Le cadre légal et l’enjeu du retrait litigieux

Consacré à l’article 1699 du Code civil, le droit au retrait litigieux permet à un débiteur (le « débiteur cédé »), dont la créance est cédée par son créancier (le « cédant ») à un tiers (le « cessionnaire »), d’éteindre sa créance. Pour ce faire, le débiteur cédé paye directement auprès du cessionnaire le prix que ce dernier a réglé pour acquérir cette créance dans le cas où ladite créance est litigieuse.

Toutefois, son efficacité repose sur une invocation procédurale correcte par le débiteur cédé. Dès lors, les règles de procédure civile revêtent une importance capitale dans l’exercice de ce droit.




Les faits et la procédure

Dans l’affaire en question (Cass. com., 20 novembre 2024, n° 23-15.735), un débiteur cédé, agissant en qualité de caution, avait invoqué judiciairement, de manière subsidiaire le bénéfice du retrait litigieux. La cour d’appel de Paris avait admis cette demande (CA Paris, 23 mars 2023, n° 19/21586), ce que contestait le cessionnaire, un fonds commun de titrisation. Selon ce dernier, la faculté de retrait ne pouvait être exercée qu’à titre principal et non subsidiaire.




La solution de la Cour de cassation

La Cour de cassation, au visa de l’article 1699 du Code civil, a cassé l’arrêt de la cour d’appel, en s'appuyant sur principe ancien :

« La faculté de retrait prévue par ce texte, qui a pour objet de mettre fin au litige, ne peut être exercée qu’autant que les droits cédés sont encore litigieux à la date de son exercice. Il en résulte qu’elle ne peut être opposée au créancier à titre subsidiaire. »

Ce principe, bien que connu depuis un arrêt datant du 26 décembre 1893, est rarement évoqué dans la jurisprudence récente.

Analyse et portée de la décision

La solution adoptée impose au débiteur cédé de structurer ses demandes avec soin. En effet :

  • Si le juge statue d’abord sur une demande principale concernant la créance litigieuse, il tranche ainsi le litige et retire à la créance son caractère litigieux. Dès lors, le droit au retrait litigieux ne peut plus être exercé.
  • Par conséquent, pour être valable, la demande de retrait litigieux doit être formulée à titre principal, ce qui permet au juge de statuer directement sur cette demande avant toute autre.

Cette exigence procédurale reflète une logique claire : le droit au retrait litigieux a pour finalité de mettre fin au litige, et non de se greffer sur une demande subsidiaire qui pourrait être conditionnée à une autre décision.




Conclusion

La décision de la Cour de cassation souligne l’importance d’un usage rigoureux du droit au retrait litigieux. Ce droit, destiné à pacifier les relations litigieuses, doit être exercé dans un cadre strict respectant les règles procédurales : il doit être demandé à titre principal, pour le succès d’une action en justice.




Me Grégory ROULAND - avocat au Barreau de PARIS

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