Dès les premiers impayés de votre locataire, il est recommandé de ne pas faire trainer la situation et d’engager une procédure de résiliation du bail. La procédure est suffisamment longue pour qu’en cas de bonne foi de votre preneur, vous ayez tout le temps nécessaire pour trouver un échéancier et aboutir à un accord.

En effet, le cumul de tous les délais impératifs de la procédure rend l’expulsion d’un locataire laborieuse et pénible, d’autant que durant la procédure, il est rare que les loyers soient payés.

A cela, il convient de rajouter la trêve hivernale qui, contrairement aux idées reçues, n’empêche pas d’initier une procédure et d’obtenir un jugement mais empêche seulement la mise à exécution du jugement d’expulsion.

Il est d’ailleurs recommandé d’initier une procédure pendant la trêve hivernale afin d’avoir une chance d’obtenir un jugement pendant la trêve et de pouvoir le faire exécuter à la fin de la période d’interdiction des expulsions.

Ce timing n’est pas une science exacte et il ne faut pas vous dire qu’en six mois la procédure sera terminée. Le temps de la procédure judiciaire va dépendre pour beaucoup des délais d’audiencement dans les tribunaux d’instance ainsi que le nombre de renvois possible de l’audience. Mais la trêve hivernale permettra de mettre en œuvre la procédure et d’obtenir l’autorisation de la préfecture notamment pour procéder à l’expulsion.

De plus, si obtenir un jugement d’expulsion est déjà une étape longue, son exécution représente un véritable parcours d’obstacle et il faudra s’armer de patience.

En dépit de ces aspects inévitables, vous n’avez pas d’autre choix afin que votre locataire quitte les lieux de manière légale. Le déloger vous-même, sans recourir à un huissier de justice et surtout sans décision du juge, est illégal et vous encourez une peine de prison et une amende! 

 

Voici les étapes de la procédure d’expulsion à suivre: 

 

1.     Une mise en demeure préalable

 

Dès les premiers impayés, il ne faut pas hésiter à prendre contact avec votre locataire. Dans un premier temps, une solution amiable est toujours préférable que ce soit pour négocier un échéancier ou un départ volontaire du logement si le loyer est devenu trop cher pour ses moyens financiers.

Si aucun accord ne se profile ou que votre locataire ne répond pas à vos sollicitations, il vous faudra envoyer rapidement une lettre de mise en demeure de régler les sommes dues. Cette lettre fera courir les intérêts au taux légal et continuera à s’inscrire dans le cadre d’un règlement amiable du litige.

En revanche, dès le quatrième ou cinquième loyer non réglé, vous devez entamer la procédure d’expulsion afin d’éviter de perdre plus de temps.

Bien évidemment, il n’y a pas de règle stricte pour envoyer une lettre de mise en demeure et vous pourrez le faire dès le premier impayé. Cela déprendra de votre relation avec votre locataire et évidemment du montant des impayés.

 

2.   Un commandement de payer délivré par huissier

 

Une fois votre lettre de mise en demeure envoyée et qu’elle n’a eu aucun effet, adressez-vous à un huissier qui signifiera à votre locataire un commandement de payer les loyers, visant la clause résolutoire du contrat de bail.

Vous devez remettre à l’huissier les éléments suivants: une copie du contrat de bail, une copie de l’acte de caution - s’il y a-, un décompte de la dette locative et éventuellement les versements déjà effectués par le locataire.

A la suite de la signification du commandement de payer, votre locataire a alors deux mois pour régulariser sa situation.

 

3.   La saisine du juge

 

Passé ce délai et si aucun paiement n’a été effectué, vous pouvez alors véritablement entamer la phase judiciaire de la procédure et saisir le juge.

Pour cela, vous ou votre avocat devrez rédiger une assignation en expulsion visant la clause résolutoire du contrat de bail.

Le rôle de l’huissier est également important à ce stade car il faut également dénoncer l’assignation à la Préfecture deux mois avant la date d’audience. Il est important de s’assurer que les formalités sont régulièrement effectuées. L’assistance d’un professionnel n’est pas superflue.

A noter que le tribunal d’instance a une compétence exclusive en matière de baux d’habitation. Le tribunal territorialement compétent sera celui du lieu de situation de l’immeuble.

Vous pouvez alors saisir soit le juge des référés, soit le juge statuant au fond.

Cependant, sachez que saisir le juge des référés peut présenter certains risques: en effet, le juge des référés est le juge de l’urgence et de l’évidence. C’est pourquoi en cas de contestation sérieuse soulevée par le locataire (par exemple sur la validité du commandement, la rédaction de la clause résolutoire ou encore le décompte des sommes dues…), il se déclarera incompétent. Il faudra alors saisir le juge statuant au fond, ce qui rallongera encore une fois les délais de procédure.

Dès lors, il peut être judicieux d’assigner directement le locataire au fond car en cas de contestation sur les montants dus, par exemple, le juge tranchera les différentes prétentions. Surtout que les dates d’audiences entre le référé et le fond sont souvent proches.

 

4.   Le jugement et l’exécution amiable avec la remise des clés par le locataire

 

Le juge a la possibilité soit d’accorder des délais de paiement en établissant un échéancier soit d’ordonner l’expulsion assortie de la condamnation à régler les impayés + une indemnité d’occupation.

En général, lorsque le juge accorde des délais de paiement, il précise qu’en cas de non paiement d’une échéance, le contrat de bail sera résilié ce qui entraînera l’expulsion. Il s’agit le plus souvent d’une dernière chance donnée par le magistrat lorsque le montant de la dette est faible et / ou que le locataire a fait preuve de bonne foi dans le règlement de ses impayés.

Une fois le jugement d’expulsion obtenu, l’huissier doit signifier au locataire la décision et lui délivrer un commandement de quitter les lieux.

Le locataire a deux mois, à partir de la délivrance du commandement de quitter les lieux, pour restituer les clés de l’appartement.

 

5.   L’expulsion par le concours de la force publique

 

Passé ce délai de deux mois et en cas de refus du locataire de quitter les lieux, l’huissier pourra dresser un exposé « des difficultés sérieuses » rencontrées qu’il enverra à la préfecture afin de réclamer le recours à la  force publique.

La préfecture dispose alors de deux mois pour donner son autorisation ou adresser un refus.

Si la préfecture autorise le concours de la force publique, l’huissier et le commissariat se mettent en relation afin d’organiser l’expulsion qui aura alors lieu avec les forces de police. La date de l’expulsion ne doit pas être communiquée au locataire et le bailleur a l’interdiction d’être présent le jour J.

Le plus souvent, l’intervention de la police en amont permet de débloquer la situation et d’éviter de devoir recourir à l’expulsion par les forces de l’ordre. Le locataire s’organise pour vider les lieux et récupérer ses affaires.

En cas de refus ou d’absence de réponse à l’expiration du délai (refus tacite), l’huissier devra adresser, par lettre recommandée avec accusé de réception, au préfet une demande d’indemnisation (pour rupture d’égalité devant les charges publiques) qui dispose d’un délai de réponse de 4 mois.

Cette lettre de relance suffit à faire réagir les services de la Préfecture qui accordent rapidement le recours à la force publique.

Dans les cas les plus extrêmes, et si le préfet refuse de vous délivrer l’autorisation au recours à la force publique et de vous indemniser, il conviendra alors d’introduire un recours hiérarchique auprès du Ministre de l’Intérieur, qui dispose d’un délai supplémentaire de 4 mois pour répondre.

Dans le cas d’un nouveau refus, vous pouvez alors saisir le juge administratif devant lequel le concours d’un avocat est obligatoire.

 

ATTENTION: sachez qu’aucune expulsion ne peut être effectuée pendant la période hivernale, soit entre le 1er novembre et le 15 mars (en fonction des années).

 

Il vous faut compter au moins un an et demi /deux ans entre le premier commandement de payer et le départ du locataire. Ce délai indicatif peut être rallongé en fonction des spécificités de chaque dossier.

S’agissant des loyers impayés, leur recouvrement s’avère souvent difficile car les impayés de loyers sont le signe d’une détresse financière. Il sera dès lors très compliqué de recouvrer les sommes.

 

Ainsi, le cumul des différents délais impératifs de procédure rend la mesure d’expulsion longue et parsemée d’obstacle. Pourtant, il ne faut être impressionné par ces délais qui seront toujours plus courts que de rester avec un locataire indélicat.

On ne pourra trop vous conseiller, une nouvelle fois, de commencer  une telle procédure dès les premiers loyers non réglés.

Par ailleurs, il ne s’agit que d’une présentation générale de la procédure d’expulsion. Il existe des nuances et spécificités qui peuvent modeler la description faite dans cet article que ce soit au stade de la signification de l’assignation ou des chefs de demandes.

C’est pourquoi, il est préférable, pour éviter tout impair procédurier qui rallongerait d’autant votre contentieux, de vous faire accompagner par un professionnel qui sera à même de défendre au mieux vos intérêts et…de vous faire gagner du temps.

Mon cabinet est à votre écoute pour échanger avec vous à ce sujet.

 

Me Margaux SPORTES

Avocat au Barreau de Paris

4, rue Brunel – 75017 Paris

Tel : 06.83.96.65.17 – margaux.sportes@gmail.com