Note sous Cour de cassation, chambre commerciale, 10 juillet 2024 n°22-21.947

Deux personnes physiques ont vendu la totalité des titres d’une société qui vendait du matériel de jardin à une société d’équipements de matériel de jardin. Il était prévu que le prix de cession était fixé à 250.000 Euros si les capitaux propres retraités étaient au moins égaux à 262.000 Euros. Si ces capitaux propres étaient inférieurs à ce montant, les vendeurs devaient restituer à l’acheteur une somme d’argent correspondant à une réduction du prix.

L’acheteur a porté l’affaire en justice, demandant aux vendeurs le remboursement d’une somme en application de cette clause (somme de 135.000 Euros, soit plus de la moitié du prix de cession !). Les vendeurs, mécontents, ont essayé d’obtenir la nullité de la clause (qui n’aurait donc pas pu être appliquée) en invoquant le fait qu’ils auraient été contraints de l’accepter, les acheteurs ayant selon eux, abusé de leur état de dépendance.

Ils invoquaient le vice de violence. La violence est un des vices du consentement avec le dol et l’erreur. La violence peut prendre différentes formes, dont l’abus de l’état de dépendance du cocontractant par lequel une partie obtient un engagement qu’elle n’aurait pas souscrit en l’absence de contrainte et en tire un avantage manifestement excessif (article 1143 du Code civil).

Les vendeurs expliquaient que les acheteurs avaient déjà demandé d’introduire une clause de réduction de prix au stade de la lettre d’intention ce qu’ils avaient refusé, et que le conseil de l’acheteur avait renvoyé deux jours avant la signature un acte de cession avec cette clause de réduction du prix. Ils estiment qu’après avoir réorganisé l’activité et le personnel, les vendeurs ne pouvaient plus revenir en arrière, et ne pouvaient donc plus refuser la cession, et que cette attitude était déloyale. Selon eux également, le fait qu’après la cession, il avait été conclu un avenant pour préciser la définition des capitaux propres retraités et organiser le partage d’une indemnité à recevoir n’avait pas d’impact sur le vice du consentement.

La transmission deux jours avant la vente d’un projet comprenant une clause de réduction de prix qui avait été refusée par le vendeur est-elle un abus de l’état de dépendance ?

NON

La Cour de cassation (com, 10 juillet 2024 n°22-21.947) retient que les vendeurs avaient été assistés de leur avocat et de leur expert-comptable tout au long des négociations. Sils étaient en état de dépendance par rapport à l’acheteur, les vendeurs ne se sont pas opposés aux nouvelles exigences de l’acheteur avant la signature de l’acte de cession et ont même conclu un avenant avec la définition des capitaux propres et le partage d’une indemnité.

Conclusion : On peut donc consentir librement au dernier moment à une modification du prix de cession, sans risquer une remise en cause du mode de calcul sur le terrain de la violence.