Créée par la loi n°2004-204 du 9 mars 2004, la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), prévue aux articles 495-7 à 495-16 du Code de procédure pénale, est inspirée de la procédure anglo-saxonne du plaider coupable ou « Plea Bargaining ».
Cette procédure répond à un objectif de rapidité, à savoir celui d’éviter l’engorgement des tribunaux correctionnels.
Elle a été récemment modifiée par la loi n°2023-1059 du 20 novembre 2023.
I. Le champ d’application de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité
La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) peut être envisagée :
- Pour tous les délits, à l’exception de ceux commis par les mineurs, des délits de presse, des délits politiques et des délits d’atteintes volontaires et involontaires à l’intégrité des personnes et d’agressions sexuelles punis d’un emprisonnement d’une durée supérieure à cinq ans [1].
- A la condition que le prévenu reconnaisse les faits qui lui sont reprochés.
Elle peut être mise en œuvre par le Procureur de la République dans les cas suivants :
- Au stade de l’enquête de police, d’office ou à la demande de l’intéressé ou de son avocat ;
- Postérieurement à la mise en mouvement de l’action publique par le ministère public, mais seulement dans le cas où le prévenu a reçu une citation directe ou une convocation en justice ;
- Avant le règlement de l’instruction préparatoire, à la demande du Procureur de la République ou à l’initiative du Juge d’instruction, sous réserve que la personne mise en examen reconnaisse les faits et qu’elle accepte la qualification pénale retenue.
II. Les conditions de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité
Le Procureur de la République est libre de proposer à la personne [2] :
- D’exécuter une ou plusieurs des peines encourues à titre principal ou complémentaire ;
- D’assortir la peine en tout ou partie du sursis ;
- Que la peine fasse l’objet d’une mesure d’aménagement (placement à l'extérieur, semi-liberté, fractionnement et suspension des peines, détention à domicile sous surveillance électronique ou libération conditionnelle).
Attention : Si une peine d’emprisonnement est proposée, sa durée ne peut être supérieure à trois ans, ni excéder la moitié de la peine d’emprisonnement encourue [3].
Plus spécifiquement et dans le cadre d’une peine d’emprisonnement ferme, le Procureur de la République devra en préciser les modalités d’application [4] :
- Soit une mise à exécution immédiate ;
- Soit une convocation future devant le Juge de l’application des peines (JAP) qui en déterminera les conditions d’exécution (la semi-liberté, le placement à l'extérieur ou la détention à domicile sous surveillance électronique).
III. La procédure de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité
A. Assistance obligatoire d’un avocat pour le prévenu
La présence de l’avocat, qu’il soit choisi par le prévenu ou désigné d’office par le Bâtonnier, est obligatoire lors d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité et en aucun cas, le prévenu ne peut y renoncer [5].
Dans l’hypothèse où ce dernier refuse de se faire assister, cette procédure ne pourra être mise en œuvre.
L’avocat est présent :
- Lors du recueil des déclarations du prévenu qui serviront de fondement à la reconnaissance de culpabilité ;
- Lors de la proposition de la peine par le Procureur de la République : son rôle est déterminant en pratique puisqu’il dispose de la faculté de négocier la peine ainsi proposée.
- A l’entretien avec son avocat si le prévenu le sollicite ;
- Au moment de la décision du prévenu, qu’il réponde immédiatement à la proposition du Procureur de la République, ou qu’il sollicite un délai de réflexion de dix jours ;
- Lors de l’audience d’homologation en cas d’acceptation de la proposition.
B. La comparution devant le Procureur de la République
Le prévenu comparait avec son avocat devant le Procureur de la République. Ce dernier constate l’identité du prévenu et expose les faits qui lui sont reprochés.
La comparution se termine par la proposition de peine du Procureur de la République et la notification au prévenu qu’il peut bénéficier d’un délai de dix jours pour formaliser sa réponse [6].
Dès lors, plusieurs hypothèses sont envisageables :
- Soit le prévenu accepte immédiatement la peine proposée par le Procureur de la République [7];
- Soit le client refuse immédiatement la peine proposée par le Procureur de la République [8];
- Soit le prévenu accepte le jour même après s’être entretenu avec son avocat ;
- Soit le prévenu refuse le jour même après s’être entretenu avec son avocat ;
- Soit le prévenu sollicite le bénéfice d’un délai de réflexion de dix jours ;
- Soit le prévenu sollicite le bénéfice d’un délai de réflexion de dix jours après s’être entretenu avec son avocat.
IV. Les effets de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité
A. L’acceptation du prévenu de la peine proposée par le Procureur de la République
En cas d’acceptation de la proposition, le prévenu est aussitôt présenté devant un magistrat du siège aux fins d’homologation de la peine lors d’une audience publique [9].
A cette occasion, et avant toute défense au fond, l’avocat du prévenu pourra soulever toutes exceptions de nullités de la procédure.
L’ordonnance d’homologation est purement exécutoire, ce qui signifie qu’elle produit les effets d’un jugement de condamnation.
Le prévenu peut en interjeter appel dans un délai de 10 jours [10].
B. Le refus du prévenu ou du magistrat du siège de la peine proposée par le Procureur de la République
En cas de refus du prévenu ou d’homologation par le Président du Tribunal, l’action publique est toujours pendante.
Trois hypothèses doivent être envisagées :
- Soit le prévenu sera présenté devant le Tribunal Correctionnel ;
- Soit le prévenu fera l’objet d’une information judiciaire devant un Juge d’instruction ;
- Soit le Procureur de la République décidera de classer sans suite.
Plus spécifiquement, le Président peut refuser l'homologation dans plusieurs cas de figure [11]:
- S’il estime que la peine n’est pas adaptée ;
- S’il estime que la nature des faits, la personnalité de l'intéressé, la situation de la victime ou les intérêts de la société justifient une audience correctionnelle ordinaire ;
- Lorsque les déclarations de la victime entendue apportent un éclairage nouveau sur les conditions dans lesquelles l'infraction a été commise ou sur la personnalité de son auteur.
Focus sur les nouveautés issues de la loi d’orientation et de programmation du 20 novembre 2023 :
- Avant la promulgation de cette loi, les options du Procureur de la République étaient limitées en cas d’échec de la CRPC.
Ce dernier devait :
- Soit saisir le Tribunal Correctionnel
- Soit requérir l’ouverture d’une information judiciaire devant un Juge d’instruction.
Il était ainsi totalement prohibé de mettre en œuvre une autre CRPC fondée sur une nouvelle proposition de peine [12].
- Depuis la promulgation de cette loi, une seconde chance est octroyée au Procureur de la République.
Ce dernier peut, à une seule reprise, saisir à nouveau le président du tribunal judiciaire ou le juge délégué d’une requête en homologation de peine sans qu’il ait à justifier d’un changement de circonstances ou de quantum, mais sous réserve de l’acceptation de la peine par la personne poursuivie [13].
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Article rédigé par :
Harold MECHICHE, Avocat au Barreau de PARIS
53, Quai de Bourbon
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[1] Articles 495-7 et 495-16 du Code de procédure pénale
[2] Article 495-8 alinéa 2 du Code de procédure pénale
[3] Ibid n°2
[4] Ibid n°2
[5] Article 495-8 alinéa 5 du Code de procédure pénale
[6] Article 495-8 alinéa 6 du Code de procédure pénale
[7] Article 495-9 du Code de procédure pénale
[8] Article 495-12 du Code de procédure pénale
[9] Ibid n°8
[10] Article 495-11 alinéa 3 du Code de procédure pénale
[11] Articles 495-11 et 495-11-1 du Code de procédure pénale
[12] Crim, 17 mai 2022, n°21-86.131
[13] Article 495-12 alinéa 1 du Code de procédure pénale
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