L’encadrement des loyers est une mesure ayant pour vocation de limiter la hausse excessive des loyers lors de la mise ou de la remise en location de logements vides ou meublés, dans les communes situées en zones d’urbanisation tendues.

L’Article 17 de la loi la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, définit ces zones d’urbanisation comme étant les zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social.

La loi de 1989 prévoit que dans ces zones, le représentant de l’Etat dans le département fixe chaque année, par arrêté, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logement et par secteur géographique.

Les 1151 communes concernées, et divisées en 28 agglomérations, sont listées en annexe du décret n°2013-392 du 10 mai 2013.

Des arrêtés préfectoraux ont été pris en application de l’encadrement des loyers dans les villes de Paris (le 1er août 2015) et de Lille (le 1er février 2017). Cependant, les deux arrêtés ont été annulés par les tribunaux administratifs de chacune de ces villes.

Par des décisions prises le 17 octobre 2017 à Lille, et le 28 novembre 2017 à Paris, les juges administratifs ont accueilli les demandes d’unions et d’associations de propriétaires et copropriétaires de logements dans les villes concernées qui contestaient l’application des arrêtés administratifs pris par le préfet du Nord le 16 décembre 2016, et le préfet de la région d’Ile-de-France le 25 juin 2015.

Ils arguaient de ce que le dispositif d’encadrement des loyers et les arrêtés préfectoraux pris pour la mise en œuvre devaient s’appliquer dans l’ensemble des zones d’agglomération lilloise et parisienne comportant respectivement 59 et 412 communes et, à défaut, ne pouvaient se limiter aux seules communes de Paris ou de Lille.

Les préfets de ces villes arguaient de leur côté que le niveau des loyers dans les métropoles de Lille et de Paris, et dans les autres communes de leurs zones respectives, était trop hétérogène, rendant l’application d’un plafonnement de loyer commun dans toute la zone moins pertinent.

Ces décisions ont eu pour effet immédiat de faire cesser les mesures d’encadrement des loyers, et ce dès le 18 octobre 2017 à Lille, et le 29 novembre 2017 à Paris. A défaut d’un arrêté fixant un loyer de référence, les propriétaires bailleurs dans les communes de Paris et de Lille ne sont plus contraints de fixer les loyers dans la limite du loyer de référence majoré de 20%, et minoré de 30%, en application de l’article 17 (I) de la loi du 6 juillet 1989.

Ils doivent cependant toujours se conformer aux dispositions de l’article 18 de la loi du 6 juillet 1989, qui prévoit la fixation par décret d’un montant maximum d’évolution des loyers dans certaines zones.

Ainsi, un propriétaire souhaitant mettre un logement en location pour la première fois, ou louer un logement vacant depuis plus de 18 mois, pourra fixer librement le montant du loyer.

S’agissant des baux renouvelés, qui faisaient l’objet d’une procédure spécifique lors de l’application des arrêtés contestés, les propriétaires sont tenus aux règles de réévaluation du loyer figurant à l’article 17-2 de la loi du 6 juillet 1989. Les loyers ne peuvent donc être réévalués que s’ils sont manifestement sous-évalués. Cette sous-évaluation est estimée en référence aux loyers habituellement pratiqués dans le voisinage pour des logements comparables.

Enfin, les baux en cours demeurent inchangés. Un propriétaire ne peut se fonder sur les décisions des tribunaux administratifs pour modifier le loyer en dehors du cadre de la loi du 6 juillet 1989 prévoyant les modalités d’évolution des loyers.

Sur appel du Ministre de la Cohésion des territoires, la cour administrative d’appel de Paris, dans sa décision du 26 juin 2018, a confirmé l’annulation de l’encadrement des loyers prononcée par le tribunal administratif de Paris. La cour a considéré que l’arrêté préfectoral est illégal dans son ensemble à défaut de fixer les loyers de référence pour toute la zone d’urbanisation visée par les textes.

Ces décisions sont à mettre en perspective avec le projet de loi évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, loi ELAN, également appelée loi « logement proposée par le gouvernement,  qui entre autres mesures réintroduit l’encadrement des loyers.

Ce projet a été adopté récemment modifié par la commission mixte paritaire le 19 septembre 2018. Il pourrait être définitivement adopté dans les semaines à venir.

Il s’agit d’un dispositif expérimental d’une durée de 5 ans dans les zones tendues visées par l’article 17 du 6 juillet 1989, laissé à l’appréciation des villes, communauté de communes ou d’agglomérations, établissements de coopération intercommunale ; les municipalités peuvent ainsi demander au représentant de l’Etat dans le département qu’un dispositif d’encadrement des loyers régi par le présent article soit mis en place.» (article 49 du projet).

Sur proposition de la commune transmise dans un délai de deux ans à compter de la publication de la loi, un décret détermine le périmètre du territoire de la collectivité demandeuse sur lequel s’applique le dispositif, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

  • Un écart important entre le niveau moyen de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social
  • Un niveau de loyer médian élevé
  • Un taux de logements commencés, rapporté aux logements existants sur les cinq dernières années, faible ;
  • Des perspectives limitées de production pluriannuelle de logements inscrites dans le programme local de l’habitat et de faibles perspectives d’évolution de celles-ci.»

A l’instar du dispositif annulé, le projet de loi prévoit que pour chaque territoire ainsi délimité, le représentant de l’État dans le département fixe, chaque année, par arrêté, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logements et par secteur géographique.

Si le projet de loi n’innove pas vraiment en matière d’encadrement des loyers, et reprend en substance les textes précédents en les aménageant pour permettre leur mise en œuvre, il introduit de nouvelles dispositions en matière de baux, de location saisonnière et de copropriété qui feront l’objet d’une présentation dans un prochain article de notre blog.