Le Préfet de département peut retirer sa carte de résident à un employeur étranger ayant embauché illégalement un autre étranger (travail illégal). Mais si cette sanction est bel et bien prévue dans le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile (CESEDA), elle reste toutefois encadrée, et des dérives sont régulièrement constatées. L’employeur étranger victime de cette sanction du Préfet peut la contester. Le droit en la matière est d’ailleurs de son côté puisqu’il est même possible, pour récupérer la carte de résident, de passer par une voie accélérée : le référé-suspension devant le Tribunal administratif.

 

La condition d’urgence

 

Pour saisir le Tribunal administratif d’une requête en référé, le requérant doit avant toute chose prouver l’urgence à faire intervenir le juge des référés.

En la matière, l’employeur est favorisé dés lors que pour ce type de sanction, le droit français prévoit une « présomption d’urgence ». En d’autres termes, en l’absence d’éléments susceptible de renverser cette présomption, l’urgence est par principe admise (CE, 14 mars 2001, n° 229773, A).

Par exemple, le Tribunal de Nancy a jugé que :

« A l'appui de sa demande, M. A soutient que l'urgence est présumée s'agissant d'un retrait de son titre de séjour et, que l'arrêté litigieux le place dans une situation irrégulière. Le préfet de Meurthe-et-Moselle ne fait état d'aucune circonstance particulière de nature à renverser cette présomption d'urgence. Par suite, la condition d'urgence, au sens de l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie » (TA Nancy, 21 juillet 2022, n° 2201834 ; v. dans le même sens : TA Cergy-Pontoise, 9 août 2023, n° 2310212 ; TA Cergy-Pontoise, 3 juillet 2023, n° 2308296).

Attention, cependant, cette présomption d’urgence n’est pas irréfragable. Il a d’ailleurs été jugé que : « L'urgence, en outre, doit être évaluée de manière objective et globale, en fonction de l'ensemble des circonstances de l'affaire, y compris la préservation des intérêts publics attachés à la mesure litigieuse […] compte tenu de l'intérêt public qui s'attache à la lutte contre l'emploi illégal de travailleurs étrangers, la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie » (TA Dijon, 18 octobre 2022, n° 2202580).

 

L’illégalité de la sanction

La deuxième condition pour obtenir la suspension de l’exécution de la décision et d’existence d’un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un « doute sérieux quant à la légalité de la décision ». Tous les moyens de légalité externe ou interne peuvent ici être soulevés.

  • Il n’existait aucun lien de subordination entre la personne prétendument employée et l’employeur ;
  • L’embauche était parfaitement légale (ou l’employé avait présenté, lors de son embauche de faux papiers d’identité d’un autre état membre de l’UE, ou un faux titre autorisant le travail, sans que l’employeur puisse déceler le caractère falsifié du titre) ;
  • Vice de procédure (manquement au caractère contradictoire de la procédure) ;
  • La sanction n’est pas prévue pour les ressortissants de certains états (par ex : Algérie) ;
  • Vice de forme (absence de signature, insuffisance de motivation …) ;
  • Disproportion de la sanction (à cet égard, le juge administratif prend en compte la durée du séjour de l’intéressé en France ainsi que l’ensemble de ses attaches, notamment familiales, en France).

Les employeurs concernés par ce type de sanction ont ainsi tout intérêt à se défendre et a contester la sanction !