Procès ou Médiation : Toute l’importance de bien choisir en amont
La survenance d’un différend, que ce soit dans le cadre de notre activité professionnelle ou à titre personnel est toujours source de désagrément, voire de stress et de déconvenue auxquels il faut faire face, mais comment ?
Lorsque les tentatives de négociations ont échoué, d’autres options sont envisageables, dont le procès, et la médiation que nous allons essayer de départager.
Tout le monde sait ce qu’est un procès ; peut-être un peu moins ce qu’est exactement la médiation, souvent confondue avec d’autres mécanismes. Il s’agit d’un mode amiable qui permet d’arriver à une solution là où la négociation a échoué, grâce à tout un process et à l’intervention d’un professionnel formé à cet effet (le médiateur).
La médiation repose sur l’accord des parties. Il ne sera jamais rien imposé en médiation. Vous conservez ainsi une totale maîtrise et échappez à l’aléa judiciaire. Vous vous assurez d’une solution qui vous convienne parfaitement (le but étant de trouver un accord satisfaisant pour tous).
Le processus de médiation est en outre entièrement couvert par la confidentialité, et permet généralement une solution en 3 à 4 mois, contre souvent plusieurs années pour un procès.
Ainsi, lorsque vous choisissez la voie amiable, ce n’est pas parce que vous avez un mauvais dossier mais parce que vous souhaitez vous assurer de la meilleure solution possible.
- Les points communs :
Le procès, comme la médiation, obéissent à un cadre strict, qui permet de garantir une certaine sécurité juridique et le respect des droits de tous.
Dans les deux cas, un tiers neutre, indépendant et bénéficiant d’une solide formation pour accomplir sa mission interviendra : le juge ou le médiateur.
Dans les deux cas l’exécution de la solution qui sera donnée (ou trouvée) sera assurée au besoin par l’apposition de la formule exécutoire (c’est le cas pour toute décision de justice, mais également pour tout accord de médiation rédigé par acte contresigné d’avocat, ou encore sur tout accord soumis à homologation du juge) ; Cela permettra à chacune des parties d’obtenir une exécution forcée en cas de besoin.
Face à ces garanties similaires, que faire ? Saisir un Tribunal afin qu’un juge tranche le litige, en application des lois applicables, ou saisir un médiateur, qui vous aidera à renouer le dialogue afin de vous permettre de rechercher et construire ensemble une solution qui conviendrait à chacun ?
Il n’existe pas de réponse unique ; les spécificités de chaque litige devront être prises en compte afin de déterminer l’option la plus opportune pour préserver vos intérêts.
Ce choix n’est pas définitif ; il est toujours possible de saisir les tribunaux pour ensuite s’orienter vers une médiation, et inversement. Pour autant, choisir au plus tôt la voie la plus adaptée est un gage de réussite supplémentaire ; cela permet une optimisation du temps et du coût ; en outre il peut être plus compliqué de trouver une solution amiable après s’être « écharpés » devant les tribunaux.
Pour choisir, il est important de vous poser certaines questions, avec l’aide de votre Avocat qui connait la loi applicable et la jurisprudence, et dont le rôle est de vous orienter vers la voie la plus opportune pour vous.
Vous devez analyser objectivement les chances de succès d’une procédure, quels sont les risques d’arguments sérieux en face, puis vous interroger sur les implications du procès : quel délai, quel coût, quelle incidence sur votre quotidien ? Une fois ce travail préalable effectué, faites de même avec la médiation.
La pratique a permis de dégager certains critères objectifs pour vous aiguiller ; attention néanmoins, il ne s’agit que de pistes de réflexions ; la question doit toujours être réfléchie au cas par cas, sans qu’il n’existe de réponse absolue.
Si vous avez une relation, professionnelle ou personnelle, avec votre adversaire et que vous devez continuer à interagir (fournisseur habituel, voisin, lien familial, dépendance économique…), une solution amiable est souvent plus opportune. Elle permettra de conserver cette relation dont vous avez besoin, et éviter la multiplication des procédures, quand le procès risque d’accentuer la mésentente et être source de nouveaux litiges.
De même, les tribunaux ne pouvant apporter qu’une solution purement juridique, pour les litiges à fort contenu émotionnel (litiges familiaux, ou entre associés), un jugement ne résoudra pas la réelle cause du conflit, avec le risque là encore de procès en cascades.
Le besoin de confidentialité est également un critère important puisque les audiences sont, généralement publiques. En revanche, le processus de médiation étant couvert par la confidentialité, vous ne créerez aucun antécédent auprès du juge, et évitez de voir le problème s’ébruiter auprès de vos fournisseurs/ clients/ concurrents…
L’éventuelle difficulté d’exécution de la solution à venir est également importante : le jugement imposant une solution, la partie perdante ne s’exécutera que rarement spontanément, contraignant son adversaire à exposer des frais de recouvrement forcée, avec les délais supplémentaires que cela entraine et l’incertitude quant au résultat, tandis que l’accord de médiation étant librement accepté, son exécution sera bien plus aisée puisque volontaire.
Enfin, la disproportion par rapport aux enjeux est également un critère : contrairement aux idées reçues la médiation peut s’avérer bien moins onéreuse qu’un procès : elle permet d’aboutir à une solution plus rapidement, et généralement plus pérenne.
En outre, le procès s’accompagne de frais incompressibles (avocat devant le tribunal, puis devant la Cour, commissaires de justices, éventuels experts…) qui seront d’autant plus important que la procédure durera.
De plus, depuis 2012, toute partie à un procès en appel doit s’acquitter d’un timbre fiscal de 225 € (hors rares exceptions). Plus encore, depuis le 1er janvier 2025, la compétence de 12 tribunaux de commerce a été élargie à certains litiges qui relevaient jusqu’alors du Tribunal judiciaire ; ces 12 tribunaux sont devenus des Tribunaux des activités Economiques (TAE).
Or, la saisine du TAE est soumise au paiement d’une contribution pour la justice économique, d’un montant non négligeable : 3 à 5% du montant du litige pour les sociétés et 1 à 3 % pour les personnes physiques. Le décret prévoit néanmoins que si les parties trouvent un accord en cours de procédure, cette contribution sera remboursée. [1]
La Cour d’appel de Grenoble, et donc l’ensemble des tribunaux de son ressort (Isère, Drôme Ardèche, Hautes-Alpes), a repris ces critères objectifs.
Dans chaque dossier, le tribunal saisi peut proposer une médiation aux parties.
Aussi, effectuer le travail en amont, vous permet de vous orienter directement vers la médiation si elle semble utile, plutôt que d’attendre qu’elle vous soit proposée par le Tribunal.
Enfin, il ne faut jamais négliger le pouvoir de nuisance de votre adversaire, et il faut prendre en compte les effets du procès, qui exacerbent nécessairement les tensions.
Ainsi, à titre d’exemple en cas de conflit entre associés, la médiation permet de prendre en compte leur intérêt commun en dépit de tous leurs différends : leur société. Une médiation permettra de rétablir le dialogue, soit pour résoudre le problème et leur permettre ainsi de poursuivre ensemble, soit a minima pour trouver une solution dans laquelle la société ne sera pas sacrifiée. Les protagonistes pourront évoquer toutes les questions à régler dans le cadre de la médiation et ainsi trouver une réponse à tous les problèmes.
En revanche, en cas de procès les associés, accaparés par leur conflit, oublieront souvent les intérêts de leur société, dont la gestion se trouvera alors bloquée.
En outre le juge ne pourra que trancher le différend juridique précis qui lui est soumis, ce qui ne résoudra pas nécessairement les problèmes de gestion et les besoins de la Société si elle survivait.
Inversement, en cas de litige simple, avec une cause identifiée, entre parties qui n’auront pas à se revoir, un procès peut être plus efficace. Ainsi, un créancier impayé devrait obtenir satisfaction rapidement devant le juge des référés en l’absence de contestation sérieuse.
Pareillement, si vous avez besoin d’une réponse juridique claire (ne serait-ce que pour pouvoir vous positionner par la suite), la saisine du tribunal sera la meilleure option (avec néanmoins le risque de créer un précédent à prendre en compte).
En résumé, pour choisir utilement entre procès et médiation, le pragmatisme doit vous guider : au-delà de la question juridique, en prenant en compte toutes les conséquences de chacune des options, quelle serait la meilleure réponse ?
[1] Décret 2024-1225 du 30/12/2024
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