Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs du Tribunal,

Le proverbe nous dit : "Quand le vin est tiré, il faut le boire."

Les faits dont vous êtes saisis aujourd'hui sont caractérisées mais encore reconnus ab initio par mon Client. Vous entrerez en voie de condamnation à son égard.

Ceci étant, je dois vous expliquer son parcours parce qu'il est manifestement peu ordinaire et qu'au travers des questions que je lui ai posées, vous avez eu l'occasion de cerner ce qu'il en était.

Au vu de ce dossier et des faits rapportés, on aurait pu croire à une violence insensée et inédite qui a sans nul doute conduit le Parquet à vous saisir. Il n'en est rien.

Mickael avait un projet sur ce terrain. Ce terrain de la Mairie. Il devait créer une association et la Mairie devait lui confier ce terrain. Rien n'était encore écrit mais Mickael travaillait, construisait ce terrain de bosses pour permettre à ses sociétaires de faire du vélo depuis un an. Un an sur un projet bâti en confiance avec des partenaires institutionnels.

Mickael s'était investi. Doublement même car c'est dans son histoire personnelle que se trouve la réponse que vous recherchez à l'examen de son dossier.

Les parents de Mickael se sont séparés il y a 13 ans. Mickael a vécu chez sa mère avec deux de ses trois soeurs. Sa mère vivait des allocations. Déjà à 9 ans, il n'avait pas nécessairement de quoi manger chaque jour à sa faim.

Les services sociaux suivaient la famille jusqu'où jour où le père de Mickael est appelé. Ce sera soit chez lui, soit le foyer. Mickael ira chez son père. Son père me dira :"Lorsque j'ai repris Mickael, il ne dormait pas forcément toutes les nuits mais surtout il mangeait dans l'idée de ne pas pouvoir manger le lendemain ou le jour d'après".

Mickael a décroché à sa majorité un CAP Cuisine. Puis...

Puis il est retourné auprès de sa mère, pour l'aider : complexe du sauveur.

Il a travaillé. Mais la réalité de son passé auprès de sa mère est redevenue ce faisant son présent. Les disputes, son incapacité à s'occuper de ses enfants, l'absence de repas.

Ces années durant, Mickael s'était consolé. Et c'est ce que le Tribunal aujourd'hui doit savoir pour statuer.

Son refuge, son repaire, c'était le vélo. Il m'expliquera : "Le vélo, il faut beaucoup d'adresse, beaucoup de concentration, c'est fatiguant et apaisant".

Aussi, s'il est majeur, c'est un enfant que vous jugez aujourd'hui.

Aussi, quand les plaignants ont saccagé les fruits de son travail acharné d'une année, ont détruit son projet, son imminence du bonheur, il vous dira, il me dira : "J'ai vu noir"

C'est toute la souffrance de sa vie qui est sortie, tous les mots qu'il n'a pas dits des années durant qui ont franchi ses lèvres ce jour-là.

Mickael me dira : "J'espère qu'ils comprendront..."

"Ils le peuvent", lui ai-je répondu.

Mickael n'aurait jamais dû revenir auprès de sa mère. Aussitôt après les faits, son père est venu le chercher. Il vit chez lui. C'est certain que Mickael doit rester loin de la souffrance que lui insuffle sa mère. Auprès de son père, il apprend. Il apprend que rien n'est dû et qu'il doit travailler pour obtenir ce qu'il veut. La vie de Mickael aujourd'hui qu'il a 22 ans se noue et peut aussi se dénouer.

A ce titre, un travail d'intérêt général serait amplement suffisant pour lui faire comprendre la leçon. Mickael est autant intelligent qu'il est sensible. Un travail d'intérêt général, un sursis simple suffiraient à engager sa responsabilité pénale et donc le condamner à réparer. Ce que n'élude pas Mickael.

Ceci étant, Mickael n'a pas de fortune.

Si la partie civile justifie d'un dommage matériel à hauteur de 300 euros, le préjudice moral n'est pas établi. Le certificat médical ne faisant pas état d'une ITT.

Aussi les demandes de la partie civile me paraissent excessives mais surtout non justifiées.

Rien ne permet d'établir ni l'existence d'un suivi psychologique, ni les frais occasionnés à ce moment, ni depuis.

Je conclus à la plus grande compréhension et donc indulgence du Tribunal.

Une condamnation symbolique suffirait à réparer les victimes dans la limite de leurs préjudices justifiés et imputables aux gestes et paroles de Mickael.

Instantanés de Palais, 30.07.2020