Dans ce cas, la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées peut être fondée, à condition toutefois de réunir quelques conditions rappelées par cette jurisprudence.

Dans cette affaire, plus de 600 messages de sollicitations diverses (et de réitérations et d’annulations de sollicitations) avaient été envoyés à une salariée par son employeur, et ceci sur un ton comminatoire et à des heures tardives à la fois sur son adresse électronique professionnelle et sur son téléphone personnel. La nature des messages ne laissait aucun doute sur leur caractère d’urgence et sur l’exigence d’une réponse immédiate (la salariée n’a proposé son aide spontanée que pour 3 messages sur les 600 envoyés par son employeur).

Petit florilège des messages de son employeur : " Stp peux annuler la chambre à tokyo..Merci (dimanche 24 août, 23 :09) ", " Salut, je vais aller à Las Vegas finalement' on se parle demain matin sans faute, je serai en voiture app moi vers midi max à demain. Bon dimanche V (dimanche 11 mai 2013, 11 :43) " Ignore le mail précédent (vendredi 18 mai 2012, 8 :03) ", certains messages étant clairement hors champ professionnel : "Tu t'es occupée de la ligne téléphone chez moi ' (16 novembre 2013, 15 :16) ", son lave-vaisselle : " Tu as eu le technicien Darty ' " " Oui, j'arrive chez toi maintenant. (30 octobre 2012) ", sa fille ... et son chien Fosca : " Margot préfère que tu prenne Fo ce soir, car elle va au cheval et chez son père' Donc tu veux bien faire comme on a dit hier, et n'oublie pas son 1/2 comprime demain matin' (mardi 20 mars 2012) "ou encore : " Tu déposes FO a la maison en partant, à moins que Margot l'ai déjà récupérée Merci V (6 février 2012) ".

La salariée, assistante marketing, avait été embauchée à temps plein puis était passée à 4/5ème de son temps de travail, exerçant du lundi au jeudi. Les demandes pressantes de la dirigeante le vendredi et même pendant les périodes de suspension de son contrat de travail (congés, arrêts de travail pour maladie, congé maternité), établissent selon la Cour la pression exercée sur la salariée et la mise en danger de sa santé, bien que l’employeur ait tenté de mettre cela sur le compte de la propre initiative de la salariée, de sa désorganisation et de son manque de diligence, ajoutant notamment que les sollicitations nocturnes étaient partiellement dues au décalage horaire entre les salariés de la société et la clientèle étrangère…

L’employeur a été condamné à payer à la salariée la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité et 19.236 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé. Par ailleurs,  la Cour déclare nul le licenciement et dit que le harcèlement moral qu'elle a subi est à l'origine de son licenciement pour inaptitude.

CA Paris, 16 nov. 2017, n°16/11493 : Jurisdata n°2017-023705