Par un arrêt en date du 23 septembre 2020, n°19-15.918, la troisième chambre civile de la Cour de cassation vient de rappeler que la notification tardive de l’ordonnance d’expropriation ne saurait conduire à l’annulation de la procédure.

La Société Avenir Ivry faisait grief à l’ordonnance de déclarer expropriée une parcelle dont elle était propriétaire, alors qu’il ne peut être porté atteinte au droit de propriété, à raison de l'utilité publique, que si l'atteinte répond à un besoin qui doit être satisfait dans un délai raisonnable; que par suite, la notification de l'ordonnance d'expropriation, qui permet de purger les recours et d'exécuter l'envoi en possession au profit de l'expropriant, doit-elle même intervenir dans un délai raisonnable suivant la déclaration d'utilité publique;

Qu'en l'espèce, l'ordonnance d'expropriation du 2 mars 2015 avait été notifiée à la société Avenir Ivry que le 28 mars 2019, soit plus de quatre ans après son prononcé, et près de huit ans après la déclaration d'utilité publique du 11 juillet 2011;

Qu'au regard de l'écoulement de ce délai, la Société expropriée demandait à la Cour de cassation que l'ordonnance attaquée soit annulée pour perte de fondement juridique au regard des articles L. 12-1, R. 12-1 à R. 12-4 (devenus articles L. 220-1, R. 221-1 à R.221-4) du code de l'expropriation, de l'article 544 du code civil, de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et de l'article 1 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La réponse de la Cour a été que le transfert de propriété du bien faisant l’objet de la procédure d’expropriation est opéré, à défaut d’accord ou de cession amiable, par voie d’ordonnance du juge de l’expropriation. Que, pour être exécutée à l’encontre de l’intéressé, l’ordonnance doit lui avoir été préalablement notifiée par l’expropriant. Que sa notification fait courir les délais de recours. Que la durée du délai de notification de l’ordonnance est sans effet sur la légalité de cette décision comme l’avait déjà jugé la 3ème  Chambre Civile de la Cour par un arrêt du 5 décembre 2007, (pourvoi n° 06-70.003, Bull. 2007, II, n° 224). Qu’il s’ensuit que l’éventuel préjudice résultant de l’absence de notification de l’ordonnance dans un délai raisonnable n’est pas susceptible d’être réparé par l’annulation de la procédure et que le moyen n’est pas fondé.

Ainsi, l’autorité expropriante est libre de notifier rapidement ou non à l’exproprié l’ordonnance prononçant le transfert de propriété, la contrepartie étant que la jouissance du bien reste acquise à l’exproprié tant qu’il n’est pas procédé au paiement de l’indemnité d’expropriation ou de sa consignation dans les conditions prévues par le Code de l’expropriation (article L. 231-1).