La formation initiale, c’est cette petite musique de fond qui s’invite dans toutes les campagnes électorales qui rythment notre Barreau.

Les candidats, d’années en années, s’évertuent à chanter des propositions tandis que certains se plaisent à relever les fausses notes.

Mais qu’en est-il, en réalité, de cette formation à l’EFB que tous voudraient harmonieuse ?

Celui qui comme moi a un talent très contestable pour la métaphore, se contentera peut-être, pour répondre à cette question, de se livrer à ce réflexe compréhensible consistant à interroger en premier lieu le site de notre Ecole - une de nos vitrines en somme.

Il apprendra alors que l’élève-avocat devra suivre 330 heures de cours, que la promotion 2015 accueillit 1907 titulaires du CAPA et qu’un sondage, datant de 2010 et inaccessible désormais, révélait que 77 %  des élèves sortants exerçaient un métier du droit.

Concrètement, ces données facilement consultables à propos de la formation initiale sont obsolètes, imprécises et trop peu nombreuses.

Il serait cependant dommage de passer à côté de ce qu’est l’EFB aujourd’hui.

Il serait également regrettable de se priver de louer ses évolutions et de pointer les axes de progression.

Retour donc sur la formation initiale dispensée à l’EFB - pour la clarté du propos, il est précisé qu’il ne sera question ici que des cours et non du PPI ou du stage en cabinet :

 

1. A l’EFB, on y fait quoi ?

Beaucoup l’ignorent certainement mais le programme de l’EFB a été modifié l’année dernière sous l’impulsion de Marie-Aimée PEYRON, Bâtonnier de PARIS.

L’objectif annoncé (source : revue Droit & Patrimoine n°1130 - 22 Janvier 2018) était de proposer une formation davantage professionnalisante avec le remplacement de plusieurs dizaines d’heures de cours magistraux de droit par des cours plus pratiques et diversifiés portant notamment sur le numérique, les modes alternatifs de règlement des différends (MARD) ou les professions juridiques.

L’architecture de la pédagogie fut ainsi modifiée sous la conduite d’Alienor KAMARA-CAVARROC.

Les élèves-avocats suivent désormais des cours théoriques et pratiques sur la procédure (devrait-on dire plutôt les procédures) et des parcours portant sur deux matières fondamentales choisies par eux.

La déontologie garde une place importante et n’est pas simplement enseignée comme matière autonome : tout au long des cours pratiques et théoriques précités, des références régulières à la déontologie sont distillées. Des modules en petits groupes ont été mis en place pour rendre la matière plus vivante.

L’expression orale fait l’objet d’exercices pratiques et de cours dispensés par des professionnels : des avocats, des secrétaires de la Conférence, des magistrats, ou des acteurs.

Enfin, les élèves-avocats sont confrontés au monde associatif et se voient familiarisés avec le numérique grâce au « Lab EFB ».

En substance, tout futur avocat bénéficie d’une formation commune («  tronc commun ») et d’une formation plus spécifique (« parcours ») qu’il aura la possibilité d’agrémenter avec une certaine forme de liberté.

Le format des cours en tant que tel s’est donc diversifié puisqu’il est question de cours magistraux, de petits groupes, de foisonnements, de jeux de rôle etc…

Par ailleurs, la formule « alternance » a été simplifiée ce qui traduit une certaine volonté d’ouverture.

 

2. Un an après, on en pense quoi ?

Nous savons que l’EFB faisait l’objet de griefs récurrents de la part des élèves-avocats : la formation était trop lourde en cours théoriques, trop peu professionnalisante, insuffisamment interactive.

Ainsi, La réforme a-t-elle permis à l’EFB de devenir « une école (…) du métier d’avocat » ? (source : Les Affiches parisiennes, 16 janvier 2018).

 

     a. L’évolution très favorable de la formation

D’un point de vue structurel, les nouveaux programmes s’inscrivent clairement dans un dynamisme nouveau assez conforme aux doléances des confrères et futurs confrères.

Dans la pratique, le recul est peut-être encore insuffisant pour se prononcer de façon définitive.

En effet, les premiers bénéficiaires de la refonte des programmes viennent tout juste d’obtenir leur CAPA.

Aussi est-il assez ardu de répondre formellement à notre problématique.

Quelques constats peuvent cependant être dégagés à partir des témoignages d’élèves sortants, d’intervenants ou des réseaux sociaux - Bien entendu, ces témoignages doivent être abordés avec précaution dès lors que les jeunes diplômés n’avaient pas connu le système antérieur.

Manifestement, l’allégement des cours théoriques a séduit : certains cours magistraux portant sur des matières purement juridiques étaient perçus comme inutiles au regard des compétences déjà acquises à la faculté.

Le renforcement de la diversité de l’enseignement et l’ajout de nouveaux modules a été accueilli favorablement, voire avec soulagement.

C’est ainsi que le développement de la clinique - qui existe depuis 2014, l’ouverture sur les associations, la possibilité de parler du numérique apparaissent comme d’excellentes idées.

De même, des simulations complètes d’audiences (facultatives) ont été expérimentées à l’initiative d’Aliénor KAMARA-CAVARROC. Elles se déroulent avec des auditeurs de justice et sont supervisées et corrigées en temps réel par des avocats et des magistrats. Cette nouveauté a été accueillie avec grand enthousiasme.

 

     b. Les axes à développer

Des points semblent cependant devoir être améliorés.

Certains élèves-avocats réclament encore plus de pratique, ce qui semble être encourageant quant à leur enthousiasme au regard de ce qui a déjà été accompli.

Dans ce même ordre d'idée, ils souhaitent que soit encore davantage encouragée l'alternance dont la simplification a reçu un franc succès.

L’UJA de PARIS a par ailleurs été informée de ce que certains cabinets d’avocats ne jouaient pas le jeu de l’alternance en imposant à leurs stagiaires des heures de travail parfois incompatibles avec les exigences de formation.

Nos futur(e)s Confrères et Consoeurs se sont par ailleurs favorables à la création de modules communs avec les auditeurs de justice (élèves de l’ENM).

Manifestement, les simulations d’audiences ont été très appréciées par celles et ceux qui ont pu y participer, ce qui peut constituer un axe de réflexion et de progression.

Pourquoi d’ailleurs ne pas décliner l’exercice avec des chefs d’entreprises publiques ou privées reconnues pour les élèves s’orientant vers des activités de conseil ?

De même, certains retours semblent soutenir que le module « vie professionnelle » pourrait encore être amélioré avec une déclinaison immersive pouvant être intitulée « 24 heures en cabinet » ou « Une journée dans la peau d’un avocat » mais encore « Une semaine de notre quotidien de demain ».

Il nous a également été indiqué que la qualité des intervenants était assez contrastée : pour un même thème, la réception par les élèves-avocats de l’enseignement pouvait être radicalement opposée en fonction de son auteur.

C’est le cas par exemple en déontologie - le vice-bâtonnier Basile ADER s'est saisi de la question et il faudra vraisemblablement maintenir sa démarche.

Nos futurs confrères souhaiteraient aussi avoir davantage d’informations sur le fonctionnement de l’ordre, de ses services et sur les formalités administratives à réaliser en début de carrière.

La création du « Lab EFB » a été très bien perçue.

Les cours en eux-mêmes ont en revanche donné lieu à des avis très divergents : certains sont très satisfaisants, d’autres font état d’une grande déception. Beaucoup regrettent ne pas avoir de cours très pratiques sur les sites internet, le référencement naturel, le légal design, les applications, la communication numérique etc...

Ainsi, les élèves n’auraient pas de véritable tronc commun numérique de telle sorte que certains ateliers en la matière ont répondu à un besoin là où d’autres sont passés complètement à côté des espérances.

D’aucuns regrettent que les avocats qui se sont investis dans le numérique n’aient pas plus été mis en avant pour faire part de leurs expériences.

 

3. L’EFB de demain et l’ordre

Le Bâtonnier, le vice-Bâtonnier et l’ordre n’ont pas tous les pouvoirs en matière de formation.

Rappelons que le CNB, par l’intermédiaire de la Commission de la Formation Professionnelle, définit en quelque sorte l’enseignement commun à toutes les écoles, à charge pour les barreaux de disposer au mieux de l’enveloppe libre qui leur est laissée.

En l’état actuel des choses, Olivier COUSI et Nathalie RORET ont, semble-t-il, pris la mesure des griefs subsistants à l’égard de l’EFB.

C’est ainsi que le programme intégrera vraisemblablement des cours sur l’ordre et son fonctionnement, ce que l’on doit saluer naturellement.

Olivier COUSI avait également appelé de ses voeux la multiplication de formations à taille plus humaine en prenant exemple notamment sur l’HEDAC, notre voisine versaillaise (source : site de carrières-juridique.com 29 novembre 2018).

Le binôme COUSI-RORET avait aussi mis en exergue la nécessité de bien gérer le budget de l’école (source : site lemondedudroit.fr 26 novembre 2018). La notion de transparence a également souvent été débattue à l'occasion de la dernière campagne au Bâtonnat et vice-Bâtonnat.

En effet, pour disposer de plus de cours pratiques (950 intervenants nécessaires !) ou de simulation d’audiences (dont les acteurs sont actuellement des volontaires bénévoles), il faut des moyens financiers. Un travail avait été réalisé par Emmanuelle CLEMENT sur ce point avec des effets très positifs. Il faut désormais maintenir cet effort afin de renforcer encore la qualité des enseignements et mettre en oeuvre les axes d’amélioration évoqués ci-dessus.

L’administration de l’école doit encore davantage se rapprocher des élèves-avocats : De nombreuses questions ont été posées à l’UJA concernant les difficultés rencontrées par certains stagiaires avec leur Cabinet. De même, lors de la journée de grève contre la réforme des retraites ou dans la perspective des grèves des transports du 5 décembre, trop peu de futurs confrères ont reçu de réponses à leurs questions et/ou inquiétudes quant à l'organisation des cours.

C'est au niveau de ces chantiers que le Conseil de l’ordre et ses membres doivent se positionner.

Pour une formation plus toujours plus concrète, plus diversifiée, plus proche des élèves-avocats, il faut s’engager ensemble dans la voie de la stabilité et de l’amélioration constante des évolutions opérées par nos prédécesseurs.

Il faut aussi  se montrer apte, d’année en année, à contrôler ce qui se fait à l’école pour identifier les points de crispation subsistants.

L’EFB est le siège de la construction d’une partie de notre âme d’avocat et de beaucoup de nos compétences.

En tant que candidat de l’UJA de PARIS aux élections ordinales, je veux, avec Sophie, que ce sujet très sérieux soit traité avec énergie et enthousiasme, sous la direction de notre Bâtonnier et de notre vice-Bâtonnière tous deux bien au fait des problématiques de l'EFB.