Obligation de déclaration de la mutation de licence IV, sous peine de sanction pénale ou de fermeture administrative
Hors le cas de mutation par décès qui bénéficie d'un régime dérogatoire, toute mutation dans la personne du propriétaire ou du gérant d'un café ou débit de boissons vendant de l'alcool à consommer sur place doit faire, quinze jours au moins à l'avance et par écrit, l'objet d'une déclaration (Code de la santé publique, article L3332-4).
Le défaut de déclaration de mutation constitue un délit pénal (Code de la santé publique, article L3352-4).
Il peut également, selon les circonstances de l'espèce et la gravité des manquements de l'exploitant, justifier une fermeture administrative temporaire :
"3. Pour justifier la décision de fermeture de l'établissement, le préfet de police a notamment relevé que le gérant de l'établissement n'était titulaire, lors du contrôle des services de police du 21 juin 2022, d'aucune déclaration de translation de la licence pour la vente de boissons alcoolisées. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de ce contrôle, la société Monop' n'avait pas procédé à la déclaration de translation de la licence dont elle disposait pour l'exploitation, à une précédente adresse, de son commerce alimentaire. Il est toutefois constant que la société requérante a remédié à l'infraction constatée en procédant dès le 29 juin 2022 à la déclaration d'ouverture pour laquelle elle a obtenu un récépissé de déclaration. Ainsi, alors que les faits reprochés n'avaient pas vocation à se répéter et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que d'autres infractions aient été commises par le gérant de l'établissement à la date à laquelle a été pris l'arrêté attaqué, ces faits, qui relevaient du 1° de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, n'étaient pas suffisants pour justifier la mesure de fermeture prise. Dès lors, le préfet de police a entaché son arrêté d'une erreur d'appréciation." (Tribunal Administratif de Paris, 10 octobre 2024, n°2301251).
Rôle et obligations du Maire à réception d'une déclaration de mutation de licence IV
Les textes se limitent à prescrire au Maire l'obligation de donner immédiatement récépissé de la déclaration et d'informer le Préfet ainsi que le Procureur de la République, afin que ceux-ci puissent exercer leurs pouvoirs respectifs (Code de la santé publique, article L3332-4).
En effet, c'est au procureur qu'il appartient de rechercher et poursuivre les infractions pénales relatives à la législation sur les débits de boisson :
"Considérant qu'en application de l'article L.31 du code des débits de boissons et des mesures de lutte contre l'alcoolisme, toute ouverture de débit de boissons doit faire l'objet d'une déclaration à la mairie ; que le maire en transmet, dans les trois jours, une copie intégrale au procureur de la République à qui il appartient de rechercher et de poursuivre les infractions qui pourraient être commises ; Considérant que le requérant a demandé au tribunal administratif de Dijon, de se prononcer sur la validité de la licence d'un nouveau débit de boissons ouvert à Charolles ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire de se prononcer sur une telle demande ; que c'est, dès lors, à bon droit que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de M. X... comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;" (Conseil d'Etat, 16 décembre 1992, n°135145)
Le Maire ne disposant d'aucun pouvoir d'appréciation, tout refus de récépissé de déclaration mutation peut être annulé en justice et donner lieu à injonction du Tribunal
C'est ce qu'a rappelé récemment le Tribunal Administratif de Toulouse, qui précise que :
- le Maire doit délivrer un récépissé sans examen de la capacité du requérant, de la situation du débit ou de la régularité de l'opération envisagée,
- le Maire ne peut s'opposer à l'opération envisagée avant sa réalisation,
- la décision implicite de refus de délivrance d'un récépissé doit être annulée et le Maire peut être tenu de le délivrer sous injonction du Tribunal.
"3. Il résulte de ces dispositions que l'intervention du maire, qui, en ce domaine, agit en qualité d'agent de l'État, doit se borner à constater l'accomplissement de la formalité de déclaration d'ouverture d'un débit de boissons, de mutation dans la personne de son propriétaire ou de son gérant ou de translation d'un lieu à un autre qui lui est présentée et à en délivrer récépissé, sans examen de la capacité du requérant, de la situation du débit ou de la régularité de l'opération envisagée et à en transmettre une copie intégrale au représentant de l'État dans le département, ainsi qu'au procureur de la République. S'il appartient, le cas échéant, d'une part, à ce dernier, susceptible d'être à tout moment saisi, de rechercher et de poursuivre les infractions qui pourraient être commises, et, d'autre part, au préfet de faire usage après l'ouverture, la mutation ou la translation du débit de boissons, de ses pouvoirs de police administrative lorsque la situation le justifie, il n'appartient pas, en revanche, au maire ni au préfet, de s'opposer à l'opération envisagée avant sa réalisation.
4. Le maire est donc tenu de recevoir la déclaration de mutation d'un débit de boissons, sans exercer aucun pouvoir d'appréciation. Dès lors, le maire de la commune d'Albi devait immédiatement donner récépissé à M. B, représentant de la société RLI, de sa déclaration de mutation de la licence IV, et devait, en tout état de cause, transmettre une copie de cette déclaration au représentant de l'État dans le département et au procureur de la République. Par suite, et sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre moyen de la requête, la décision de refus de délivrance d'un récépissé de déclaration et de transmission du 19 octobre 2021 et celle de rejet implicite du recours gracieux dirigé contre cette décision sont entachées d'illégalité et doivent être, pour ce motif, annulées.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. *L'exécution du présent jugement implique nécessairement que la commune d'Albi délivre un récépissé de déclaration à la SASU RLI et transmette copie intégrale au représentant de l'État dans le département dans un délai de trois jours. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte." (Tribunal administratif de Toulouse, 14 octobre 2024, n°2200236)
S'il n'en a pas été question dans ce jugement, il s'en déduit que le refus de délivrance d'un récépissé est fautif et que le Maire engage la responsabilité de l'Etat, lequel peut être condamné à réparer le préjudice causé par un refus illégal.
Le cabinet est à votre écoute :
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Goulven Le Ny, avocat au Barreau de Nantes
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