Le contrôle des structures des exploitations agricoles est une législation originale, propre à la France, qui a pour finalité de réguler, de façon administrative, l'accès au foncier, et ce indépendamment du titre juridique en vertu duquel l'exploitant va mettre en valeur les terres.

L’autorisation d’exploiter délivrée par le préfet ne confère aucun titre pour exploiter le bien, dès lors que le propriétaire ne sera pas tenu de mettre à disposition ce bien à la personne qui s’est vu délivrer cette autorisation.

A l’inverse, un propriétaire peut valablement céder la jouissance du bien agricole à un tiers, même si ce dernier (qui souhaite exploiter) n’est pas détenteur d’une autorisation d’exploiter. Mais celui-ci devra alors supporter les sanctions éventuelles du fait de l'infraction au contrôle des structures des exploitations agricoles (sanctions pécuniaires notamment).

Au titre de ces sanctions, dans le cas où l'exploitant n'est pas titulaire d'une autorisation d'exploiter (alors qu'il devrait l'être, par exemple parce que la surface de son exploitation a dépassé le seuil de contrôle sans qu'il ait sollicité cette autorisation), l'administration peut-elle lui refuser l'accès aux aides compensatoires européennes ?

Le Conseil d'Etat a répondu par la négative : arrêt LORIN du 21 juillet 2006.

Dans cette affaire, le préfet avait refusé à une indivision le bénéfice des paiements compensatoires, en considérant que celle-ci "était sans droit ni titre pour exploiter la parcelle de 21,86 hectares, dès lors qu'un congé délivré par le propriétaire avait été validé par le juge des baux ruraux".

La Cour Administrative d'Appel de NANCY a rejeté la demande de l'indivision tendant à l'annulation de la décision préfectorale.

Le Conseil d'Etat réforme cet arrêt en s'appuyant sur l'indépendance de la règlementation communautaire eu égard aux dispositions internes des Etats-membres, en l'espèce la France.

En effet, le régime de soutien direct aux exploitants agricoles ne prévoit nullement que l'octroi des aides serait subordonné à d'autres condtions que celles relatives à la mise en valeur effective des terres pour lesquelles l'aide est sollicitée.

En particulier, le bénéfice de ces aides ne peut être refusé lorsque l'exploitant est dépourvu d'un titre juridique lui accordant la jouissance des terres (droit de propriété, bail en cours de validité, prêt à usage, ...), dès lors que, si la règlementation europénne permettait à un Etat-membre de subordonner le versement des aides à la possession d'un tel titre, encore fallait-il que l'Etat-membre use de cette faculté par voie de disposition interne, ce que n'avait pas fait la France  à la date de la décision en litige.

La haute juridiction a ajouté que les dispositions de l'article L 331-9 du Code Rural (propres au contrôle des structures des exploitations agricoles) ne saurait constituer une telle disposition.

En effet, l'article L 331-9 qui prévoit que "Celui qui exploite un fonds en dépit d'un refus d'autorisation d'exploiter devenu définitif ne peut bénéficier d'aucune aide publique à caractère économique accordée en matière agricole" est étranger au droit de propriété ou d'usage du sol.

En conséquence, la situation d'un exploitant au regard du contrôle des structures des exploitations agricoles est indifférente au regard de l'octroi des aides directes communautaires.

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