Le 3 novembre 2018, dans le cadre des débats sur la loi de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice, les députés adoptaient un amendement afin de réduire le délai de séparation de deux ans à un an en matière de divorce pour altération définitive du lien conjugal.
La célérité voulue par le législateur semble donc gagner l’ensemble du droit du divorce, à peine deux années après l’entrée en vigueur du divorce conventionnel extra judiciaire.
Faut-il pour autant en déduire que ce que Juge veut, Dieu ne le veut plus en matière de divorce ? Bien qu’on ne puisse que s’étonner que le gouvernement, qui en est pourtant friand, n’ait pas encore inventé le divorce par formulaire CERFA, rien n’est moins sûr.

Plus de deux siècles après la loi du 20 septembre 1792 permettant aux conjoints de rompre leur mariage sans juge, et sans motiver leur demande, divorcer n’a, en apparence, jamais été aussi simple.

La loi de modernisation de la justice du XXème siècle du 18 novembre 2016 a instauré le divorce à l’amiable sans le juge (article 50). Ainsi, depuis le 1er janvier 2017, les époux qui optent pour un divorce par consentement mutuel ne passent plus devant le juge.

Mieux, l’article 229 du Code civil paraît ériger en véritable principe le divorce conventionnel par consentement mutuel, réduisant le Juge aux Affaires Familiales à un rôle de simple subalterne.

Cela est confirmé de manière lapidaire par la circulaire du 26 janvier 2017 de présentation des dispositions en matière de divorce par consentement mutuel et de successions : « le nouveau divorce par consentement mutuel extrajudiciaire n’est pas un divorce optionnel. ».

En clair, dans le cas où les époux s’accordent sur le principe de la rupture du lien conjugal et l’ensemble des conséquences du divorce, la voie judiciaire du divorce par consentement mutuel leur est fermée à jamais, sauf dans les deux cas exhaustifs prévus par l’article 229-2 du Code Civil, à savoir, si le mineur, informé par ses parents de son droit à être entendu par le juge demande son audition par le juge ou dans le cas où l’un des époux se trouve placé sous l’un des régimes de protection.

Cependant, les rouages apparemment bien huilés de ce produit made in France qu’est le divorce sans juge commencent, deux ans après son lancement officiel, à donner des signes d’essoufflement.

Effectivement, se séparer vite n’équivaut pas forcément à se séparer bien.

Qu’en est-il si l’un des avocats manque à son devoir de Conseil et agit sciemment au détriment de son client, le laissant dans l’opacité la plus totale quant à ses droits ?

Qu’en est-il si l’époux lésé découvre le pot-aux-roses ultérieurement à l’homologation ? Doit-il pour autant se satisfaire d’une convention conclue en violation de ses droits les plus élémentaires ?

Fort heureusement, tel n’est pas le cas. Comme chaque médaille à son revers, la mise en œuvre du divorce extrajudiciaire donne aussi lieu à l’éclosion d’un nouveau contentieux de masse qui n’en est aujourd’hui qu’à son balbutiement : la remise en cause des effets de la convention de divorce.

Le raisonnement relève de la logique la plus élémentaire : le divorce conventionnel étant une rupture contractuelle, c’est au droit commun des contrats, et donc au TGI, que revient l’honneur de traiter l’épineuse question relative à la remise en cause des effets du divorce.

C’est une bonne chose, le Code Civil étant pourvu de tous les instruments juridiques permettant d’annuler une convention qui aurait été conclu par un époux dont le consentement, pour une raison ou pour une autre aurait été lésé.

Comme le prévoit l’article 2268 du code civil de façon légèrement utopique, la bonne foi est toujours présumée. Il appartient au Conseil de la partie lésée la lourde tâche de la démontrer en usant de toutes les preuves à sa disposition (par exemple, montage financier occulte ou omission de certains éléments opportuns dans l’état liquidatif afin d’amoindrir le coût financier du divorce).

Pas question pour autant de toucher au principe de la rupture du mariage, ce qui implique, de façon logique, que la nullité se limite aux clauses fixant les effets du divorce.

On attend avec impatience que le Tribunal de Grande Instance rende sa copie afin de savoir si, oui ou non, il est possible d’annuler les effets d’une convention de divorce extra-judiciaire, sans pour autant remettre en cause le principe de la rupture.

Le cas échéant, on ne pourra que considérer que le JAF a encore de beaux jours devant lui, et que, par voie de conséquence, le divorce extra judiciaire doit être retiré des rayons pour ne pas avoir tenu ses promesses.