Au détour d'une recherche sur internet, nous avons découvert un arrêt du 23 février 2023 rendu par la Cour d'appel de MONTPELLIER (RG n°20/02731), condamnant la société ILIOS CONFORT.

L'original de l'arrêt a été publié sur 2 sites internet, dont celui de la cour de cassation :

​Nous nous permettons de procéder au commentaire juridique de cette décision, en raison de l'intérêt qu'il dégage.





I. RAPPEL DES FAITS

Suite à un démarchage à domicile, un couple signe le 22 juin 2017 avec la société ILIOS CONFORT un bon de commande pour un prix de 10.600€ TTC portant sur :

  • la vérification complète de leur installation de panneaux photovoltaïque pré-existante, avec  remplacement des optimiseurs défectueux et de l'onduleur central, de marque Solaredge et garantis 15 ans par le fabricant,  
  • la reprise de la garantie des panneaux 80 % sur le restant de la période ERDF soit 14 ans,  
  • un gestionnaire énergétique.

Cet achat s'est effectué par le biais d'un crédit souscrit auprès de COFIDIS, et signé le jour même sur proposition de la société ILIOS CONFORT.

En raison d'un litige quant à des "promesses non tenues concernant l'autofinancement de l'opération", le couple d'acquéreurs a demandé amiablement l'annulation de la vente, mais faute de réponse favorable du vendeur, ils l'ont traduit en justice pour recouvrer le montant de leur achat. 





II. PROCEDURE

Le 18 juin 2020, le tribunal judiciaire de Montpellier a condamné la société ILIOS CONFORT à rembourser à ses clients la somme de 10.600 €, à reprendre son matériel et à remettre en état leur domicile.

La société ILIOS CONFORT  a interjeté appel.

A l'appui de ses prétentions, ILIOS CONFORT a prétendu que les acquéreurs ne pouvaient pas lui reprocher d'avoir commis de faute, étant donné que ses clients avaient volontairement exécuté la vente, c'est-à-dire laissé le vendeur s'exécuter sans mot dire.

L'argument n'a évidemment pas été retenu par la Cour, au motif que la preuve d'un acte ultérieur à la vente révélant la volonté univoque des acquéreurs « de ratifier le contrat en toute connaissance de cause » était nécessaire.

De fait, ILIOS CONFORT se voit condamnée en appel et le jugement est confirmé dans son intégralité...

Une affaire courte, mais démontrant que si une société ne tient pas ses engagements, idéalement il est préférable de trouver un terrain d'entente en dehors de toute action judiciaire, qui risque de lui apporter une mauvaise publicité. 




III. EXPLICATIONS SUR LA MOTIVATION DE L'ARRÊT D'APPEL

On remarquera que, initialement, les acquéreurs ont assigné le vendeur pour tromperie sur l'autofinancement des panneaux.

Il est très difficile de démontrer une telle tromperie, mais rien n'interdit de regarder si l'acte de vente a été régulièrement conclu.

En effet, la Cour d'appel a annulé le contrat de vente, car le vendeur a signé avec ses clients un bon de commande lacunaire, c'est-à-dire qui ne renseignait pas suffisamment les acquéreurs.

Ainsi, en premier lieu, les juges d'appel relèvent que le bon de commande indique la marque de l'onduleur et de l'optimisateur, mais sans davantage d'éléments :

  • "si le bon de commande établi le 22 juin 2017 par un technicien de la société Ilios Confort et remis aux acheteurs indique la marque de l'ondulateur et de l'optimisateur, de nombreuses mentions en sont totalement absentes, rendant impossible de vérifier notamment les caractéristiques précises des biens vendus et/ou remplacés et de connaitre le nombre des panneaux remplacés, afin notamment de procéder à des comparaisons dans le délai de rétractation"

En effet, il aurait été opportun d'indiquer avec exactitude les caractéritiques techniques des matériels... afin d'opérer une recherche sur internet et savoir si leur prix était trop élevé, s'ils peuvent être remplacés en cas de panne, etc.

 

En second lieu, le bon de commande n'indique pas les délais de livraison des matériels et d'exécution des démarches administratives à la charge du vendeur :

  • "ce bon n'indique pas de manière précise les modalités et délais de livraison des biens ainsi que la date d'exécution de la prestation des services et de la mise en oeuvre effective de l'installation (il ne comporte en effet aucune mention à ce sujet)."

c'est une grave carence, car la loi et la jurisprudence sont très claires sur la question : tout bon de commande signé à domicile doit comprendre les délais de livraison ET les délais d'exécution des démarches administratives, si le vendeur se charge de ces dernières.

Pour preuve, la Cour de cassation exige un délai d’exécution du contrat détaillant le délai de pose et le délai des prestations administratives, et non un délai approximatif, si le vendeur s'est chargé de toutes ces prestations (par exemple, la mention « délai maximum de 120 jours » est illégale) ; à défaut le contrat de vente est nul : (Civ. 1ère 15 juin 2022, n°21-11.747, Sté Groupe Eco habitat c/ X).

Certes, comme le soulevait la société ILIOS CONFORT, il est impossible de solliciter l'annulation d'un contrat en raison de son irrégularité, si l'acquéreur sait que ledit contrat est vicié (en ce sens, Civ. 1ère, 21 octobre 2020, n°18-26.761, X c/ BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et Sté SUNGOLD).

Cependant, dans la présente affaire, ce n'était pas le cas.

Du reste, la société ILIOS CONFORT avait soulevé le même argumentaire dans une affaire tranchée par le tribunal judiciaire de LILLE le 21 mars 2022, mais là encore, elle a été déboutée... D'ailleurs, cette société a interjeté appel de ce jugement, mais s'est désistée de son appel, lorsqu'elle s'est aperçue qu'elle était hors délai pour contester (voir CA DOUAI, 09 février 2023, RG n°22/02388).

En résumé, cet arrêt d'appel ne souffre d'aucune critique sur le plan juridique et peut se résumer de la sorte : un bon de commande non conforme à la loi est frappé de nullité si l'acheteur ignorait que ledit bon était vicié.




Me Grégory ROULAND - avocat au Barreau de PARIS

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