En matière d’investissement immobilier défiscalisant, certaines opérations peuvent prendre un mauvais tour. Dès lors, le CGP se doit de prendre les devants et suivre une méthodologie stricte pour résoudre le problème au mieux des intérêts de son client.

Il arrive régulièrement que les CGP soient interpellés par leurs clients à propos d’un investissement immobilier qui « tourne mal », que le CGP soit intervenu ou non à l’opération qui pose problème. Les difficultés rencontrées sont de nature et de gravité variées : du retard de livraison à l’abandon de chanter, du retard de paiement des loyers à l’absence de rendement locatif. Accompagner utilement ses clients dans de telles situations peut se résumer en quatre items : agir vite, regrouper les plaignants, identifier la difficulté et définir les bonnes solutions.

Le temps de l’action

Réagir rapidement est impératif, car la situation financière de l’investisseur risque de se dégrader de mois en mois et il est peu de problèmes qui, en cette matière, se résolvent d’eux-mêmes. De plus, les délais pour agir sont parfois très courts, c’est le cas des certaines garanties, notamment la garantie de parfait achèvement (un an) et de la garantie de bon fonctionnement (deux ans). Enfin, il convient d’engager rapidement, lorsque c’est nécessaire, les procédures judiciaires adéquates. La justice est lente et, plus tôt on engage une action judiciaire, plus tôt elle trouvera une issue.

L’union fait la force

Regrouper les victimes d’une même situation va leur permettre d’unir leurs forces pour défendre leurs droits.

Comment retrouver les autres investisseurs floués ?

Lorsqu’un CGP a conseillé à plusieurs clients d’acquérir différents lots d’un immeuble qui, en définitive, n’est pas achevé par le promoteur, il dispose de toutes les informations nécessaires pour permettre à ses clients d’agir collectivement.

Le CGP peut également « remonter » vers la plate-forme de commercialisation, le cas échéant, pour identifier d’autres conseillers en gestion de patrimoine qui ont recommandé ce même programme à leurs clients.

La démarche consistant à rechercher les autres acquéreurs dans une même opération immobilière peut également être menée via le service de la publicité foncière.

Pourquoi les regrouper ?

Les investisseurs floués souffrent à la fois des conséquences financières des difficultés qu’ils rencontrent ; mais ils souffrent souvent aussi d’un sentiment d’avoir été « arnaqués », ils se sentent floués, se reprochent de ne pas avoir été assez prudents, d’avoir été naïfs, etc. Constater que d’autres investisseurs, raisonnables, avertis et intelligents, rencontrent les mêmes difficultés rassérène énormément. Les investisseurs vont échanger entre eux, se soutenir, chacun va apporter ses compétences, son engagement pour faire prospérer les droits de tous.

Le regroupement permet aussi la mutualisation des informations : les investisseurs les plus organisés auront gardé toute la documentation précontractuelle, tandis que les plus férus de technique auront pris des photographies du chantier, les « matheux » s’attelleront au calcul des préjudices, etc. L’apport de chacun pourra être mis en commun et servir la cause de tous.

Dans une affaire concernant une résidence services qui a donné lieu à trois arrêts de Cours d’appel, les acquéreurs qui ont agi séparément les uns des autres ont connu des fortunes judiciaires très diverses. Dans ce dossier, la société qui gérait initialement la résidence a été placée en liquidation judiciaire. La résidence a été « reprise » par un nouveau gestionnaire qui a imposé des baisses de loyers drastiques aux propriétaires.

Face à cette situation, plusieurs d’entre eux ont décidé d’agir en justice. Certains investisseurs ont obtenu des dommages-intérêts en indemnisation de la perte de rendement locatif lié au changement de gestionnaire de la résidence (Rennes, 18 mars 2016, et Rennes, 29 avril 2016). D’autres acquéreurs, qui demandaient exclusivement au juge l’annulation de la vente n’ont rien obtenu du tout (Rennes, 21 avril 2016).

Tandis que d’autres encore, qui disposaient de preuves établissant qu’au moment où ils ont acheté, la société qui leur a recommandé cette acquisition leur avait sciemment caché « la mauvaise santé financière » de la société à laquelle la gestion de la résidence avait été confiée, ont obtenu l’annulation de la vente, le remboursement du prix et des honoraires de la société qui les a accompagnés lors de cette opération (Lyon, 24 juin 2014, RG n° 10/16486).

Si tous les investisseurs avaient disposé des mêmes documents et agi ensemble, nul doute que tous auraient obtenu de bons résultats.

Enfin, le regroupement des plaignants va permettre la mutualisation des coûts. Sans qu’il soit nécessaire de constituer une association, par exemple, les investisseurs pourront répartir entre eux la charge financière des actions à mener : intervention d’un expert, d’un maître d’œuvre, d’un avocat, etc.

Le « diagnostic »

Le diagnostic de la situation suppose d’identifier le problème rencontré, le cadre juridique dans lequel l’investissement a été réalisé et l’objectif des investisseurs. C’est en combinant ces trois informations que l’on pourra déterminer la meilleure stratégie à mettre en œuvre pour trouver une issue conforme aux attentes et aux intérêts des clients.

Panorama des difficultés

Les « techniques » :

- l’immeuble est inachevé, le chantier abandonné, le promoteur est en liquidation judiciaire ;

- des désordres affectent la construction : fissures, infiltrations, etc. ;

- le bien livré n’est pas conforme à sa description, en termes de superficie par exemple.

Les « financières » :

- la valeur vénale du bien est, en réalité, inférieure, voire très inférieure, au prix d’achat ;

- la valeur locative a été surévaluée par rapport aux prix du marché ;

- le gestionnaire de la résidence (résidence étudiante, résidence de tourisme, résidences seniors) impose une baisse substantielle du montant du loyer ;

- l’appartement n’est pas loué ;

- les loyers ne sont pas réglés par le locataire, etc.

Panorama des situations juridiques

L’achat et l’exploitation de biens immobiliers peuvent se faire selon de nombreuses modalités juridiques, plus ou moins protectrices des intérêts des investisseurs.

Les modes d’acquisition

SI le bien est « à construire » ou « à rénover », l’acquisition prend généralement la forme d’une Vefa (vente en état futur d’achèvement) ou d’une VIR (vente d’immeuble à rénover). L’acquéreur disposera alors de garanties relatives aux travaux, grâce à l’assurance dommages-ouvrage par exemple, mais aussi d’une garantie d’achèvement.

Mais il arrive parfois que des montages particuliers soient proposés aux investisseurs, sans qu’ils ne comprennent toujours les subtilités et conséquences comme :

- le syndicat de copropriétaires et l’ASL (association syndicale libre) : le promoteur du projet vend à différents investisseurs des lots de copropriété d’un immeuble à réhabiliter. Les acquéreurs versent au promoteur du projet, le jour de l’acquisition, le prix de vente du lot de copropriété qu’ils entendent acquérir ainsi qu’une somme correspondant au coût des travaux à accomplir pour rénover ce lot et la quote-part de parties communes attribuée à ce lot ;

- la SCI (société civile immobilière) : l’investisseur n’est, dans ce cas, pas propriétaire d’un lot, mais associé de la SCI propriétaire de l’immeuble.  

Ces parts lui donnent droit à l’attribution d’un lot. Pour permettre à la société civile immobilière de financer les travaux, des parts nouvelles sont créées dans le cadre d’une augmentation de capital ou bien les investisseurs associés abondent en compte courant.

Dans les faits, ces montages ressemblent à la VIR, mais juridiquement ils sont très différents puisque les investisseurs deviennent – par le biais du syndicat de copropriétaires, de l’ASL ou de la SCI, maîtres d’ouvrage de l’opération et ne bénéficient pas de la garantie d’achèvement.

Les copropriétaires/associés supportent in fine l’intégralité des risques liés à l’opération. Leur engagement financier est donc supérieur, voire très supérieur, au montant de l’investissement initial.

Les modes d’exploitation

Schématiquement, deux modes d’exploitation coexistent : le bail commercial (cas de l’immobilier géré) et le bail d’habitation.

Le droit applicable est très différent selon que l’on a en face de soi un locataire commercial qui peut, par exemple, imposer une diminution du montant du loyer ; ou un locataire, personne physique, qui bénéficie de règles très protectrices, même s’il cesse de régler le loyer.

Les objectifs

En fonction de leurs horizons d’investissement, de leurs capacités financières, de leur âge également, les clients engagés dans une opération d’investissement qui tourne mal auront des attentes différentes s’agissant de la solution : « sortir » de l’opération, revendre en assumant les pertes, récupérer sa mise initiale, « stopper l’hémorragie financière » ou encore mener le projet à son terme quitte à avancer des sommes importantes.

C’est évidemment à l’aune de ces informations qu’il faudra envisager les solutions à mettre en place. Il faudra aussi parfois expliquer ce qu’il est raisonnablement possible d’obtenir et ce qui ne l’est pas.

Les solutions

Trouver une solution, combiner plusieurs solutions pour atteindre les objectifs définis avec les clients, suppose soit de trouver un accord amiable, soit d’obtenir une décision de justice.

En matière de solutions amiables, tout ou presque est envisageable dès l’instant que les parties en ont d’accord et que les termes de leur accord respectent l’ordre public. Pour la bonne forme, l’accord obtenu sera formalisé par la signature d’une transaction et les engagements pris seront assortis de garanties.

A défaut de solution amiable, l’investisseur n’aura d’autre option que d’agir en justice et, sur ce terrain, les possibilités sont nombreuses. Il faudra choisir celle(s) qui corresponde(nt) le mieux à la situation rencontrée et dont le coût et les délais prévisibles sont pertinents au regard de des enjeux du litige.

Geler les prêts bancaires

Les investissements immobiliers sont généralement financés par des prêts bancaires. Lorsque le promoteur n’est pas en mesure d’achever la construction de l’immeuble, les acquéreurs se trouvent évidemment privés des loyers et de l’avantage fiscal escomptés. Ils doivent, en revanche, honorer les mensualités du prêt.

L’équilibre financier de l’opération s’en trouve donc totalement bouleversé et, lorsque les investisseurs ont des ressources modestes ou n’ont pas d’épargne pour faire face, ils peuvent ne plus être en mesure de faire face au remboursement du prêt.

Ce d’autant que, dans certains contrats de prêt, la période de préfinancement peut être limitée dans le temps, de sorte que, livraison ou pas, lorsque ce temps est écoulé, le prêt va passer en amortissement.

Consciente de la gravité de ces situations, la jurisprudence a étendu à la Vefa la possibilité pour le juge d’ordonner la suspension – sans frais – du remboursement du prêt jusqu’à ce que le litige relatif à l’inachèvement ait trouvé une issue.

Cette solution, « découverte » par la Cour de cassation (Cass. 1re civ., 18 déc. 2014, n° 13-24.385, X. c/ Sté BNP Paribas Personal Finance : JurisData n° 2014-031611) est désormais appliquée par les tribunaux.

L’investisseur/emprunteur continuera de payer exclusivement l’assurance emprunteur et la période de suspension ne donnera lieu à aucun intérêt et/ou frais au profit de la banque.

La banque ne pourra pas davantage inscrire l’emprunteur au FICP (fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers). Le « gel » des prêts permet au client d’aborder avec davantage de sérénité le processus judiciaire à venir puisque cette solution est nécessairement combinée à d’autres.

Financer l’achèvement

Lorsqu’une acquisition a été réalisée en Vefa ou en VIR et que le promoteur n’est pas en mesure de mener le chantier à son terme, les acquéreurs devront faire appel au garant d’achèvement. Son identité et ses coordonnées figurent dans l’acte notarié. Il s’agit d’une garantie financière. Selon les cas, le garant d’achèvement sera tenu à la prise en charge financière de l’achèvement de l’immeuble ; au remboursement des sommes versées au vendeur par les acquéreurs.

Cette garantie est indispensable, mais elle n’est pas « parfaite ». En effet, l’inachèvement est souvenant associé à des difficultés techniques, des travaux mal réalisés, des déficiences d’entreprises et, dans ces hypothèses, il faudra recourir à une expertise judiciaire pour faire chiffrer d’une part, le coût de reprise des malfaçons, et, d’autre part, le strict coût de l’achèvement de l’immeuble.

Car le garant d’achèvement refusera évidemment de supporter des coûts allant au-delà de son engagement.

Qui plus est, cette garantie a un objet très limité, elle ne couvre nullement les préjudices subis par les acquéreurs : intérêts des prêts, pertes de loyers, perte de l’avantage fiscal, etc.

Faire annuler la vente

En l’absence de livraison du bien acheté, l’idée est de « revenir en arrière », restituer la chose achetée (appartement, parts de SCI) et récupérer les sommes investies. En matière de Vefa, les tribunaux prononcent la résolution judiciaire du contrat de vente en l’état futur d’achèvement, c’est-à-dire l’annulent, lorsque l’une des parties ne respecte pas ses obligations contractuelles.

En particulier, lorsque le promoteur ne livre pas le bien vendu dans le délai convenu, l’acquéreur peut demander au Juge de constater la défaillance du vendeur et, par conséquent, d’annuler la vente.

En cas de dol

L’annulation de la vente peut également intervenir après livraison sur le fondement du dol. L’investisseur devra démontrer que le promoteur et les intermédiaires chargés de la commercialisation du projet disposaient d’informations qui permettaient d’anticiper l’échec du projet mais ont dissimulé ces informations aux acquéreurs.

A titre d’exemple, pour annuler une vente, la Cour d’appel de Montpellier a retenu que :

- lorsque la SCI avait obtenu son permis de construire et fait démarcher les acquéreurs l'état de saturation du marché immobilier carcassonnais était déjà observable ;

- malgré cette conjecture qu'elle n’ignorait pas, elle avait assuré aux investisseurs, par l'intermédiaire de la plaquette de commercialisation, une forte demande locative et un placement sûr et rentable à court terme et que l'immeuble leur avait été vendu à un prix qui dépassait de 30 à 50 % sa valeur réelle ;

- ces affirmations mensongères allaient bien au-delà de la simple exagération publicitaire ;

- et que c'est à partir de celles-ci que les sociétés Y et Z avaient réalisé une étude financière personnalisée en faveur de M. et Mme X et leur avait remis un dossier destiné à leur faire croire que leur investissement était avantageux et sans aucun risque.

Approuvant la décision de la Cour d’appel, la Cour de cassation explique que « la SCI et les sociétés Y et Z avaient commis un dol qui avait déterminé M. et Mme X à contracter et que le contrat de vente signé entre les parties devait être annulé » (Civ. 3e, 7 avril 2016, pourvois n° 14-24.164 et 14-25.446).

Faire réparer les malfaçons, les désordres

Les « responsables » naturels des malfaçons, des désordres qui affectent une construction e sont les intervenants sur le chantier. Le promoteur en est également responsable – non pas techniquement, mais juridiquement – à l’égard des acquéreurs.

Selon le cas, l’acquéreur fera jouer la garantie de parfait achèvement, la garantie biennale ou encore la garantie décennale. C’est ici qu’interviennent les assurances souscrites pour garantir la construction et les intervenants à l’acte de construire :

- la police « dommages-ouvrage » : qui, schématiquement, couvre, après réception, les dommages de nature décennale, c’est-à-dire ceux susceptibles de porter atteinte à la solidité ou à la destination du bien ;

- les polices d’assurance de la responsabilité civile décennale des constructeurs (maître d’œuvre, bureaux d’études, entreprises, contrôleur technique, etc.) :

- et, les polices d’assurance, elles facultatives, qui garantissent la responsabilité civile professionnelle des constructeurs et ont vocation à s’appliquer pour les désordres qui ne sont pas de nature décennale.

Ces polices d’assurance offrent des garanties efficaces. Il faut veiller à les mettre en œuvre dans les délais et se préparer à la résistance qu’opposent parfois les assureurs.

Résoudre les litiges locatifs

Obtenir l’expulsion d’un locataire en situation d’impayés peut prendre plusieurs années. Dès lors, dès l’instant que surviennent des incidents de paiement, le propriétaire doit actionner la garantie des loyers impayés lorsqu’elle a été souscrite, et engager les démarches afin d’obtenir la résolution du bail et, si nécessaire, l’expulsion du locataire.

La première de ces démarches consiste à faire délivrer au locataire, par un huissier de justice, un commandement de payer visant la clause résolutoire. C’est à partir de cet acte, et seulement de cet acte-là, que pourra se poursuivre la seule procédure susceptible d’aboutir dans ce domaine.

Les propriétaires sont parfois réticents et trouvent la démarche brutale à l’égard de locataires en difficulté mais de bonne foi. Il faut ici comprendre qu’à tout moment bailleur et locataire peuvent convenir d’un accord et mettre fin à la procédure. En revanche, faute d’accord, les droits du propriétaire seront préservés autant que faire se peut, ce qui ne sera pas le cas s’il attend pour agir.

Etre indemnisé

Quelle que soit la difficulté rencontrée, même lorsque la vente a finalement été annulée, les investisseurs voudront obtenir réparation, être dédommagés des sommes investies en vain, des pertes subies, des frais engagés. Les intervenants qui auront contribué à la réalisation de ces préjudices seront en définitive condamnés à en indemniser les acquéreurs. L’enjeu est donc ailleurs.

Il faut, avant d’engager les actions et les frais inhérents, identifier les responsables et les solvables. Obtenir une bonne décision de justice contre une partie qui est en liquidation judiciaire peut être satisfactoire au plan moral, c’est en revanche inutile au plan financier. C’est la raison pour laquelle les investisseurs auront intérêt à mettre en cause les différents intervenants à l’opération et à solliciter leur condamnation solidaire.

Les intermédiaires

Qu’ils soient intervenus comme conseil des investisseurs ou comme mandataires du vendeur, les intermédiaires peuvent voir leur responsabilité engagée et être condamnés à indemniser les acquéreurs des frais engagés et/ou des préjudices subis. C’est le cas, par exemple, lorsque la valeur du bien a été significativement surévaluée.

Considérant que l’acquéreur avait, du fait du conseil reçu, perdu une chance de ne pas acheter, la Cour d’appel de Versailles a condamné le CGP à verser 30 000 € à l’investisseur en retenant que : « Le prix d’achat HT étant de 114 602 euros, compte tenu de sa surévaluation et du prix de revente, la perte de chance sera évaluée à la somme de 30 000 euros. » (Versailles, 3e chambre, 8 février 2018, n° 16/05882).

Des intermédiaires ont également été condamnés, solidairement avec les vendeurs, à indemniser des acquéreurs lorsque la juridiction a considéré qu’ils avaient participé aux manœuvres du promoteur consistant à cacher aux acquéreurs :

- la fragilité financière de la société appelée à gérer la résidence services (Lyon, 14 juin 2014, précité) ;

- les informations relatives à la saturation du marché immobilier local (Civ. 3e, 7 avril 2016, pourvois n° 14-24.164 et 14-25.446, précité et Montpellier, 1re chambre a, 6 juillet 2017, n° 13/06962).

En revanche, l’intermédiaire « ne peut être tenu pour responsable de l’échec d’une opération de placement dû aux aléas de l’économie. » (Aix-en-Provence, 22 février 2018, n° 16/12867).

La banque

La jurisprudence dessine progressivement les contours de la responsabilité du banquier dispensateur de crédits à l’égard des investisseurs. Le banquier n’est pas tenu d’un « devoir de conseil envers son client sur l’investissement projeté » (Civ. 3e, 8 février 2018, n° 17-11.044).

En revanche, et spécialement lorsque l’emprunteur est « non averti », le banquier est assujetti à une obligation de mise en garde quant au risque d’endettement né de l’octroi du prêt.

Ainsi, dans une affaire où le bien financé s’est révélé ne pouvoir être loué comme envisagé lors du montage de l’opération, la banque a été condamnée pour avoir fait passer les acquéreurs d’un taux d’endettement de « 18,4 à 32 % pour un revenu locatif net de 235 € par mois et à 42, 8 % en cas de défaut de paiement des loyers alors même que leur revenu s’était élevé à 38 708 € pour l’année 2004 et qu’il se trouvait susceptible de baisser après la retraite de l’épouse et alors que le taux variable des intérêts imposait des précautions supplémentaires et que le bénéfice fiscal de l’opération immobilière des époux X-I était limité » (Riom, 19 octobre 2015, RG n° 14/01615).

Le notaire

Ce n’est que dans des situations très spécifiques que le notaire peut voir sa responsabilité engagée. A titre d’exemple, une étude notariale a été condamnée à verser à un investisseur des dommages-intérêts pour avoir reçu une vente hors le cadre réglementé de la Vefa, alors que ladite vente relevait, dans les faits, de ce régime.

Le notaire a été condamné pour ne pas avoir alerté l’acquéreur sur les risques encourus alors qu’au surplus nombre d’indices pouvaient laisser présager la mauvaise tournure de l’opération, notamment le fait que le promoteur avait vendu très peu de lots et ne disposait donc pas de la trésorerie lui permettant de mener le projet à son ter (Riom, Chambre commerciale, 28 février 2018, n° 16/01520). Ces exemples mettent en lumière le fait que des solutions existent pour remédier aux difficultés que peuvent rencontrer les investisseurs pris dans une opération qui vire au désastre.

 

Le cas particulier des parts de SCI

Pour réalisation une opération de promotion immobilière portant notamment sur la rénovation de monuments historiques, un promoteur avait envisagé de constituer plusieurs SCI et de proposer à des investisseurs l’acquisition de ces parts. La commercialisation, assurée par des intermédiaires financiers, a fait l’objet de publicités. La rénovation n’a jamais été achevée et, faute de disposer d’une garantie financière d’achèvement, les investisseurs ont réalisé l’ampleur du désastre, notamment le fait qu’ils étaient indéfiniment et solidairement responsables des dettes de la SCI dont ils étaient associés. Autrement dit, les associés risquaient d’être poursuivis sur leur patrimoine personnel par les créanciers de la société civile immobilière.

Les investisseurs ont alors porté l’affaire en justice et obtenu l’annulation de l’achat des parts aux motifs :

- que la commercialisation des parts sociales s’analyse en de l’appel public à l’épargne, aujourd’hui « offre au public de titres financier » ;

- que cet appel public à l’épargne a été effectué sans que soient respectées les règles applicables à la matière : nature des titres vendus, information préalable, etc. (Com., 15 mars 2017, pourvoi n° 14-18.452). Cette décision leur a fait perdre rétroactivement la qualité d’associé de sorte que leurs pertes sont désormais limitées aux sommes investies.

Première publication Profession CGP le 20/04/2018