La Cour de cassation apporte une utile précision sur l'articulation des actions en nullité et de la possibilité de se prévoir du caractère non-écrit d'une clause figurant à un bail commercial. Il est admis que, contrairement à l'action en nullité qui est sujette à prescription, lorsqu'une disposition d'ordre public sanctionne une clause contractuelle contraire en la réputant non-écrite, cela est imprescriptible et produit ses effets dans la durée.

La Cour va transposer cette dichotomie issue du droit de la consommation pour l'appliquer aux baux commerciaux. Dans cette affaire, le bailleur et le preneur s'opposaient sur l'indemnité d'éviction à la suite d'un congé délivré par le bailleur.

Le locataire imprudent avait accepté de signer le bail comportant une clause de renonciation à l'indemnité d'éviction, et demandait à ce qu'en soit écarté l'application compte-tenu de l'article L145-15 nouveau du Code de commerce (rédaction postérieure au bail en litige), qui répute non-écrit les clauses ayant pour effet de faire échec au droit au renouvellement dont l'indemnité d'éviction fait partie.

Le bailleur de son côté, arguait que l'article L145-15 nouveau du Code de commerce ne pouvait s'appliquer, car avant l'entrée en vigueur de ce texte, l'action en nullité était prescrite.

La Cour de cassation juge, quand bien même l'action en nullité était prescrite avant l'entrée en vigueur du nouveau texte, celui-ci répute non-écrit toute clause contraire, ce qui est imprescriptible, en conséquence de quoi le locataire peut s'en prévaloir pour prétendre à ce que le clause de renonciation litigieuse soit écartée car le congé était postérieur à l'entrée en vigueur du nouveau texte  :

"10. Il résulte de l'article 2 du code civil que la loi nouvelle régit les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées. 11. La loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, qui, en ce qu'elle a modifié l'article L. 145-15 du code de commerce, a substitué, à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec au droit au renouvellement, leur caractère réputé non écrit, est applicable aux baux en cours et l'action tendant à voir réputée non écrite une clause du bail n'est pas soumise à prescription (3e Civ., 19 novembre 2020, pourvoi n° 19-20.405, publié). 12. Dès lors, quand bien même la prescription de l'action en nullité des clauses susvisées était antérieurement acquise, la sanction du réputé non écrit est applicable aux baux en cours. 13. Ayant constaté que le bail s'était tacitement prorogé et que le congé avait été valablement délivré par les propriétaires le 23 septembre 2014, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action tendant à voir réputer non écrite la clause de renonciation à l'indemnité d'éviction n'était pas soumise à la prescription biennale et était recevable." (Cour de cassation, 16 novembre 2023, 16 novembre 2023, n° 22-14.091).

Le cabinet est à votre écoute pour vous accompagner et vous proposer des solutions sécurisées en fonction de votre situation :

  • Vous accompagner dans la négociation, la rédaction, et la conclusion d'un bail commercial sécurisant vos intérêts ;
  • Vous assister dans la résolution de litiges entre propriétaires bailleurs et preneurs ;
  • Vous accompagner dans la procédure de congé, ou dans la négociation d'une résiliation amiable.

 

Goulven Le Ny, avocat au Barreau de Nantes

le-ny.goulven@avocat-conseil.fr - 06 59 96 93 12 - glenyavocat.bzh