Une galerie a vendu une paire de fauteuils attribués à Diego Giacometti.
 
Une expertise amiable, postérieure à la vente, a cependant conclu que ces fauteuils n’étaient pas authentiques.
 
La galerie a remboursé l’acheteur et récupéré les fauteuils.
 
Les ayants droit de Diego Giacometti ont alors poursuivi la galerie pour contrefaçon, lui reprochant d’avoir reproduit une œuvre du sculpteur sans leur autorisation.
 
Le 19 juin 2020, le TJ Paris a reconnu les actes de contrefaçon et condamné la galerie à verser aux ayants droit de l’artiste 1.000 € au titre de l’atteinte aux droits patrimoniaux et 1.000 € au titre de l’atteinte aux droits moraux.
 
L’affaire est partie en appel, sur la seule question de l’indemnisation, que les ayants droit jugeaient trop faible.
 
Le 2 novembre 2022, la CA Paris a confirmé les dommages-intérêts de 1.000 € pour les droits patrimoniaux, mais porté à 10.000 € les dommages-intérêts pour les droits moraux.
 
1/ Sur les droits patrimoniaux
 
Il existe 2 méthodes de fixation des dommages-intérêts :

  • 1ère méthode : calcul poste par poste (préjudice économique + préjudice moral + bénéfices réalisés par le contrefacteur)
  • 2ème méthode : montant forfaitaire

C’est cette 2ème méthode que les ayants droit de l’artiste souhaitaient voir appliquer.
 
Cependant, pour déterminer le montant forfaitaire de dommages-intérêts, il faut se référer au montant de la redevance que les ayants droit de l’artiste auraient perçu si la galerie avait demandé leur autorisation.
 
L’art. L. 331-1-3 du CPI précise en effet : « Cette somme [forfaitaire] est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l'auteur de l'atteinte avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. »
 
Problème : au lieu de fournir un justificatif du montant de la redevance qu’ils revendiquaient, les ayants droit ont réclamé un pourcentage du prix de vente des fauteuils ➡ méthode de fixation non recevable.
 
La Cour a alors considéré, mais sans rentrer dans le détail, que la somme de 1.000 € accordée en première instance était suffisante.
 
2/ Sur les droits moraux
 
La Cour a constaté que les fauteuils litigieux n’étaient pas des œuvres créées de toutes pièces et faussement attribuées à Diego Giacometti, mais des copies de fauteuils authentiques ce qui, selon elle, est bien plus répréhensible.
 
La Cour relève également que l’artiste avait exprimé de son vivant son opposition à la réalisation, après sa mort, de ses œuvres en original ou en copie.
 
Par conséquent, l’atteinte au droit moral de l’artiste est indéniable.
 
Pour la Cour, ce préjudice sera plus justement réparé par l’attribution de la somme de 10.000 €.

En matière de contrefaçon ne jamais négliger la question (délicate) de l'évaluation du préjudice !