Erreur médicale – épisiotomie – réclamation préalable – autorité de chose jugée – nouveaux préjudices

 

Dans cette affaire, une patiente avait donné naissance, le 12 février 2006 au centre hospitalier Laënnec de Creil, à son second enfant, né par voie basse, après épisiotomie et utilisation des forceps de Suzor accompagné d'une expression utérine vigoureuse exercée par la sage-femme. Les suites de l'accouchement ont été marquées par un œdème périnéal, l'apparition d'hémorroïdes et des fuites urinaires. Une cystomanométrie réalisée le 28 septembre 2006 a mis en évidence une instabilité vésicale majeure nécessitant un traitement par anticholinergique. En mars 2008, une neuropathie d'étirement séquellaire à un accouchement traumatique et une rectocèle de grade II-III profonde ont été diagnostiquées. Mme A... a adressé le 14 avril 2008 une réclamation préalable au centre hospitalier Laënnec de Creil, qui l'a rejetée par une décision du 3 juin 2010.

 

Par la suite la commission de conciliation et d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux avait été saisie et avait tout à la fois retenu la responsabilité du centre hospitalier et l’absence de consolidation de l'état de la victime.

 

L'assureur du centre hospitalier puis l'Oniam avaient refusé de formuler une offre d'indemnisation de sorte que la victime avait saisi le tribunal administratif pour la liquidation d'un certain nombre de postes de préjudice auxquels cette juridiction avait fait droit.

 

Son état de santé n'étant pas consolidé à la date de saisine de la juridiction, la victime avait par la suite ressaisi la commission de conciliation puis le tribunal administratif lequel étonnamment avait refusé de faire droit à ces nouvelles demandes indemnitaires au motif de l'autorité de choses jugées issues du précédent jugement.

 

La cour administrative d'appel de Douai par cet arrêt du 16 mai 2023 infirme le jugement au motif que « 3. L'autorité relative de la chose jugée ne peut être utilement invoquée en l'absence d'identité d'objet, de cause et de parties.

4. L'autorité de chose jugée attachée au jugement rendu sur une demande indemnitaire porte sur l'ensemble des chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages invoqués par la victime, causés par le même fait générateur et dont elle supporte la charge financière, à l'exception de ceux qui, tout en étant causés par le même fait générateur, sont nés, se sont aggravés ou ne se sont révélés dans toute leur ampleur que postérieurement à la première réclamation préalable de la victime ou de ceux qui ont été expressément réservés dans sa demande.

 

par un jugement du 16 octobre 2014 devenu définitif, le tribunal administratif d'Amiens a condamné le centre hospitalier Laënnec de Creil, aux droits duquel est venu le GHPSO, à verser à Mme A... la somme de 1 360 euros au titre des souffrances endurées et de l'incapacité temporaire partielle de 25 % pour la période du 12 février 2006 au 8 juin 2007 résultant des modalités d'exécution fautives de la manœuvre d'expression utérine réalisée lors de son accouchement qui lui avait fait perdre 40 % d'éviter les lésions périnéales dont elle est atteinte. Si l'intéressée a, par une réclamation du 24 janvier 2019, saisi le GHPSO d'une demande tendant à l'indemnisation de nouveaux postes de préjudices nés du même fait générateur, il résulte de l'instruction que ces préjudices ont été évalués après la consolidation de son état de santé fixé au 19 avril 2012 par le second expert désigné par la CCI de la région Picardie dans son rapport du 10 décembre 2012 et doivent, dès lors, être regardés comme ne s'étant révélés dans toute leur ampleur que postérieurement à la première réclamation préalable de Mme A... en date du 14 avril 2008 qui se fondait sur les conclusions du premier rapport d'expertise du 9 mai 2011 qui s'était borné à évaluer les souffrances endurées et le déficit fonctionnel temporaire sur une courte période. Dans ces conditions, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a estimé que l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement définitif du 16 octobre 2014 faisait obstacle à ce qu'il soit statué sur ses conclusions tendant à la condamnation du GHPSO à l'indemniser du déficit fonctionnel temporaire total pour la période du 18 au 22 avril 2012, du déficit fonctionnel temporaire partiel de 20 % pour la période du 9 juin 2011 au 19 avril 2012, des souffrances endurées, du déficit fonctionnel permanent, du préjudice esthétique permanent, du préjudice sexuel et du préjudice d'agrément imputables à la prise en charge fautive dont elle avait fait l'objet lors de son accouchement. »

CAA de DOUAI, 2ème chambre, 16/05/2023, 22DA00611, Inédit au recueil Lebon

 

Maître Vincent RAFFIN, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit médical et dommages corporels, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges.

 

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