Les insectes xylophages et champignons lignivores peuvent occasionner des dégâts importants pouvant mettre en péril la solidité des bâtiments dont la structure est en bois et notamment, la charpente, les solives des planchers ou encore, l’ossature des façades.
Un insecte xylophage (termite, capricorne, lyctus, vrillette, charançon du bois, abeille charpentière) se nourrit notamment de bois tandis qu’un champignon lignivore (mérule, coniophore des caves, polypore des caves) se développe au contact de bois humide et se nourrit de ce bois.
Certaines régions, plus touchées que d’autres par ces parasites du bois, imposent que soit réalisé un diagnostic au moment de la vente d’un bien immobilier.
Le diagnostic termites doit être réalisé lorsqu’un logement est situé dans une zone déclarée infestée ou à risque par arrêté préfectoral.
La Loi ALUR n°2014-366 du 24 mars 2014 a également rendu obligatoire la réalisation d’un diagnostic mérule dans certaines villes, sur arrêté préfectoral, lors de la vente d’un bien immobilier (article L.133-9 du Code de la Construction et de l’Habitation).
Actuellement, le diagnostic mérule est obligatoire au moment de la vente dans certaines villes de certains départements, dont la liste s’est allongée depuis 10 ans. Treize départements sont à ce jour l’objet d’arrêtés préfectoraux listant des parcelles cadastrales de certaines villes dans lesquelles le mérule a été détecté.
Enfin, en présence de traces suspectes, après un ancien traitement des bois ou encore, dans une zone à risque et particulièrement humide, le vendeur et/ou l’acquéreur peuvent prendre l’initiative de faire réaliser un diagnostic termites, un diagnostic mérule ou encore un diagnostic de l’état parasitaire visant à détecter la présence de tous les parasites du bois, même si ce diagnostic n’est pas obligatoire.
En cas de découverte de dommages causés par des parasites du bois, antérieurs à la vente mais dont l’acquéreur n’avait pas connaissance, ce dernier dispose, à certaines conditions, d’un recours contre le vendeur (I) et le diagnostiqueur (II).
I. LA RESPONSABILITE DU VENDEUR.
1. La découverte après la vente d’une infestation par des parasites du bois – ancienne ou active - et des dégradations causées par celle-ci constitue, pour l’acquéreur, un vice caché.
Cela suppose qu’aucun diagnostic n’ait été réalisé, ou que ce diagnostic comportait une ou plusieurs erreurs.
Ce vice caché ouvre droit à indemnisation, sous certaines conditions, en fonction du fondement juridique invoqué au soutien de la demande de l’acquéreur.
2. Il est courant d’invoquer, en premier lieu, la garantie des vices cachés issue de l’article 1641 du Code Civil disposant :
« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. »
Si le vendeur est un professionnel de l’immobilier ou de la construction comme un marchand de biens, les travaux à réaliser pour réparer les bois détériorés et traiter l’infestation sont garantis car il pèse sur ces vendeurs professionnels une présomption irréfragable - que rien ne peut renverser - de connaissance des vices cachés.
Ce sinistre est en règle générale couvert par l’assurance de responsabilité civile professionnelle du marchand de biens.
Si le vendeur n’est pas un professionnel de l’immobilier ou de la construction, ou que l’acquéreur en est un, la garantie des vices cachés ne pourra pas être mobilisée s’il est stipulé à l’acte de vente, à l’article relatif à de l’état du bien, une clause élusive ou limitative de garantie des vices cachés.
Cette clause est mentionnée de manière quasiment systématique dans les actes notariés. Elle est parfaitement licite car autorisée par l’article 1643 du Code Civil.
Son application est toutefois écartée si le vendeur a sciemment dissimulé le vice caché dont il avait connaissance et dont il n’avait, volontairement, pas informé l’acquéreur.
En matière de dégradation des bois par des parasites, il est souvent difficile de démontrer qu’ils étaient présents avant la vente, les diagnostics n’étant d’ailleurs valables que 6 mois.
Au-delà du délai de 6 mois après la vente, l’acquéreur ne pourra rapporter la preuve de l’antériorité de l’infestation avant la vente qu’avec l’avis d’un Expert Judiciaire.
L’Expert Judiciaire aura pour mission de donner un avis sur l’époque de l’apparition de l’infestation, après avoir examiné ses caractéristiques et surtout, son étendue et sa profondeur (si le cœur du bois et non simplement l’aubier est atteint).
3. L’acquéreur peut également invoquer le dol issu de l’article 1137 du Code Civil, lequel est l’erreur provoquée par le mensonge du vendeur. Sur le fondement du dol, l’acquéreur peut demander la nullité de la vente et / ou le versement de dommages et intérêts.
L’acquéreur devra là encore démontrer que le vendeur avait connaissance de l’infestation des bois par des parasites (anciens ou actuels et actifs), et qu’il a volontairement dissimulé cette information à l’acquéreur afin de l’inciter à conclure la vente en méconnaissance d’une information qu’il savait déterminante sur son contentement à la vente ou au prix de vente.
Enfin l’acquéreur peut invoquer le manquement du vendeur à son devoir d’information, issu de l’article 1112-1 du Code Civil, pour demander le versement de dommages et intérêts équivalents au coût des travaux de désinfestation et traitement des bois.
4. La Jurisprudence a ainsi retenu la responsabilité du vendeur à l’égard de l’acquéreur en présence d’une infestation par des parasites du bois :
-
insectes xylophages, tels des termites ou des capricornes :
-même si l’acquéreur n’avait pas visité ou fait vérifier l’état de la charpente infestée par les parasites du bois avant la vente
Cass. ass. plén., 27 oct. 2006, n° 05-18.977, n° 545 P + B + R + I
-et ce, « que la colonie d’insecte soit active ou non. »
Cass.3ème civ. 8 avril 2009, pourvoi n°08-12.960
-
mérule.
Cass. 3e civ., 17 févr. 1988, n° 86-15.031 : Bull. civ. III, n° 38.
II. LA RESPONSABILITE DU DIAGNOSTIQUEUR.
1. Les diagnostics termites ou parasitaires doivent être établis par un diagnostiqueur certifié et assuré.
La responsabilité du diagnostiqueur élaborant un diagnostic termites, mérules ou autre état parasitaire s’analyse à la lumière des normes encadrant la réalisation de sa mission, à l’instar du diagnostiqueur amiante par exemple.
Ces Normes définissent ce à quoi ils sont obligés et ce à quoi ils ne sont pas tenus.
2. Aux termes de l’article R. 133-7 du Code de la Construction et de l’Habitation, le diagnostiqueur doit préciser :
- les zones visitées ou non – et dans ce dernier cas, d’une part, donner les raisons pour lesquelles il n’a pu accéder aux zones non visitées et d’autre part, conseiller des investigations complémentaires,
- les zones d’infestation anciennes ou actives et celles qui ne le sont pas.
Les constats doivent porter sur toutes les parties apparentes et accessibles (ossature bois, charpente, plancher, etc.).
Sur un immeuble bâti isolé, il est d’usage pour les diagnostiqueurs d’étendre leurs constats aux abords immédiats non bâtis de la construction afin de déceler une infestation potentielle ou en cours.
3. La responsabilité du diagnostiqueur n’est pas engagée ipso facto si le rapport a conclu à l’absence d’infestation ancienne ou active par des parasites du bois, tandis que l’acquéreur a découvert des dégradations qui étaient contemporaines de la réalisation de son diagnostic.
Le Juge ne peut retenir la responsabilité du diagnostiqueur qu’en présence d’une faute du professionnel dans l’accomplissement de sa mission, au regard des diligences réalisées pour repérer les parasites du bois.
Concrètement, le Juge retiendra la responsabilité du diagnostiqueur s’il n’a pas respecté le repérage prévu par la Norme, mais également, s’il relève :
- que ses recherches ont été insuffisantes,
Cass. civ. 3, 30 juin 2016, n° 14-28.839, FS-P+B
- que son rapport était imprécis,
Cass. civ. 3, 19 mai 2016, n° 15-12.408
- que ses relevés étaient inexacts.
Cass. civ. 3, 7 avril 2016, n° 15-14.996, FS-P+B
Les juges exigent notamment que les diagnostiqueurs mettent en œuvre tous les procédés nécessaires à l’exercice de leur mission d’information, y compris ceux non détaillés par les Normes applicables.
Dès lors, le diagnostiqueur ne peut se contenter de démontrer qu’il a agi dans le respect des dispositions réglementaires pour s’affranchir de sa responsabilité à la suite de la délivrance d’un diagnostic erroné.
Depuis un arrêt rendu par la Cour de Cassation le 8 décembre 2016, en cas d'information erronée sur l'étendue de l'infestation d'insectes dans le bien vendu, l’acquéreur peut obtenir la condamnation du diagnostiqueur à la réparation intégrale de ses préjudices, c’est-à-dire, au paiement de l'intégralité du coût des travaux de réparation à réaliser.
Cass. Civ 3ème. 8 décembre 2016 n° 15-20.497
La Cour de Cassation a retenu par cet arrêt que le dossier de diagnostic technique annexé à l'acte de vente permet d'informer l'acquéreur de la présence de termites dans l'immeuble, et que, par suite, les préjudices liés à la présence de termites non mentionnée dans l'attestation destinée à informer l'acquéreur revêtent un caractère certain.
« Mais attendu … que les constatations du diagnostiqueur selon lesquelles il n'avait repéré aucun indice d'infestation de termites ni d'autres agents de dégradations biologiques du bois étaient erronées puisque l'expert judiciaire avait conclu à des attaques anciennes et récentes de capricorne et vrillette de la structure de la maison ayant causé des dégâts irréparables mettant en péril la solidité du bâtiment et que le diagnostiqueur n'avait pas visité les combles qui étaient accessibles ni mentionné que les planchers et le parquet du séjour et de la chambre étaient attaqués par les vrillettes alors qu'ils n'étaient pas cachés par des revêtements et retenu que le diagnostiqueur avait ainsi commis une faute engageant sa responsabilité … la cour d'appel a pu déduire … que la société ESI devait être condamnée au paiement du coût des travaux nécessaires et à l'indemnisation du préjudice de jouissance qui constituaient des préjudices certains… »
Cass. Civ 3ème, 7 mars 2019, 17-31.080.
4. Par ailleurs, en raison de la rapidité des infestations, les diagnostics ne sont valables que 6 mois.
L’acquéreur ayant découvert – après ce délai de 6 mois – des dégradations anciennes ou actives par des parasites du bois, pourra tout de même engager la responsabilité d’un diagnostiqueur ayant conclu à l’absence de toute infestation dans son diagnostic, en rapportant la preuve – là encore, par l’avis donné par un Expert Judiciaire – que l’infestation était présente à l’époque du diagnostic.
L’Expert Judiciaire pourra déduire l’antériorité de l’infestation de l’importance – c’est-à-dire, l’étendue, la profondeur - des dégâts causés par le parasite du bois.
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