1° La compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS)  pour contester le rejet de la demande d’affiliation au régime de retraite complémentaire IRCANTEC opposé par l’employeur public secondaire.

Dans une décision en date du 15 juin 2015, le Tribunal des conflits rappelle que les litiges à caractère individuel qui peuvent s'élever au sujet de l'affiliation d'une personne à un régime de sécurité sociale relèvent de la compétence des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale.

Le Tribunal des conflits précise qu’il en va ainsi, même dans le cas où les décisions contestées sont prises par des autorités administratives, dès lors du moins que ces décisions sont inhérentes à la gestion, suivant des règles de droit privé, du régime de sécurité sociale en cause.

La haute juridiction ajoute  que les rapports entre les salariés et les employeurs qui ont trait aux obligations de ces derniers au regard d’une institution de prévoyance gérant un régime complémentaire de retraite, sont des rapports de droit privé.

Il suit de là que relève de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire la contestation du bien-fondé de la décision par laquelle le ministre de la défense a implicitement rejeté la demande en date du 29 avril 2011 par laquelle M. L. sollicitait son affiliation au régime général de la sécurité sociale et à l’IRCANTEC au titre des services accomplis par lui dans la réserve opérationnelle.

Le Tribunal des conflits décide que la juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du bien-fondé de la décision par laquelle le ministre de la défense a implicitement rejeté la demande en date du 29 avril 2011 par laquelle M. L. sollicitait son affiliation au régime général de la sécurité sociale et à l’IRCANTEC.

En conclusion, le jugement d’incompétence rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale d’Amiens, en date du 21 mai 2012, est déclaré nul et non avenu, la cause et les parties étant renvoyées devant ce même tribunal.

Tribunal des Conflits, , 15/06/2015, C4008, Publié au recueil Lebon 

Voir également :

Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 04 juillet 2016, n° 1405404 et n° 1405407

Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre , 19/12/2013, 12PA03684, Inédit au recueil Lebon

RAPPEL : L’administration a l'obligation, dès la date de sa prise de fonction de l’agent contractuel dans l’exercice de l’activité accessoire publique, d'assurer son immatriculation au régime de retraite complémentaire IRCANTEC en application des dispositions issues des articles 3 et 7 du décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970, et de verser les cotisations correspondantes.

Conseil d'Etat, 1 / 4 SSR, du 28 juillet 1999, 185343, mentionné aux tables du recueil Lebon

Depuis deux arrêts de la Cour de cassation du 12 février 2009 et du 30 juin 2011, les fonctionnaires titulaires (ou les militaires) qui ont exercé une activité relevant du régime de droit public (vacataire en collectivités locales par exemple), concomitamment avec leur activité principale d'agent public titulaire, peuvent se voir attribuer une retraite complémentaire de l'IRCANTEC

Dans un arrêt en date du 12 février 2009, confirmé par un arrêt du 30 juin 2011, la Cour de cassation précise qu'il résulte des dispositions de l'article 5 du décret n° 70-1277 modifié portant création d'un régime de retraite complémentaire des assurances sociales en faveur des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques :

« Qu’un agent d'une collectivité territoriale bénéficie du régime de retraite complémentaire qu'il institue dès lors qu'il n'est pas affilié, pour les mêmes services, au régime spécial de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales »

La Cour de cassation rappelle que constitue une discrimination le fait de traiter de manière différente, sans justification objective et raisonnable, des personnes placées dans des situations comparables. 

Ainsi, deux salariés affiliés au titre de leur emploi dans un même régime de sécurité sociale sont placés dans une situation comparable. 

Le fait de prendre en considération, pour restreindre le montant des droits à pension résultant de cette première activité, l'exercice parallèle d'une activité relevant d'un autre régime de sécurité sociale, constitue une discrimination prohibée par l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme, faute de justification objective et raisonnable. 

En affirmant, pour écarter toute discrimination, que la comparaison ne pouvait pas être opérée entre salariés affiliés au titre d'un même régime de sécurité sociale, mais uniquement entre salariés cumulant deux emplois relevant de deux régimes distincts de pension, la Cour d'appel a utilisé un critère de distinction inadéquat, violant ainsi l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel. 

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 12 février 2009, 08-11.762, Publié au bulletin

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 30 juin 2011, 10-20.049, Inédit

Désormais, l’Ircantec peut prendre en compte les activités accomplies en tant qu’agent non titulaire concomitamment à un emploi de fonctionnaire, qu’elles soient exercées, antérieurement ou postérieurement au 1er janvier 2005, sous réserve que ces activités n’aient pas été retenues par un régime spécial. 

Un arrêt de la 2ème Chambre civile de la Cour de Cassation du 6 novembre 2014, rappelle que l’exercice d’activités accessoires accomplies en tant qu’agent non titulaire concomitamment à un emploi de fonctionnaire titulaire territorial, hospitalier ou d’Etat relevant du régime de la CNRACL ou du CPCMR doit obligatoirement donner lieu à une affiliation pour cet emploi au régime Ircantec des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités.

Ces activités accessoires ne relèvent pas du champ d’application du régime de retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP). En l’espèce, un professeur territorial d'enseignement artistique de la ville de Paris, affilié à ce titre à la CNRACL, exerçait à titre accessoire, concomitamment à son emploi principal, une activité de professeur territorial d'enseignement artistique non titulaire, auprès de la communauté d'agglomération de la Plaine centrale du Val-de-Marne.

Il a donc obtenu la condamnation de la communauté d'agglomération de la Plaine centrale du Val-de-Marne à procéder à son affiliation à l’Ircantec. Cet arrêt de la Cour de cassation ne règle pas la question pour les vacations publiques à titre accessoire.

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 6 novembre 2014, 13-24.301, Inédi

2° La compétence du tribunal administratif (TA) pour contester le rejet de la demande de prise en charge par l’employeur public secondaire de la part salariale des cotisations et/ou d’indemnisation en réparation de sa carence fautive.

Dans sa décision n° C3420 du 29 décembre 2004, le Tribunal des conflits a précisé qu’une action dirigée contre des communes non fondée sur les droits que l’agent public sur activité accessoire  estimait tenir de sa qualité d’agent public par rapport au régime de retraite complémentaire l’IRCANTEC,  mais sur les carences fautives de ces collectivités territoriales qui ont conduit l’intéressé à débourser des sommes pour le compte de ses employeurs, est de la compétence de la juridiction administrative. La juridiction de l'ordre administratif est compétente pour connaître des conclusions de M. X tendant à la condamnation des communes à verser des dommages-intérêts correspondant au montant des cotisations sociales salariale à la charge de l’agent de l’agent.

Les articles L.142-1 à L.142-3 du code de la sécurité sociale attribuent compétence au tribunal des affaires de sécurité sociale pour connaître des litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale.

En ce qui concerne les fonctionnaires ou agents de l'Etat et des collectivités publiques, le critère de la compétence des organismes du contentieux de la sécurité sociale est lié, non à la qualité des personnes en cause, mais à la nature même du différend.

Toutefois, en l'espèce, l'action en réparation dirigée contre les communes n'est pas fondée sur les droits que le requérant estimait tenir de sa qualité d'assuré social, mais sur les carences fautives des collectivités territoriales qui l'avaient employé en omettant de l'affilier aux régimes obligatoire et complémentaire de sécurité sociale pour les agents non titulaires de l'Etat et des collectivités territoriales, carences qui ont conduit l'intéressé à débourser des sommes pour le compte de ses employeurs. Un tel  litige relève par nature de la compétence des juridictions de l'ordre administratif.

Tribunal des Conflits, , 29/12/2004, C3420, Publié au recueil Lebon

Tribunal des Conflits, 30 avril 2001, , T. p. 874.

Conseil d’Etat, 28 juillet 1999, , T. p. 700.  

RAPPEL : l’administration est tenue de régler l’intégralité des cotisations rétroactives indépendamment de toute éventuelle discussion sur la charge finale des cotisations salariales.

Si l’article R.351-11 du code de la sécurité sociale relatif à la régularisation des cotisations pour les périodes antérieures à l’entrée en jouissance de la pension, dispose que : « le versement des cotisations est effectué par l’employeur. Toutefois, en cas de disparition de l’employeur ou lorsque celui-ci refuse d’effectuer le versement, l’assuré est admis à procéder lui-même au versement », pour le régime complémentaire de retraite IRCANTEC, les textes réglementaires organisant ce régime ne prévoient pas de modalités de régularisation des cotisations rétroactives, au cas où l’employeur public s’est abstenu d’affilier son agent. 

Cependant, la jurisprudence administrative s’est prononcée sur la responsabilité des employeurs publics en la matière. 

Ainsi, dans une décision n° 334197, du 14 novembre 2011, statuant sur la situation d’un vétérinaire qui avait accompli pour l’État, dans le cadre d’un mandat sanitaire, des actions de prophylaxie, le Conseil d’État a considéré que celui-ci avait droit au remboursement de l’ensemble des cotisations, patronales et salariales, qu’il allait devoir acquitter en lieu et  place de l’État, en application de l’article R. 351-11 du code de la sécurité sociale. 

Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 14/11/2011, 334197, Inédit au recueil Lebon

En outre, statuant dans le cadre de l’obligation de reconstituer les droits sociaux d’un agent public dont l’éviction illégale du service avait été annulée, le Conseil d’État a considéré, par une décision n° 324474 du 23 décembre 2011, publiée au recueil Lebon, que, «sauf à ce  que  l’agent  ait  bénéficié  d’une  indemnité  destinée  à  réparer  le  préjudice  matériel  subi incluant les sommes correspondantes, il incombe à l’administration de prendre à sa charge  le versement de la part salariale de ces cotisations, au même titre que de la part patronale».

Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 23/12/2011, 324474, Publié au recueil Lebon

Enfin, il faut rappeler que dans son jugement du 29 novembre 2012, passé en force de  chose jugée, le tribunal administratif de Paris a clairement affirmé que le refus de procéder au paiement de la part salariale des cotisations auprès de la CNAV et de l’IRCANTEC constituait une faute engageant la responsabilité de l’État, insistant sur le fait que « les rémunérations perçues par Monsieur B en qualité de médecin agréé auprès des commissions départementales du permis de conduire n’incluaient pas, ainsi qu’il a été dit précédemment, la part salariale des cotisations sociales, lesquelles sont à la charge de l’État ».