Selon l’article L. 341-10 du code de l’environnement, les sites classés ne peuvent ni être détruits ni être modifiés dans leur état ou leur aspect sauf autorisation spéciale. Aux termes de l’article L. 341-13 du même code, le déclassement total ou partiel d’un site ne peut être prononcé que par décret en Conseil d’Etat après avis de la commission supérieure des sites.

 

Le classement d’un site n’entraine pas une interdiction totale de toute construction, toute activité dans le périmètre du classement. Mais tout aménagement susceptible de modifier l’état des lieux est soumis à autorisation.

 

Cette autorisation est délivrée par le ministre chargé des sites. Mais celui-ci ne peut autoriser un projet qui aurait pour effet de rendre le classement du site sans objet et serait l’équivalent d’un véritable déclassement.

 

Le juge doit donc vérifier, lorsqu’il juge la légalité d’une telle autorisation, si les travaux ont pour effet de faire perdre son objet au classement du site, même sur une partie de celui-ci.

 

Pour cela le juge doit apprécier l’impact sur le site de l’opération autorisée eu égard à sa nature, à son ampleur et à ses caractéristiques, en tenant compte de la superficie du terrain concerné par les travaux à l’intérieur du site ainsi que le cas échéant, de la nature des compensations apportées à l’occasion de l’opération et contribuant à l’embellissement ou à l’agrandissement du site.

 

 

Le maire de Paris a accordé un permis de construire pour la restructuration du stade de Roland Garros sur une parcelle située dans le jardin des serres d’Auteuil, après autorisation du ministre chargé des sites.

 

Plusieurs associations ont attaqué ce permis en invoquant notamment la situation du projet au sein du site classé du bois de Boulogne.

 

Le juge des référés du tribunal administratif a suspendu l’exécution de ce permis estimant qu’existait un doute sérieux quant à sa légalité. Selon le tribunal, le projet avait pour effet de rendre le classement du site pour partie sans objet et était l’équivalent d’un déclassement partiel, qui ne pouvait résulter que d’un décret en Conseil d’Etat.

 

Pour statuer ainsi, le tribunal s’est fondé sur le fait que le jardin des serres d’Auteuil est compris dans le site classé du Bois de Boulogne dont le classement a pour objet d’interdire les utilisations de parcelles contraires à son affectation légale de promenade publique. Le jardin des serres d’Auteuil constitue un jardin ouvert au public et affecté à la promenade publique, sans installation sportive. De plus, le sol et certains bâtiments dont la grande serre et les serres principales sont inscrits sur l’inventaire supplémentaire des monuments historiques.

 

Le Conseil d’Etat, saisi en cassation, a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris qui ordonnait la suspension.

 

Il reproche au juge de première instance de n’avoir pris en compte que la parcelle objet des travaux autorisés par le permis de construire, alors même qu’elle ne représente qu’une petite partie du site classé. De plus, le tribunal n’a pas pris en considération la compensation prévue par l’opération.

 

Le Conseil d’Etat censure donc le tribunal pour avoir restreint son appréciation sans avoir pris en compte le projet dans son ensemble.

 

Après avoir annulé le jugement, il rejette la demande de suspension du permis de construire, estimant qu’il n’y a pas de moyens de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du permis.

 

Pour le Conseil, l’autorisation de travaux n’avait pas pour effet de rendre le classement du site sans objet :

  • Le permis ne prévoit la démolition que des seules serres non inscrites à l’inventaire des monuments historiques.
  • Une compensation est prévue : l’ouverture à la promenade publique en dehors de la période du tournoi et un parvis en herbe ouvert au public au sein du stade de Roland Garros
  • L’architecture des constructions projetées s’apparente à celle des serres historiques.
  • Le terrain en cause présente une faible superficie par rapport à l’étendue du site classé du Bois de Boulogne

 

Le projet est donc compatible avec le classement du site du Bois de Boulogne et ne remet pas en cause l’objet de ce classement, qui est la promenade publique.

 

Conseil d’Etat, 3 octobre 2016, n° 39859