Actuellement, l’usage illicite de substances vénéneuses est un délit passible d’un an d’emprisonnement et de 3750 € d’amende. La pertinence de cette peine principale (car il peut y avoir des peines complémentaires) est en débat et le ministre de l’intérieur Gérard Collomb s’est prononcé en faveur d’une simple contravention pour les consommateurs de drogues et la ministre de la justice, Nicole Belloubet, pour une simplification des sanctions. L’idée n’est pas nouvelle, elle avait déjà été avancée par Nicolas Sarkozy en 2003 et même votée par le Sénat en 2011, mais sans être suivie par l’Assemblée Nationale, plus sensible aux retombées politiques d’une réforme qui divise.
Aussi depuis 40 ans et la loi du 31 décembre 1970 qui incrimine la consommation de stupéfiants, la situation n’a guère évolué, ou alors dans le sens d’un renforcement de la répression pénale alors que la plupart des autres pays européens s’orientent vers une politique sanitaire et préventive plutôt que répressive.
Les limites du tout répressif
A la punition de l’usage simple de drogues illicites prévue à l’article L. 3421-1 du Code de la santé publique peuvent s’ajouter l’arsenal des incriminations visant l’usager revendeur, l’usager qui provoque ou présente la drogue sous un jour favorable ou l’usager conducteur.
La consommation de produits stupéfiants peut être accompagnée de détention, transport, acquisition, offre, cession ou production qui sont sévèrement réprimés (10 ans d'emprisonnement et 7 500 000 euros d'amende). Le détenteur peut néanmoins échapper à cette peine si les produits sont exclusivement destinés à sa consommation personnelle.
Mais le consommateur qui produit son propre cannabis encourt jusqu’à 20 ans de réclusion et celui qui passe la frontière avec ce type de produit encourt 10 ans, délit douanier non compris.
Avec une hausse continue des interpellations pour usage (dont près de 90 % pour usage de cannabis), les condamnations sont en hausse et la répression semble davantage ciblée sur les consommateurs que sur les trafiquants.
Et pourtant, malgré ce choix répressif, la consommation en France de produits stupéfiants atteint des sommets.
Le « french paradox » a désormais deux significations :
- la flatteuse : la contradiction entre la richesse de la cuisine française (et de ses vins) et la bonne santé des Français sur le plan cardiovasculaire et de leur longévité,
- la piteuse : la consommation massive de cannabis (estimée à 11 % de la population française), notamment par les jeunes, alors que la politique française est l’une des plus répressives d’Europe.
Contraventionnaliser l’usage de stupéfiants
Devant ce constat d’échec du régime juridique répressif de l’usage de stupéfiants, on peut être tenté de lui substituer de simples contraventions. Cela pourrait avoir des avantages : réduire les dépenses judiciaires tout en augmentant les rentrées d’argent dans les caisses de l’Etat en systématisant la sanction qui toucherait davantage d’usagers.
En pratique, il s’agit de déterminer le niveau de sanction applicable au consommateur (déterminer la classe de la contravention choisie sur l’échelle actuelle de 1 à 5) et le montant de l’amende. Si le consommateur réitère les faits (une première fois), il serait poursuivi par le Procureur de la République devant le tribunal de police et s’il récidive (une seconde fois, donc en cas de troisième infraction), il serait convoqué à comparaître devant le juge correctionnel pour être condamné à une peine de prison ou une injonction thérapeutique.
L’amende forfaitaire pourrait aussi être réduite à l’usage de stupéfiants dans l’espace public, l’usage privé étant dépénalisé pour ce qui concerne le cannabis, ce qui rapprocherait notre législation de certains de nos voisins européens qui ne sanctionnent pas l’usage mais uniquement la production, le trafic ou la détention.
Cette proposition de réforme doit prendre en compte l’évolution de la réalité sociale des consommateurs sans se mettre à dos une partie de la population pour laquelle l’enjeu répressif est très fort sur le plan symbolique.
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