En l'espèce, un maître d'ouvrage commande à une entreprise des travaux de terrassement gros-oeuvre et de réalisation d'une chaussée pour la station service qu'elle exploite.

Des désordres étant apparus décembre 2003, soit trois mois après la prise de possession, ce maître d'ouvrage sollicite la désignation d'un expert.

L'expert concluait, en ce qui concerne les chaussées en béton bitumineux, « que leur mise en oeuvre à une température trop basse génère un manque de liant dans la couche de roulement qui va provoquer une usure anormale des chaussées, usure que l'on peut déjà constater ».

Il ajoutait : « les dommages actuellement observables présentent un caractère purement esthétique. Cependant, ils présentent un risque important d'atteinte à la solidité de l'ouvrage dans les années à venir ».

Sur la base de ces conclusions, le maître de l'ouvrage assignait l'entreprise, notamment sur le fondement de l'article 1792 du Code civil en réparation des désordres.

La cour d'appel déboute le maître d'ouvrage de sa demande au motif que la garantie décennale ne pourrait être invoquée au titre de la solidité de l'ouvrage en l'état des désordres et que le maître de l'ouvrage ne démontrerait pas d'avantage que les désordres relevés rendraient l'ouvrage impropre à sa destination.

La Cour de cassation censure et casse, en reprochant à la cour d'appel d'avoir considéré que les dommages actuellement observables présentent un caractère purement esthétique, sans rechercher si, dans le délai de dix années à compter de la réception de l'ouvrage, le désordre ne rendrait pas l'ouvrage impropre à sa destination ni ne porterait atteinte à sa solidité.

(Cass. 3e civ., 16 mars 2010, n° 09-11.660, F-D, Sté Sauret c/ SARL Rozière TP : JurisData n° 2010-002192)