C’est la fin du grand silence (Sergio Corbucci : Il grande silenzio), la chancellerie s’est longtemps perdue en hésitant entre le côté de Méséglise et celui de Guermantes, oubliant que c’était une boucle, mais le temps perdu est enfin retrouvé. Pourtant, qu’il fut long le chemin avant d’être entendu.
En effet, depuis 2014, dans la partie relative aux suggestions de modifications législatives ou règlementaires de ses Rapports annuels, la cour de cassation ne cessait d’insister sur la nécessité de modifier la durée de validité du commandement en proposant de l’allonger de deux à cinq ans et en préconisant une rationalisation des recours intermédiaires (Rapports 2014 (pages 65 à 66 et pages 366, 367 ; 2015, pages 52 à 53 et 73 à 74 ; 2016, page 57 ; 2017, pages 61-62 et 2018 pages 52 à 55).
Cette suggestion n’ayant pas été reprise dans son Rapport annuel pour 2019, peut-être que la cour de cassation s’était lassée de la surdité de la Chancellerie ou avait eu un écho favorable qui ne restait plus qu’à attendre.
Cette surdité était d’autant moins compréhensible que, sur demande de la Chancellerie, le CNB a adressé en avril 2018, un projet détaillé, auquel l’AAPPE avait très largement contribué, contenant des propositions de réforme de la procédure de saisie immobilière dans le souci de la moderniser et de décharger d’un grande nombre de taches inutiles, le juge de l’exécution et le greffe (suppression de la notification de certaines décisions par LRAR, allongement du délai de validité du commandement de deux à cinq ans ce qui éviterait les saisines du juge tous les dix-huit mois, prorogation ou radiation par voie de simple ordonnance sur requête, réduction du nombre d’audiences en matière de vente amiable sur autorisation judiciaire avec un délai unique de sept mois et la possibilité de saisine le juge à tout moment par voie de simple requête pour faire constater la conformité de la vente ou son échec, et tant d’autres avancées).
Il suffisait d’attendre et c’est l’article 2, 4° du décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 (JO du 28 novembre 2020) portant diverses dispositions relatives notamment à la procédure civile et à la procédure d'indemnisation des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions qui vient consacrer ce que la cour de cassation et les avocats appelaient de leurs vœux.
Désormais, le premier alinéa de l’article R.321-20 du code des procédures civiles d’exécution est ainsi rédigé :
« Le commandement de payer valant saisie cesse de plein droit de produire effet si, dans les cinq ans de sa publication, il n'a pas été mentionné en marge de cette publication un jugement constatant la vente du bien saisi ».
Pour cette modification, le décret entre en vigueur le 1er janvier 2021 et s'applique aux instances en cours à cette date. En pratique cela signifie que jusqu’au 31 décembre 2020, il appartiendra aux avocats d’effectuer les démarches habituelles pour proroger les effets d’un commandement qui viendrait à se périmer dans les deux ans de sa publication au service de la publicité foncière.
A compter du 1er janvier 2021, pour les procédures de saisie immobilière mise en œuvre après cette date, la durée du commandement sera de cinq ans, mais cette nouvelle durée s’appliquera également aux commandement en cours de validité lorsque la procédure aura été engagée avant cette date.
A titre d’exemple, un commandement publié le 26 juin 2019, qui aurait dû se périmer le 26 juin 2021, se périmera le 26 juin 2024.
Voilà une modification fort bienvenue qui soulagera avocats, greffes et juges de l’exécution en diminuant considérablement le nombre de jugement de prorogation des effets du commandement.
Reste désormais à espérer que les autres propositions adressées à la Chancellerie en avril 2018 auront un sort identique.
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