La clause de conciliation préalable « solliciter l'avis d'un expert » doit être interprétée comme la volonté des parties d'obtenir cet avis avant toute procédure judiciaire

 

Cour de cassation - Chambre civile 3

  • N° de pourvoi : 22-24.784
  • ECLI:FR:CCASS:2024:C300294
  • Non publié au bulletin
  • Solution : Rejet

Audience publique du jeudi 06 juin 2024

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, du 15 septembre 2022

Président

Mme Teiller (président)

Avocat(s)

SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 juin 2024




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 294 F-D

Pourvoi n° U 22-24.784




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 JUIN 2024

La société Architecture [Y] [S], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 22-24.784 contre l'arrêt rendu le 15 septembre 2022 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige l'opposant à la société MF Faliconnière 061, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Brun, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Architecture [Y] [S], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société MF Faliconnière 061, après débats en l'audience publique du 23 avril 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Brun, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 septembre 2022) et les productions, la société MF Faliconnière 061 (la société Faliconnière) a fait construire un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes et a, pour ce faire, confié la maîtrise d'oeuvre des travaux à un groupement dont faisait partie la société Architecte [Y] [S] (la société [S]).

2. Le contrat comportait la clause suivante : « En cas de litige portant sur l'exécution du présent contrat, les parties conviennent de saisir le tribunal compétent dans la juridiction de NANTES.Toutefois, les parties s'engagent à solliciter les avis d'un expert choisi d'un commun accord, avant toute action judiciaire. »

3. Après que les parties ont désigné un expert, la société [S], sans attendre que celui-ci rende son avis, a assigné la société Faliconnière en paiement d'honoraires. Celle-ci a soulevé l'irrecevabilité de la demande pour défaut de mise en oeuvre de la tentative préalable de règlement amiable prévue au contrat.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La société [S] fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable en ses demandes formées contre la société Faliconnière, alors :

« 1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ; qu'aux termes de l'article 23 « contestations et litiges » du contrat de maîtrise d'oeuvre, conclu entre la SNC MF Falicon 061 et la société d'architecture [Y] [S], les parties se sont engagées à solliciter l'avis d'un expert choisi d'un commun accord, avant toute action judiciaire ; qu'en l'absence de conditions particulières de mise en oeuvre, cette stipulation ne constituait pas un préalable obligatoire de conciliation ; qu'en décidant qu'il résultait de la lecture de l'article 23 du contrat que les parties ne pouvaient introduire une action judiciaire qu'une fois la procédure de conciliation menée à son terme, la cour d'appel a dénaturé la clause en question et violé le principe ci-dessus rappelé ;

2°/ que, subsidiairement, le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ; qu'aux termes de l'article 23 « contestations et litiges » du contrat de maîtrise d'oeuvre, les parties se sont seulement engagées à solliciter l'avis d'un expert avant toute action judiciaire ; qu'en décidant qu'il résultait de la lecture de l'article 23 du contrat que les parties ne pouvaient engager une action judiciaire qu'une fois l'avis de ce professionnel rendu, la cour d'appel a dénaturé la clause en question et violé le principe ci-dessus rappelé. »

Réponse de la Cour

5. En premier lieu, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que le moyen tiré du défaut de mise en oeuvre de la clause litigieuse, qui instituait une procédure de conciliation obligatoire à la saisine du juge, constituait une fin de non- recevoir.

6. En second lieu, la cour d'appel a retenu, par une interprétation nécessaire exclusive de dénaturation, que les termes « solliciter l'avis d'un expert » devaient être interprétés comme la volonté des parties d'obtenir cet avis avant toute procédure judiciaire, sauf à ce que la clause n'ait aucune portée en s'en tenant à ses termes littéraux.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Architecture [Y] [S] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300294

Publié par ALBERT CASTON à 16:10  

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