Le traitement en France du 2ème pilier LPP Suisse au moment du divorce
Le traitement du 2ème pilier (LPP) entre la France et la Suisse dans le cadre d’un divorce a été modifié depuis le 1er janvier 2017.
Traitement du 2ème pilier avant le 1er janvier 2017. En effet, avant cette date,
- Par le juge français. Le juge français prenait en considération le 2ème pilier pour déterminer le montant de la prestation compensatoire. Dans le cas d’époux communs en biens (comme c’est le cas en l’espèce), le deuxième pilier était considéré comme un bien propre des époux (Cour de Cassation, 3 mars 2010).
- Par le juge suisse. Les juridictions suisses considéraient alors que si le 2ème pilier avait bien été pris en considération pour fixer la prestation compensatoire, il ne pouvait y avoir d’action en complément de jugement.
A l’inverse, si le 2ème pilier avait été passé sous silence par le juge français, il était alors possible pour l’épouse d’introduire en Suisse une procédure en complément de jugement (TF 24 octobre 2013).
Traitement depuis le 1er janvier 2017. L’Art 63 LDIP prévoit désormais une compétence exclusive des autorités suisses sur les avoirs suisses avec en principe une non reconnaissance des décisions étrangères ayant statué sur le partage du 2ème pilier.
Le juge français n’a donc pas à se prononcer sur l’attribution des avoirs de prévoyance professionnels acquis par le couple en Suisse. En pratique, le juge suisse procède surtout à une vérification des jugements français quant aux dispositions prises sur le deuxième pilier.
Possibilité de déroger au principe du partage par moitié. Le principe est le partage par moitié des avoirs LPP (article 124b al.1 code civil suisse). Il est cependant possible d’y déroger conventionnellement. Dans ce cas, il faut que le conjoint qui renonce puisse bénéficier d’une autre forme de prévoyance qui doit être considérée comme adéquate.
Mais marge d’appréciation importante du juge suisse. Si le juge du divorce estime que les modalités prévues par les conjoints quant au partage des avoirs LPP n’assurent pas une prévoyance adéquate aux conjoints, il peut refuser de tels choix. Le juge jouit en la matière d’un libre et large pouvoir d’appréciation (art. 280 al. 3 CPC). Le juge peut également s’écarter de la notion de partage par moitié pour de justes motifs (124b, 124b al.2 CCS). Il peut même aller au-delà du partage par moitié dans certains cas (124b al.3 CCS).
En pratique, ce n’est donc que dans des situations particulières qu’une renonciation ou un partage autre que par moitié est possible par convention. C’est notamment en démontrant que chacun des époux bénéficie d’une prévoyance adéquate qu’il sera possible de déroger au principe du partage par moitié.
Certains juges cantonaux sont beaucoup plus souples que d’autres pour accepter l’accord des époux de ne pas partager les avoirs de prévoyance. Ainsi, à Genève, la renonciation à l’équilibrage LPP est prononcée dans plus de 45% des divorces.
A l’inverse, d’autres juges (notamment vaudois) sont beaucoup plus restrictifs et ordonnent l’équilibrage, malgré l’accord des époux de ne pas partager leurs avoirs LPP.
La prévoyance adéquate. La prévoyance est « adéquate » si celui des époux qui aurait pu bénéficier de l’équilibrage bénéficie d’autres avantages qui peuvent lui assurer une bonne retraite ou une couverture suffisante au cas où il deviendrait invalide.
On peut citer à titre d’exemple les cas suivants :
- L’époux bénéficie de revenus réguliers tirés de sa fortune ou de biens immobiliers,
- L’époux dispose d’un troisième pilier ou bénéficie d’un droit d’usufruit immobilier ou d’un droit d’habitation.
- L’âge des époux est également pris en compte : s’il y a une grande différence d’âge entre les époux, il ne serait pas équitable que le plus âgé doive réduire ses avoirs de prévoyance alors que l’autre, plus jeune, aura encore de nombreuses années professionnelles pour accumuler des avoirs LPP.
- De même, plus les époux sont jeunes au moment du divorce, plus la renonciation à l’équilibrage sera acceptée car chacun aura le restant de sa vie professionnelle pour accumuler des avoirs de prévoyance suffisants.
- On peut renoncer à l’équilibrage des avoirs de prévoyance si le partage apparaît inéquitable au vu de la situation économique des époux après divorce. Par exemple, chacun bénéficie de revenus ou d’une fortune confortables de sorte qu’il n’est pas nécessaire de prévoir, en plus, des avoirs de prévoyance à équilibrer (art. 124b CC).
- Lorsque, dans la liquidation du régime matrimonial, celui qui aurait pu bénéficier de l’équilibrage a été particulièrement avantagé,
- Ou encore, celui qui renonce à l’équilibrage reçoit une contribution financière beaucoup plus avantageuse que ce à quoi il aurait eu droit.
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