Le titre est volontairement racoleur sinon provocateur mais l'histoire le mérite...

A l'occasion d'une banale altercation entre un surveillant et un détenu qu'aux mots succèdant aux maux sans toutefois qu'un médecin ne puisse désigner de vainqueur (zéro ITT de chaque côté) et qu'un témoin qualifiera de "chiffonnade" le surveillant décidait avec son syndicat de faire paraître un article dans la presse locale où il expliquait "qu'avec la protection statutaire accordée aux fonctionnaires afin d'être assisté juridiquement et dédommagé du préjudice subi... Il exigeait "la plus grande fermeté dans les décisions pénitentiaires et judiciaires à l'égard des détenus qui agressent ou insultent les surveillants... et se félicitait du soutien inconditionnel de la Direction de la Maison d'Arrêt".

En un mot, il criait vengeance.

Le procureur y prêtant une oreille attentive, décidait d'extraire mon client pour le placer quarante huit heures en garde à vue et lançait ses meilleurs enquêteurs interroger la victime bien sur et le professeur de gym qui n'avait rien vu évidemment.

Le surveillant expliquait que pour mettre un terme à un échange de mots doux, il s'était approché trop près de mon client et que pour "respecter une distance de sécurité il l'avait repoussé à deux reprises au niveau de son torse, ce qui l'avait déséquilibré et déclenché l'échange de coups.

Personne ne s'est interrogé sur le point de savoir pourquoi il n'avait pas fait simplement un pas en arrière, mais il est vrai qu'il reconnaissait lui-même avoir été très énervé ce matin là...Alors que l'examen de ce dossier aurait du aboutir, comme d'habitude, à la seule saisine de la Commission de Discipline qui au terme d'une parodie de procès aurait condamné mon client à quelques jours de mitard, avec ou sans sursis, le Procureur de la République décidait de renvoyer mon client devant le Tribunal Correctionnel dans le cadre de la procédure de comparution immédiate ce qui obligeait le Tribunal à statuer  dans un délai de six semaines.

A l'audience, je sollicitais un délai pour préparer ma défense en m'interrogeant sur ce que pouvait traduire le fait pour un surveillant à l'origine d'une chiffonnade de se reconnaître "énervé" et de vérifier si mon client comme il l'avait toujours affirmé, s'était retrouvé face au surveillant les mains dans le dos... Pour moi comme pour les magistrats la messe n'était pas dite et ils décidèrent de se rendre sur place collégialement pour entendre tous les témoins de cette affaire, et ont renvoyé l'examen de la poursuite du Procureur la veille du nouvel an.

Je venais d'envoyer des magistrats jouer les colombos au sein de la maison d'arrêt contre l'avis du procureur... Des magistrats et une greffière ont pris sur leur temps déjà compté pour faire respecter les droits de la défense...Entendre des détenus témoins de cette altercation que la direction de la maison d'arrêt n'avait pas cru devoir entendre...Noël avant l'heure...

Dès lors j'étais persuadé que face à ce constat des juges judiciaires de ne pouvoir en l'état juger mon client, la direction de la maison d'arrêt allait surseoir sinon renoncer à sanctionner disciplinairement mon client...Que nenni... Dès son retour mon client était placé à l'isolement disciplinaire à titre préventif (sic) ; Et le lendemain, la commission lui infligeait 35 jours de mitard fermes et exécutoires immédiatement... Histoire surement de rappeler aux futurs témoins qui était le chef...Le père Noël venait de déserter la prison...

Je multiplais alors les recours hiérarchiques et judiciaires devant le Tribunal Administratif pour voir sinon annuler du moins suspendre l'exécution de cette décision...Le juge des référés saisit sur la base du "référé liberté" (article 521.2 du CA) décidait "que la décision de la commission de discipline de la maison d'arrêt ne porte pas une atteinte grave et illégale ni à la liberté d'aller et venir du requérant ni à son droit à être entendu librement par les magistrats judiciaires...ni à son droit à un procès équitable" et sur la base du "référé suspension" (article 521.1 du CA) que "la modification temporaire du régime de détention qui résulte de son placement en cellule disciplinaire ne peut, en l'absence de circonstances particulières être regardées par elle même comme portant une atteinte suffisamment grave et immédiate à sa situation...Dès lors la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie" SIC...J'allais écrire LOL.

Je ne savais plus à quel juge me vouer lorsque j'ai reçu ce matin la décision du directeur régional de l'administration pénitentiaire qui faisait droit à mon recours hiérarchique et annulait la sanction pour "vice de forme lié à un élément de légalité externe" sans autre précision...

J'ai oublié de vous préciser que le transport sur place des magistrats pour entendre les témoins de l'altercation s'est réalisé au sein de la maison d'arrêt le 14 décembre et que la décision d'annulation est datée du 15 décembre... Mais seules les mauvaises langues y verront une relation;

La justice en prison ?...Mais vous croyez au père Noël ?