Soc. 5 juin 2019, FS-P+B, n° 18-10.901

Résumé

L'assistance de l'employeur lors de l'entretien préalable à la signature de la convention de rupture ne peut entraîner la nullité de la rupture conventionnelle que si elle a engendré une contrainte ou une pression pour le salarié qui se présente seul à l'entretien.  

Par le présent arrêt du 5 juin 2019, la Cour de cassation poursuit son œuvre d'appréciation des conditions de validité de la rupture conventionnelle à l'aune de la protection du consentement des parties cocontractantes. Les articles L. 1237-11 et suivants du code du travail prévoient que les parties conviennent du principe de la rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels l'une et l'autre peuvent se faire assister.

De son côté, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit en l'absence de représentant du personnel dans l'entreprise par un conseiller du salarié.

De l'autre côté, l'employeur peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise soit, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, par une personne appartenant à son organisation patronale ou par un autre employeur relevant de la même branche. L'article L. 1237-12 ajoute que l'employeur peut exercer cette faculté que lorsque le salarié en fait lui-même l'usage et chaque partie doit informer l'autre qu'il sera assisté.

Le salarié s'était, en l'espèce, appuyé sur cette disposition pour soutenir l'irrégularité de la rupture conventionnelle tiré de ce déséquilibre lors de la signature. Déséquilibre qui, selon lui, vicierait automatiquement son consentement. La cour d'appel a validé la convention de rupture et a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La Cour de cassation rejette le pourvoi du salarié en considérant que le fait pour l'employeur d'être assisté durant l'entretien préalable à la signature de la convention de rupture ne pouvait entraîner la nullité de la rupture conventionnelle que si le salarié se présentant seul a subi une contrainte ou une pression, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

Cette décision s'inscrit dans sa ligne jurisprudentielle relative à l'appréciation des conditions de validité de la rupture conventionnelle. En effet, la Haute juridiction a déjà jugé que le défaut d'information du salarié sur la possibilité d'avoir recours à un assistant n'avait pas lui-même pour effet d'entraîner la nullité de la convention (Soc. 29 janv. 2014, n° 12-27.594, D. 2014. 376 ; RDT 2014. 255, obs. G. Auzero ; 19 nov. 2014, n° 13-21.207, Dr. soc. 2015. 206, chron. S. Tournaux ).

Finalement, le salarié ne peut pas obtenir automatiquement la nullité de la convention de rupture conventionnelle. Seule la caractérisation d'une contrainte ou une pression viciant le consentement est susceptible de rendre la rupture conventionnelle nulle.

Dans le même sens, la chambre sociale a jugé qu'il est possible de conclure une rupture conventionnelle avec un salarié dont le contrat de travail est suspendu pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle (Soc. 30 sept. 2014, n° 13-16.297, D. 2014. 2002 ; ibid. 2015. 104, chron. E. Wurtz, F. Ducloz, S. Mariette, N. Sabotier et P. Flores ; ibid. 829, obs. J. Porta et P. Lokiec ; RDT 2014. 684, obs. B. Lardy-Pélissier ; 9 mai 2019, n° 17-28.767, Dalloz actualité, 20 mai 2019, obs. W. Fraisse) ou encore pour cause d'un congé maternité (Soc. 25 mars 2015, n° 14-10.149, D. 2015. 808 ; ibid. 2016. 807, obs. P. Lokiec et J. Porta ; Dr. soc. 2015. 399, étude J. Mouly ). La règle est ainsi posée « sauf cas de fraude ou de vice du consentement, une convention de rupture conventionnelle peut être valablement conclue ».