Fernand B. et son épouse, Germaine M., ont consenti les 15 et 21 juin 2007 à M. P., petit-fils de Germaine M., une promesse synallagmatique de vente portant sur un immeuble. Dans l’attente de la régularisation de l’acte authentique, les vendeurs ont donné l’immeuble à bail à M. et Mme P.   Fernand B. étant décédé le 10 septembre 2007, la régularisation de l’acte n’est pas intervenue. Germaine M. a fait signifier le 5 octobre 2009 à M. et Mme P. un congé pour vente à effet du 31 août 2010. Elle est décédée le 18 octobre 2009.

             Les locataires ont alors fait assigner les deux enfants de Fernand B., Alain et Aline B., pour obtenir la nullité du congé pour insanité d’esprit. Par un jugement du 12 décembre 2011, le tribunal d’instance de Beauvais a déclaré cette demande irrecevable, s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Beauvais pour apprécier la validité de la promesse et a sursis à statuer sur la validité du congé.

             Par jugement du 4 mars 2013, confirmé par un arrêt de la Cour d'Appel d'Amiens du 11 septembre 2014, le Tribunal de Grande Instance de Beauvais a déclaré la promesse de vente nulle pour insanité d’esprit. Par jugement du 7 décembre 2015, le Tribunal d’Instance de Beauvais a déclaré M. et Mme P. irrecevables à contester la validité du congé, a dit ce congé régulier et a ordonné l’expulsion des locataires en fixant une indemnité d’occupation.

            Les locataires interjettent appel. La Cour d’Appel pour déclarer recevable l’action en nullité du congé délivré par la bailleresse à M. et Mme P. et dire nul et de nul effet le congé avec offre de vente délivré le 5 octobre 2009 par Germaine M. à M. et Mme P., l’arrêt énonce qu’il résulte du jugement du 12 décembre 2011 que la demande de nullité du congé était fondée sur l’insanité d'esprit de son auteur et donc sur l’article 414-1 du code civil, que l’irrecevabilité n’a été prononcée qu’en application de l’article 414-2 selon lequel après la mort de l’auteur de l’acte, seuls ses héritiers disposent de l’action en nullité, alors que la présente demande ayant pour objet la nullité du congé pour vente est fondée sur une irrégularité de l’acte en lui-même liée à sa nature, qu’il ne s’agit plus de trancher la question du trouble mental ayant affecté l’auteur de l’acte mais de s’interroger sur les personnes dont le consentement était nécessaire à la validité de l’acte et en déduit qu’il s’agit bien d’une autre cause d’irrecevabilité non tranchée précédemment et non d’un simple moyen nouveau, de sorte que l’autorité de la chose jugée ne saurait être opposée à M. et Mme P. ;

            La Cour de Cassation censure ce raisonnement , au visa de l’article 1351, devenu 1355, du code civil ,a rappelé qu’il incombe au demandeur, avant qu’il ne soit statué sur sa demande, d’exposer l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci ; qu’il s’ensuit que, dans une même instance, une prétention rejetée ne peut être présentée à nouveau sur un autre fondement ;que par suite ,en affirmant que le Tribunal d’Instance de Beauvais avait, dans le dispositif de son jugement du 12 décembre 2011, déclaré M. et Mme P. irrecevables en leur demande tendant à voir déclarer nul et de nul effet le congé donné par Germaine M., ce dont il résultait qu’ils n’étaient pas recevables à faire juger à nouveau cette prétention par la présentation d’un nouveau moyen.( Cass.CIV.2°. 11 Avril 2019 N° 17-31.785.)