Ping-Ming H., sculpteur, est décédé le 14 décembre 2002, laissant pour lui succéder ses trois enfants issus d’un premier mariage, MM. Rémy, Paolo et Alain H., ainsi que sa seconde épouse, Mme Bingan Anne H.

            Reprochant notamment à la seconde épouse d’avoir vendu, sans leur accord préalable, des tirages en bronze posthumes numérotés et d’avoir fait réaliser des tirages à partir de modèles en plâtre non divulgués, MM. Rémy, Paolo et Alain H. l’ont assignée en déchéance du droit d’usufruit spécial, dont elle est titulaire en application de l’article L. 123-6 du code de la propriété intellectuelle, et en contrefaçon.

            La Cour a relevé d’office le moyen tiré de l’article L. 123-6 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n 2006-728 du 23 juin 2006, alors en vigueur aux termes duquel, pendant l’année civile en cours et les soixante-dix années qui suivent le décès de l’auteur, le conjoint survivant, contre lequel n’existe pas un jugement passé en force de chose jugée de séparation de corps, bénéficie, quel que soit le régime matrimonial et indépendamment des droits qu’il tient des articles 756 à 757-3 et 764 à 766 du code civil sur les autres biens de la succession, de l’usufruit du droit d'exploitation dont l’auteur n’aura pas disposé .

            La Cour se référant à la jurisprudence constante a relevé que, les épreuves en bronze à tirage limité coulées à partir du modèle en plâtre ou en terre cuite réalisé par le sculpteur personnellement doivent être considérées comme l’œuvre elle-même émanant de la main de l’artiste ; qu’en effet, par leur exécution même, ces supports matériels, dans lesquels l’œuvre s’incorpore et qui en assurent la divulgation, portent l’empreinte de la personnalité de l’auteur ; que, dès lors, dans la limite de douze exemplaires, exemplaires numérotés et épreuves d’artiste confondus, ils constituent des exemplaires originaux et se distinguent d’une simple reproduction ;qu’il en résulte que les tirages en bronze numérotés ne relèvent pas du droit de reproduction, de sorte qu’ils n’entrent pas dans le champ d’application de l’usufruit du droit d’exploitation dont bénéficie le conjoint survivant .

            La Cour d’Appel de Paris a encore été censurée sur le moyen tiré de la violation de l’article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n 2017-891 du 6 mai 2017, alors en vigueur.

            En effet pour rejeter la demande en contrefaçon formée par MM. Paolo, Alain, Nicolas H. et Mme Laura H. au titre de la reproduction de modèles en plâtre non divulgués, l’arrêt avait  énoncé que le dispositif de leurs conclusions est totalement imprécis, un acte de contrefaçon ne pouvant être retenu sans indication de l’oeuvre contrefaite et les motifs des écritures, qui font état de diverses oeuvres, ne pouvant suppléer la carence affectant le dispositif, lequel fait mention de quinze exemplaires, puis sollicite le versement de 50 000 euros pour chacun des quatorze exemplaires .

            La Cour de cassation a au contraire affirmé que l’imprécision dans l’énoncé d’une prétention, au sein du dispositif, ne peut être assimilée à un défaut de récapitulation de ladite prétention. (Cass.Civ .I°.22 Mai 2019 .N° 17-28.314.)