelles avec violence, contrainte, menace ou surprise sur trois mineurs, énonce, notamment, que l’état de contrainte ou de surprise résulte du très jeune âge des enfants qui les rendaient incapables de réaliser la nature et la gravité des actes qui leur étaient imposés » (Crim., 7 déc. 2005).

II. Élément moral.

L’auteur doit avoir la volonté d’effectuer des actes de pénétration sexuelle sur la victime, en ayant conscience de l’absence de consentement de cette dernière.

III. Répression.

A. Prescription.

Les délais de prescription ont évolué afin de permettre de poursuivre les auteurs de plus en plus longtemps après la commission des faits.

• Entre le 8 avril 1958 et le 14 juillet 1989, le délai de prescription de l’action publique était de 10 ans à compter des faits.

Exemple 1 : ainsi, si un mineur âgé de 13 ans était victime de viol en 1975, il disposait d’un délai de 10 ans pour déposer plainte, jusqu’en 1985.

Exemple 2 : si un mineur âgé de 13 ans était victime de viol par personne ayant autorité en septembre 1979, il disposait d’un délai de 10 ans pour dépose plainte, jusqu’en septembre 1989.

Exemple 3 : un mineur de 13 ans est victime de viol par une personne n’ayant pas autorité en septembre 1979. Il dispose d’un délai de 10 ans pour déposer plainte, jusqu’en septembre 1989.

• Le 14 juillet 1989 est entré en vigueur une nouvelle loi, qui prévoyait qu’en cas de crime sur un mineur commis par un ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou par une personne ayant autorité sur le mineur, le délai de prescription de 10 ans est rouvert ou court à nouveau pour la même durée à compter de la majorité.

Les lois établissant un délai de prescription ne sont rétroactives que dès lors que la prescription sous l’empire du précédent régime n’était pas acquise.

Dans l’exemple 1 ci-dessus, la prescription est acquise en 1985, soit 4 ans avant la nouvelle loi. La prescription était donc définitivement acquise au moment de l’entrée en vigueur de la loi de 1989.

Dans l’exemple 2, sous l’empire de l’ancien régime, la prescription était acquise en septembre 1989.

La nouvelle loi étant entrée en vigueur en juillet 1989, la prescription de l’infraction n’était pas encore acquise à cette date. Le mineur ayant été victime de viol par une personne ayant autorité sur lui, le nouveau délai s’applique. Le mineur peut porter plainte jusqu’à 10 ans après sa majorité, soit ses 28 ans. Le mineur étant âgé de 13 ans en 1979, il est né en 1966. Il peut donc porter plainte jusqu’en 1994 (1979 - 13 = 1966 ; 1966 + 28 =1 994).

Dans l’exemple 3, sous l’empire de l’ancien régime, la prescription était acquise en septembre 1989.

La nouvelle loi entre en vigueur en juillet 1989. Toutefois, cette nouvelle loi ne change pas le délai de prescription pour les viols commis sur des mineurs par des personnes n’ayant pas autorité ou n’étant pas des ascendants. La date de prescription de l’action publique ne change donc pas. L’action sera prescrite en septembre 1989.

• La loi du 16 décembre 1992, entrée en vigueur le 1er mars 1994 ne vient pas modifier les délais de prescription en cas de viol sur mineur.

Le nouveau Code pénal entre en vigueur également le 1er mars 1994. L’article 112-2 de ce code dispose que les lois de prescription sont rétroactives lorsque le délai de prescription n’était pas acquis. Elles ne sont toutefois pas rétroactives lors qu’elles ont pour conséquences d’aggraver la situation de l’intéressé.

Exemple 4 : Si un mineur né en 1975 est victime de viol en 1990, alors qu’il est âgé de 15 ans, par une personne n’ayant pas autorité, il dispose d’un délai de 10 ans, jusqu’à ses 25 ans, soit jusqu’en 2000 pour déposer plainte.

Exemple 5 : Si un mineur né en 1985, est victime de viol en octobre 1989, alors qu’il est âgé de 4 ans, par une personne ayant autorité, il dispose alors d’un délai de 10 ans à compter de sa majorité pour déposer plainte, soit jusqu’en 2013.

• La loi du 17 juin 1998, entrée en vigueur le lendemain, prévoit un délai de prescription de 10 ans à compter de la majorité des mineurs, que l’auteur soit ou non un ascendant ou ait autorité sur le mineur.

Toutefois, cette loi étant plus sévère envers les auteurs de viols sur mineur n’ayant pas autorité sur leur victime. En effet, ils peuvent désormais être poursuivis non plus pendant une durée de 10 ans suivant les faits mais jusqu’aux 28 ans de l’enfant. Cette loi n’est donc pas rétroactive.

Concernant l’exemple 2, du mineur né en 1966 et victime de viol à l’âge de 13 ans, la prescription a été acquise en 1994. L’action publique est donc prescrite.

Ainsi, dans l’exemple 4 du mineur né en 1975 et victime de viol en 1990, le délai de prescription ne sera pas modifié et ce mineur ne pourra déposer plainte que jusqu’en 2000.

Concernant l’exemple 5 du mineur né en 1985, victime à 4 ans de viol, il disposera toujours d’un délai de 10 ans à compter de sa majorité pour déposer plainte, jusqu’en 2013.

• La loi du 9 mars 2004 a allongé le délai de prescription de 10 ans, le portant à 20 ans. Cette loi a également modifié le régime de la rétroactivité des lois de prescription. Elles sont désormais rétroactives, même si elles ont pour conséquence d’aggraver la situation de l’auteur.

Dans l’exemple 4, l’action étant prescrite en 2000 sous l’empire de l’ancienne loi, la loi du 9 mars 2004 ne fait pas courir de nouveau délai.

Dans l’exemple 5, l’action n’étant pas prescrite au moment de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, le mineur né en 1985, victime de viol à 4 ans par une personne ayant autorité, dispose d’un délai de 20 ans à compter de sa majorité, soit jusqu’à ses 38 ans en 2023, pour déposer plainte.

Exemple 6 : un mineur né en 1995 est victime de viol à l’âge de 10 ans, en 2005. Il dispose donc d’un délai de 20 ans à compter de sa majorité, soit jusqu’à ses 38 ans en 2033, pour déposer plainte.

• La loi du 6 août 2018 a porté le délai de prescription de 20 ans à 30 ans à compter de la majorité du mineur victime de viol.

Dans l’exemple 5, du mineur né en 1985 et victime de viol à 4 ans en 1989, la prescription n’étant pas acquise sous l’empire de la loi précédente, la victime dispose d’un délai de 30 ans à compter de sa majorité, soit jusqu’à ses 48 ans, en 2033, pour déposer plainte.

Ainsi, dans l’exemple 6, la prescription n’était pas acquise le 6 août 2018. Le mineur dispose donc désormais d’un délai de 30 ans à compter de sa majorité, soit jusqu’à ses 48 ans en 2043, pour déposer plainte.

B. Peine. 

L’article 222-24 du Code pénal dispose :

« le viol est puni de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu’il est commis sur un mineur de 15 ans ».

L’article 222-24 prévoit la même peine lorsque le viol est commis par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime autorité de droit ou de fait.

C. Peine complémentaire en cas de viol incestueux.

L’article 222-31-1 du Code pénal dispose que « les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d’incestueux lorsqu’ils sont commis par :  1° un ascendant 2° un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu ou une nièce 3° le conjoint, le concubin, d’une des personnes mentionnées aux 1° et 2° ou le partenaire lié par un pacte civile de solidarité avec l’une des personnes mentionnées aux mêmes 1° et 2°, s’il a sur la victime une autorité de droit ou de fait. »

L’article 222-32-1 du Code pénal prévoit « lorsque le viol incestueux ou l’agression sexuelle incestueuse est commis contre un mineur par une personne titulaire sur celui-ci de l’autorité parentale, la juridiction de jugement doit se prononcer sur le retrait total ou partiel de cette autorité, en application des article 378 et 379-1 du Code civil.  Elle peut alors statuer sur le retrait de cette autorité en ce qu’elle concerne les frères et sœurs mineurs de la victime.  Si les poursuites ont lieu devant la cour d’assises, celle-ci statue sur cette question sans l’assistance des jurés. »