Pour inscrire un immeuble aux monuments historiques, l'accord du propriétaire est :

  • obligatoire s'il s'agit d'un immeuble par destination
  • pas obligatoire s'il s'agit d'un immeuble par nature

Par arrêté du 21 mai 2010, la tombe de Tania Rachewskaia, au cimetière du Montparnasse, a été inscrite au titre des MH.

Cette sépulture comprend la sculpture « Le Baiser » de Brancusi et son socle formant stèle.

Le préfet n’a pas demandé l’accord des ayants droit, considérant que la tombe, dont le groupe sculpté, était un immeuble par nature.

Souhaitant déposer la sculpture, les ayants droit de la concession funéraire ont contesté cet arrêté.

Le 11 décembre 2020, la CAA de Paris leur avait donné raison au motif que la sculpture était un immeuble par destination et non par nature, car elle n’avait pas été conçue à fin d'être incorporée à la sépulture.

La CAA relevait notamment que :

  • la sculpture a été créée antérieurement au décès de la défunte
  • l’épitaphe et le nom de Brancusi sur l’œuvre ne sont pas de la main du sculpteur
  • la facture de la stèle ne porte pas mention de l’adjonction d’un groupe sculpté

Cependant, le 2 juillet 2021, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt de la CAA et rejeté la demande des ayants droit.

Selon le CE, la seule circonstance qu’un élément incorporé à un immeuble n’ait pas été conçu à cette fin et qu’il puisse en être dissocié sans qu’il soit porté atteinte à l’intégrité de l’immeuble n’est pas de nature à faire obstacle au caractère d’immeuble par nature de l’ensemble, qui doit être apprécié globalement.

En l’espèce, le CE considère que la sculpture a perdu son individualité lorsqu’elle a été incorporée au monument funéraire.

A l’inverse de la CAA, le CE relève que :

  • la statue a été acquise spécifiquement pour la tombe
  • elle est fixée sur une stèle conçue exprès pour l’accueillir, réalisée dans la même pierre que la sculpture et implantée sur la tombe

Le Baiser et sa stèle font ainsi partie, avec la tombe, d’un ensemble indivisible qui constitue un monument funéraire. Il s’agit donc d’un immeuble par NATURE, ce qui permet son inscription aux MH sans recueillir l’accord de ses propriétaires.