La Cour administrative d'appel de Paris a annulé, par arrêt en date du 3 mars 2023 (n°22PA04811), la subvention accordée par le Conseil de Paris à l'association SOS Mediterrannée sur le fondement de l'article L. 1115-1 du Code général des collectivités territoriales, qui permet aux Collectivités territoriales françaises d'accorder leur concours, notamment, à des associations humanitaires, mais seulement dans le respect des engagements internationaux de la France.

La particularité de cette décision est qu'elle analyse à la fois la position de l'association subventionnée au regard des engagements internationaux de la France, ainsi que la position du Conseil de Paris, telle qu'elle résulte de la délibération attaquée décidant de la subvention.

Les différents tribunaux administratifs s'étant déjà prononcés sur cette même question n'avaient pas poussé aussi loin dans leur contrôle des délibérations, et n'avaient statué qu'eu égard à l'objet social de l'association SOS Méditerranée (TA Montpellier, 19 octobre 2021, n°2003886 ; TA Toulouse, 22 septembre 2022, n°2004735 ; TA Toulon, 19 octobre 2022, n°2012829).

Il est en effet incontestable que l'objet social de cette association a un caractère humanitaire, dès lors qu'elle se fixe pour objectif de "sauver la vie des personnes en détresse, en mer Méditerranée" selon ses statuts et que les faits démontrent qu'elle procède bien ainsi.

La CAA de Paris va tout de même plus loin dans son analyse et estime que la "collectivité territoriale ne saurait [...] méconnaître les engagements internationaux de la France ni, en attribuant une subvention, prendre parti dans un conflit ou un différend international de nature politique ou interférer dans la conduite de la politique extérieure de la France constitutionnellement réservée à l'Etat" (arrêt, cons. n°3).

Elle relève ainsi, d'une part, que "les responsables de l'association ont, aussi, publiquement critiqué, et déclaré vouloir contrecarrer par leur action, les politiques définies et mises en œuvre par l'Union européenne et les Etats membres en matière d'immigration..." et que, d'autre part, " le conseil de Paris a entendu s'approprier les critiques de cette association à l'encontre de ces politiques migratoires".

Elle en conclut que "le conseil de Paris doit être regardé comme ayant entendu prendre parti et interférer dans des matières relevant de la politique étrangère de la France et de la compétence des institutions de l'Union européenne, ainsi que dans des différends, de nature politique, entre Etats membres" (arrêt, cons. n°4) en soutenant cette association.

Les Collectivités territoriales, si elles peuvent agir à l'international, ne peuvent le faire que dans le respect de la politique étrangère menée par l'Etat.

Reste à savoir quelle serait la position du Conseil d'Etat s'il était saisi.

L'association SOS Méditerrannée ayant fait savoir qu'elle réfléchissait à se pourvoir en cassation contre cet arrêt, nous seront peut-être bientôt fixés, et la décision de la juridiction administrative suprême pourrait redistribuer les cartes de l'action internationale des collectivités territoriales, notamment en ce que ces dernières devront, si le Conseil d'Etat suit l'arrêt de la CAA de Paris, s'assurer que les actions de l'association subventionnée ne les engageraient pas contre la politique étrangère menée par la France.